Chapitre 10.2: Viens on s'en va

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— Qu'est ce que vous foutez là? 

Mon interlocuteur promenait ses longs doigts fins sur les plantes décédées qui trônait dans mon salon. Il passa l'index sur l'étagère. Il leva le doigt maintenant recouvert de poussière. Il haussa les épaules visiblement heureux. Il était vêtu du même costume trois pièces gris qu'il portait lorsque nous nous étions rencontré. Lentement, il se tourna vers moi, profitant de ce pseudo moment de suspens qu'il pensait créer.  Sur sa veste, se balançait une montre à gousset en or, dont la vitre était cassée.

— Ah Victor! Je me demandais lorsque tu allais arrivé. Je t'en prie, assied toi, dit-il en désignant la chaise devant moi. 

Il lissa son pantalon et prit place dans mon canapé, comme s'il était propriétaire des lieux. Il me scruta de haut en bas avec son regard félin. Haussant une fois de plus ses épaules, il prie le temps d'enlever sa veste pour révéler un veston sobre en lin gris et de la déposer sur le bras du canapé. 

— Made in Italie, je présume.

Il ne répondit pas, continuant son manège. Ce cérémonial n'avait aucun sens, mais semblait affoler les deux armoires à glace qui m'encadraient. L'homme fin devant moi releva les manches de sa chemise. Il portait un tatouage sur l'avant bras: un serpent en noir et blanc s'enroulait autour d'une dague tranchante. Les détails étaient saisissants. 

— Content qu'il te plaise, bambini, dit-il. 

— Pourquoi ?

Il haussa à nouveau les épaules et posa la main sous son menton pour m'observer. Son manque de réponse commençait à m'exaspérer. Il portait deux grosses bagues. La première en argent une abordait le même dessin que son tatouage. On aurait pu croire à des armoiries. L'autre était serti d'une pierre rouge, qui semblait être rempli d'un liquide. Etrange. Nous restâmes pendant de longues minutes, se toisant tels des combattants avant le lancement des hostilités. Ma patience arrivait à bout, j'avais des bagages à faire, un psychopathe à fuir. J'avais pas le temps pour ces conneries. 

— Bon, moi je me tire. 

Je tentai de me lever mais les deux brutes freinèrent les maigres efforts de mes jambes. Tant pis. 

— Non. 

— Non quoi? Vous me voulez quoi ? 

— Tu es insolent, on s'occupera de ça plus tard. 

Il se leva du canapé et se dirigea vers la cuisine avec sa démarche de chat. Il ouvrit un placard, sortit deux verres et revint les poser devant moi. J'étais abasourdi. Comment ce serpent, rencontré au gala, avait-il su du premier coup où était les verres? 

 — J'ai une proposition pour toi sopravvissuto, déclara Pietro. Bois, tu dois avoir soif.

— Non. 

— Je me doutais que tu réagirais ainsi. Perdre ton amie n'a pas dû être facile. C'était quoi son prénom déjà? Amina ou Marie? On s'y perd avec tous vos prénoms! 

Il fit une pause, sourit et attendit de voir défiler les émotions sur mon visage. Je me forçai à ignorer mes émotions, je ne lui donnerai pas la satisfaction d'avoir fait moche. 

— Après tout, c'était toi qui devait mourir non? C'est ce qu'Alex avait dit non? Grégoire te tuerait et laisserait Marie en vie ruminer son chagrin. Mais ce n'est pas ce qu'il s'est passé, n'est-ce pas? Elle est morte et toi tu es... là, supravvissuto.

Il prie une gorgée d'eau. Comment savait-il tout ça? Est-ce que quelqu'un nous avait trahi? Je me contenais, ce crocodile n'allait pas gagner. Pas cette fois.

— Tu sais contrôler tes émotions c'est bien. Tu en auras besoin. Mais je vois le cheminement de pensées qui se dessinent dans ta petite tête. Comment est-ce que je sais tout ça? C'est très simple. Vois-tu lorsqu'un nouveau joueur s'installe en ville, ton ami Grégoire par exemple, je fais mes devoirs. J'aime savoir si ce nouvel entrant est un pion ou un joueur. Dans le cas de ton patron, enfin ancien patron, appuya-t-il, des applaudissements sont de mise. 

— C'est pour vous faire bien voir que vous êtes là? Vous allez me livrer à cette ordure? 

— Oh non, quelle idée. Ce serait gâcher ton talent! Un jeune comme toi, il faut lui apprendre à transformer sa rage dans quelque chose d'utile. 

— Dîtes à ces deux idiots de me lâcher et je vous montrerai comment ce qu'est la colère. 

— Magnifique, dit-il est frappant dans ses mains. 

Décidemment, il avait vraiment une case en moins. Je tremblais de rage. J'allais le massacrer. 

— Cependant, je ne suis pas ton ennemi. Je veux te faire la même proposition qu'au gala : travaille pour moi. Je connais ta réputation, je pourrai te montrer tant de choses. Tu sortiras du trou à ras que tu appelles "ta ville", tu feras le tour du monde, tu baiseras des femmes plus belles les unes que les autres. Tu seras respecté et libre. Qu'en dis-tu?

— C'est quoi les petits caractères? Y en a toujours avec les ordures comme vous. 

— Perspicace. Tu travailleras pour moi et de temps en temps, je te demanderai des services, combattente. 

— Vous pouvez aller vous faire foutre. 

— Pense à ta mère Nicolas, tu veux vraiment lui infliger cette vie? Tu t'apprêtes à fuir. Tu veux sincèrement lui imposer cette vie-là, bambini

Ma mère, je la baladai encore dans mes problèmes. Il avait raison sur le fait qu'il fallait que j'arrête. 

— Vos services ça rimerait à quoi? 

— Des combats majoritairement. Pas de drogue, je pense que tu as eut ton compte. Quelques supervisassions de livraisons d'armes à feu. Rien de bien méchant. Grégoire n'osera pas s'en prendre à toi s'il sait que tu es avec moi. Il te laisserait en paix.

Et je renoncerai à ma vengeance et Grégoire a la sienne. Quelle ironie? Il sortait du revers de sa veste, un rouleau de papier. Lentement, il déplia le long papier sur la table. Un contrat. Il claqua des doigts et l'un des grands gaillards lui apporta une boîte en bois décorés avec une mosaïque de bleus. Pietro ouvrit le contenant et en sortit un long stylé couronné d'une plume noire. Il déposa le tout devant moi et enleva sa bague avec le gros rubis. Il déclipsa le rubis et ouvrit délicatement le bijou. L'encre était rouge sang. Très cérémonial. Je pris le stylo et me demandais-je si je voulais vraiment passer d'un maître à un autre. Tout ça pour en arriver là. Le visage de ma mère, de Lucas et des gars défilèrent devant mes yeux. Je les avais abandonné eux aussi. Il ne restait rien pour moi ici. Autant tout oublier sur une plage.

— Il ne te reste plus qu'à signer, et tous tes problèmes s'envoleront, murmura le diable. 


FIN PARTIE 1


On se retrouve plus tard pour la partie 2 ! Hâte de lire vos commentaires sur la première partie des aventures de Victor! 




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⏰ Last updated: Dec 05, 2022 ⏰

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