1. Joyeux anniversaire

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Hailey, présent


Depuis une heure déjà, je suis enfermée entre les quatre murs de ma chambre, incapable de me motiver à en sortir. Même la peinture bleu pastel, censée rendre l'endroit plus apaisant, semble se moquer de moi et ne m'offre plus aucune paix. Tout ce que je retiens, c'est ce cri strident venant du rez-de-chaussée qui me fait sursauter. Les ricanements qui s'ensuivent devraient me rassurer, mais ce n'est pas le cas. Je capte plutôt mon regard dans le miroir, dont les fissures me renvoient mon image par dizaine. La teneur de mon effroi est impossible à ignorer ; elle empoisonne jusqu'à la plus fine parcelle de mon faciès.

— Rien ne t'arrivera, soufflé-je pour moi-même.

Tandis que je passe en revue ma silhouette, une grimace me tord le visage.

Par sa faute, je crois que je ne pourrai plus jamais apprécier mon image.

Et pour cause... Mes yeux bleus, autrefois si étincelants de vie, sont maintenant ternis par les horreurs de mon existence. Mes longs cheveux blonds, ramenés au-dessus de mon crâne dans un chignon désordonné, me donnent souvent envie d'y passer les ciseaux pour saccager mon apparence de poupée en porcelaine. Sans oublier ma taille frêle, pourtant camouflée sous un chandail beaucoup trop large pour moi, qui me donne l'impression que je vais casser à tout moment.

Peut-être est-ce le cas d'ailleurs ?

— Tu n'as rien à craindre, tenté-je de me convaincre.

Toutefois, les tremblements qui trouvent résidence dans mon corps ne semblent pas en accord. Peu importe à quelle fréquence je me répète ces mots, j'appréhende qu'on revienne chambouler mon monde. C'est pourquoi le vacarme venant du rez-de-chaussée m'angoisse. Je fuis comme la peste tout ce qui est synonyme d'imprévisibilité et ce soir, un univers regorgeant de risques s'est logé dans ma maison.

Afin de trouver un soupçon de courage, je prends une grande inspiration. Je me précipite ensuite hors de ma chambre, ne me laissant pas l'occasion de changer d'idée pour une énième fois. Plus ou moins prête à faire face aux autres, je dévale les escaliers, mais une fois au pied de celui-ci, je fige sur place. Comme si on venait de me percuter à la poitrine, mon oxygène me quitte et ma pression chute. Pause sur image. Je cligne des yeux une fois, puis deux. Et possiblement une troisième. Une panoplie de scénarios me traversent la tête, mon cerveau me suppliant de m'enfuir. J'enregistre la marée de corps dans mon salon, les confondant avec un banc de requin assoiffé de sang. Du mien, plus précisément.

Au moment précis où je m'apprête à faire demi-tour, on m'attrape par l'avant-bras !

Mon instinct de survie se réveille abruptement et sans que je puisse le retenir, mon poing libre s'élance. Plus rapide que moi, mon adversaire contre mon attaque ! Il englobe mes doigts des siens, m'arrachant un hoquet de stupeur.

— Rentre tes griffes, c'est juste moi !

Mon poing écrasé contre sa paume, à moins de dix centimètres de son visage, ça me prend quelques secondes avant de reconnaître celui qui se tient devant moi.

Il attend que je sois suffisamment détendue pour relâcher mes membres sans risquer que je le frappe, puis il ajoute :

— Tu sais, ce n'était pas nécessaire d'inviter autant de personnes pour me voir. Je me serais contenté de ta simple présence, tu es si... sympathique. Par contre, il faut revoir tes cadeaux d'anniversaire, chaton. Un poing sur la gueule, ça craint comme surprise.

Voici le seul et unique Kayden Reynolds. Il s'agit possiblement du type le plus emmerdeur que je connaisse, toujours présent pour balancer une pique qui me ferait sortir de mes gonds. À l'instant, son sarcasme ne m'échappe pas, raison pour laquelle je le gratifie d'une oeillade assassine. Celle-ci ne fait pourtant qu'accentuer la courbe moqueuse de ses lèvres, qui me fait presque regretter de ne pas lui avoir collé un pain sur sa tronche.

Les abîmes du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant