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Une semaine s'était écoulée depuis le départ de Roano. Je n'avais pas eu de nouvelles, pas d'appels ni de messages et cela me rendait folle. En plus de cette absence que je supportais difficilement je commençais à avoir des hallucinations. Plus d'une fois je m'étais sentie observée dans ma chambre et même quand je sortais ; malgré mon escorte je ne me sentais pas en sécurité. Je ne savais pas ce qu'il était advenu de Nicolas mais le silence radio de Matthieu depuis plus d'un mois me revenait en tête et m'inquiétais plus qu'autre chose. Alors que je faisais parler cette inquiétude sur la toile, mon portable sonna dans ma poche et inutile de dire que je me précipitai pour décrocher l'appel.

- Roano?

- Je suis navré Layana, ce n'est pas ton bien-aimé.

Le ton enjoué de Javier me réchauffa le cœur, mais n'effaça pas la déception qu'il y avait dans ma voix.

- Bonjour Javier, que puis-je faire pour toi?; demandai je sans grande conviction.

- Je te retourne la question, je n'ai pas eu de tes nouvelles depuis une semaine et ne vas pas croire que je n'aime pas mon chèque payé sans bosser, c'est juste que en plus d'être ma patiente tu es mon amie.

- Ce n'est pas prohibé ce genre d'attachement dans ta profession ?; demandai je absente de la conversation.

- Tu te fermes Layana... Qu'est-ce qu'il se passe ? Un souci avec Roano?

Mon cœur se serra sans que je ne sache pourquoi. Je déposai la palette de couleur avant de lâcher un long soupir.

- Tu sais ce que j'aurais souhaité ? Être libre, ne dépendre de personne et c'est tout le contraire qui m'arrive. Je suis émotionnellement dépendante de Roano, et depuis qu'il est parti et qu'il m'a laissé sans nouvelle... J'ai le sentiment d'avoir fait un bond arrière de 10 ans. Et je ne peux pas m'empêcher de me dire que je suis la seule responsable.

- Est-ce que tu aimerais que je viennes te trouver au manoir pour en parler ?

- Ce n'est pas au psy que je veux parler, mais à mon ami... qui certainement sait des choses.

- Layana... le secret professionnel ne me permet pas de te dire quoique ce soit concernant mes séances avec Roano. Si tu veux on peut se voir autour d'un café dans une...

- Sans façon... Je suis occupée ; lâchai je d'un ton détaché.

- Layana...

- Merci d'avoir appelé Javier, aurevoir.

Sans attendre de réponse, je raccrochai pour me replonger sur ma toile qui était d'une horreur qui ne disait pas son nom, mais qui exprimait actuellement tout ce qu'il y avait dans ma tête et dans mon cœur.

Lassée de tourner en rond, je décidai de me rendre en ville et ceci le plus discrètement possible. J'étais sortie sans escorte, et voilà que mon échelle de stress était montée en flèche. Je regardais partout autour de moi, comme une fugitive en cavale. Mes pieds avançaient seuls et finirent par me mener vers une petite galerie d'art, dans laquelle je me réfugiai. Adossée à la porte d'entrée, j'essayais de redonner un rythme normal à mon cœur lorsqu'une jeune femme s'approcha de moi.

- Perdoname señorita puedo ayudarte? "Excusez moi mademoiselle puis-je vous aider?"

- No, gracias.

Elle me fixa un moment avant de me laisser. Pour ne pas attirer plus d'attention sur moi, je me glissai entre les poteries anciennes et les tableaux d'artistes qui m'étaient totalement inconnus.
Je ne sais depuis combien de temps j'étais restée plantée à observer la peinture d'une femme qui avait le regard absent. C'était la première fois qu'un tableau me captivait autant, et auquel je m'identifiais. Il y a quelques mois j'aborais le même regard en toutes occasions, heureuses comme malheureuses. Il y a quelques semaines il avait laissé la place à un regard plus heureux, et rempli d'espoir. Aujourd'hui... Je ne savais plus réellement dans quel état d'esprit je me trouvais mais une chose était certaine, Roano était devenu mon addiction. Il n'y avait qu'avec lui que je me sentais désormais en sécurité, et j'avais une boule au ventre en me disant qu'il était probablement parti pour ne plus jamais revenir. Après tout, ce manoir n'était qu'un grain de sable dans son immense fortune et j'apprenais à mes dépends qu'il n'avait pas une grande signification sentimentale pour lui.
Au sujet du manoir, je fus surprise de le voir aux informations et qui plus est... En feu.

Alors que je me rapprochais de l'écran autour duquel s'était agglutiné le petit monde de la galerie mon cœur s'affola. Quasiment la moitié de la maison était en feu, surtout l'aile dans laquelle je résidais avec... Carmen! Je farfouillai dans mon sac pour retrouver mon portable, et je découvris un nombre incalculable d'appels du chef de la sécurité, de Carmen et de...Roano. Alors que je m'apprêtais à lui téléphoner, mon écran me signala un appel entrant de ce dernier.

- Allô ?

- Oh Dios mío, Layana où es-tu bon sang! Ça fait des heures que j'essaie de te joindre; gronda-t-il.

Il disparaît une semaine sans donner de nouvelles et c'est lui qui se plaint? La bonne blague.

- Excuse moi? Je te signale que c'est toi qui...

- Oui mademoiselle García je vous excuse d'avoir disparu sans prévenir personne alors que votre cher et tendre est de retour en Espagne!

Mon sang ne fit qu'un tour dans mon cerveau avant de se glacer. Ma gorge se noua, je fus tétanisée, tremblante de la tête aux pieds. J'épiai autour de moi, sur le qui-vive. J'avais bel et bien raison de me comporter comme une fugitive en cavale.

- Layana, où es-tu en ce moment ?

- Je... Je suis à... Je n'en ai aucune idée Roano; paniquai je.

- Est-ce que tu saurais me dire dans quel quartier tu te trouves ?

- Je suis à la Prettoria, une petite galerie pas loin de...

- Je sais où c'est, ne bouge pas de là j'envoie une voiture. En attendant, parle moi. Dis moi tout ce que tu vois.

Salvation BoardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant