Chapitre 23-5

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Desya avait essayé de me retenir ce matin, après le petit déjeuner.

— Que tu voies ton amie maintenant ou ce soir, ça ne change rien, m'avait-il dit pour me convaincre de rester auprès de lui.

— Je veux juste me débarrasser de cette histoire sinon, ça me gâchera le reste de la journée.

Puis je m'étais dépêchée de partir avant de changer d'avis.

Je poussai la porte d'entrée avec une certaine appréhension. Une fois débarrassée de mes affaires, je me dirigeai au salon où Adriana, June et Shelby m'attendaient autour de la table. Je ne manifestai tout d'abord aucune émotion, attendant que quelqu'un brise la glace. Shelby se leva de sa chaise avec la mine des mauvais jours puis se tourna vers moi. Elle respira profondément et ferma les yeux. Ma sœur et ma cousine restaient silencieuses et observaient la scène, les traits creusés par l'inquiétude. Shelby avait rouvert ses paupières et me fixait d'un regard peu amène. Pour ma propre sécurité, je restai debout, à la limite du couloir, préférant ne pas m'avancer à l'intérieur de la pièce.

— Elles sont au courant, Blue. Pourquoi sont-elles au courant de ta putain de liaison avec Olsen et pas moi ?

— J'ai voulu t'en parler un millier de fois, Shelby. Garder cela pour moi n'a pas été facile. Mais il y avait tellement de tabous autour de cette relation. Peut-être que si je l'avais assumée complètement, je te l'aurais dit.

Mon amie plissa les yeux, comme si elle se sentait insultée par ma réponse.

— Quatre mois, non, cinq mois et pas une seule fois, tu n'as trouvé le temps ni le courage de m'en parler ?

Désemparée, je portai mes mains sur le haut de mon crâne. La douleur m'enserra la poitrine.

— Comment t'en parler alors que je ne savais même pas ce qui se passait exactement avec Desya. Je ne pourrais pas te dire quand tout cela a réellement commencé tellement cette relation est décousue.

Je poursuivis, pressée d'en finir, avec l'espoir, au bout, qu'elle comprendrait mon silence. Je lui racontai ces journées passées ensemble, tous nos entretiens, ces cours d'espagnol, ces missions avec l'association, pour qu'elle réalise que toutes ces heures auprès de lui avaient créé un lien entre nous et qu'au final, tout m'avait échappé.

— J'avais honte, Shelby. J'étais prisonnière de cette image de fille sage qui me colle à la peau depuis l'enfance.

Mon amie m'examina de la tête au pied, l'air mauvais.

— Oui, je vois que tu t'es bien rattrapée.

Elle pointa du doigt mon chemisier bouffant qui laissait entrevoir le suçon de Desya sur la naissance de mon sein. Ma résistance aux reproches avait ses limites. Je ne pus retenir plus longtemps, les mots qui me brûlaient les lèvres :

— Arrête ça ! Tu es mal placée pour me faire la morale, niveau mecs.

Shelby fronça les sourcils, les joues rouges de colère.

— Tu insinues quoi, petite garce ? Que je suis une fille facile, comme toi ? C'est ça ?

La rage lui brouillait la vue. Elle insista :

— Allez, assume tes paroles !

Avant que je n'aie eu le temps de répondre, elle fondit sur moi, l'air assassin. Je me mis à courir autour de la table pour éviter que notre conversation n'en arrive aux mains. Shelby me poursuivit furieusement. Je fis halte pour tenter de la calmer, mais voyant que sa fureur redoublait, je repartis brusquement pour ne pas qu'elle m'attrape.

June et Adriana s'interposèrent en la bloquant à deux. Je m'arrêtai de courir et laissai la parole à la raison :

— Je ne t'ai rien dit aussi à cause de Paolo. Je ne sais pas de quoi ton frère est capable. Il m'a menacée, mise en garde un bon nombre de fois à propos de ma proximité avec Desya. C'est un tout, Shelby. Regarde dans quel état tu te mets.

Mes paroles ne suffirent pas à la calmer. Un déferlement de reproches, de mots blessants s'abattit sur moi. J'avais beau me justifier, elle ne voulait rien entendre. J'implorai les filles de la raisonner. Elles ne pouvaient pas rester aussi impartiales.

Shelby se débattait férocement des mains de June et d'Adriana.

— C'est bon, je m'en vais ! hurla-t-elle. Je ne veux plus jamais avoir à faire à toi. Ton amitié ne vaut que dalle ! Tu me dégoûtes.

Les larmes me montèrent aux yeux avant de rouler sur mes joues. Au moment où je crus cet entretien fini, Shelby bondit sur moi en jurant férocement. Nous roulâmes par terre en nous attrapant par les cheveux et commençâmes à nous battre comme des chiffonnières.

Désemparées, ma sœur et June nous criaient d'arrêter. Chacune nous tirait pour faire lâcher l'autre, mais nous résistâmes. À l'intérieur de la maison régnait un chaos sans nom.

Burn, beautiful Crow ( Version Française )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant