Chapitre 29 - Attente

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    Célestine n'avait pas bougé. Les vingt premières minutes, elle était restée debout face à l'océan. Scrutant la surface de la mer, elle avait écouté les vagues, attendu le retour de Taran. La brise marine lui caressait le visage, faible réconfort. Elle finit par s'asseoir, les genoux ramenés contre sa poitrine. Comment se passait la plongée ? Avait-il beaucoup de chemin à parcourir ?

Sa réflexion fut finalement interrompue par son téléphone portable. Elle le tira de sa poche et constata que le nom qui s'affichait était celui de son amie. Elle décrocha.


- Céleste, ça va ? Vous êtes où ?


- Moi ça va, répondit-elle. Je ne sais pas où je suis, enfin si, à peu près, mais, sans certitude. Il m'a guidée ici.

Gwenaëlle Solero mit quelques secondes à réagir :


- Hein ? Qu'est-ce que tu racontes ?

Célestine s'expliqua le plus clairement possible, mais son esprit était tourné vers la mer.


- Tu l'as laissé faire ?! s'étonna finalement le Dr. Solero.


- Je...

Célestine fut incapable de poursuivre. Elle baissa les yeux. S'il lui arrivait quelque chose, elle serait responsable.

À l'autre bout du fil, Gwen se mordit la lèvre, comprenant qu'elle venait de faire culpabiliser sa collègue.


- Excuse-moi, reprit-elle.


- C'est rien. Je suis désolée de ne pas vous avoir prévenus.


- C'est pas que pour ça que je t'appelle. Ton mari te cherche. Il m'a téléphoné. Je l'ai baratiné, je lui ai dit que tu étais chez moi. Que la journée avait été éprouvante et qu'on avait besoin de discuter pour évacuer, bla bla bla...

Célestine Amiral eut un rire jaune.


- Je l'intéresse maintenant ? Et pourquoi il ne m'a pas appelée directement ?


- Il m'a dit qu'il avait essayé trois fois.

Célestine éloigna le téléphone de son oreille le temps d'en regarder l'écran. Effectivement, l'appareil affichait trois appels manqués de son mari.


- Oui, c'est vrai.

Le silence tomba entre les deux amies.


- Bon. Tu nous tiens au courant de l'évolution de la situation ?


- Oui, d'accord.


- Ne t'en fais pas trop, conclut Gwen. Il est loin d'être con, le poisson. Il nous a mené en bateau un certain temps, souviens toi. Je suis certaine qu'il va revenir en un seul morceau.


- J'espère... soupira Célestine. À plus tard.


- À plus tard.

Elle raccrocha et glissa le téléphone dans la poche du pantalon de l'épouse d'Aimé. Elle se demanda ce que le Dr. Martin avait bien pu raconter à Marissa, et le Dr. Sanchez à Arnaud. Avaient-ils menti à leurs compagnons comme elle mentait au sien ?

Elle ressortit le téléphone de sa poche et consulta l'heure. La sirène était partie depuis une trentaine de minutes.

Célestine Amiral ramena de nouveaux ses genoux contre sa poitrine et les entoura de ses bras. Il faisait frais. Presque froid.

Elle reprit son attente silencieuse. Les yeux rivés sur le large. Au bout de quelques minutes, un mouvement dans le sable attira son regard. La chemise de Taran. Elle avait complètement oublié qu'il avait abandonné ses vêtements sans égards.

Se remettant sur ses pieds, elle alla les récupérer avant de retourner s'asseoir. Elle entreprit de les plier proprement et posa la pile obtenue à côté d'elle. Ses yeux s'attardèrent une seconde sur la chemise de lin et les chaussures rouges. Elle soupira et consulta une nouvelle fois son téléphone. Son cœur manqua un battement quand elle constata que les 45 minutes étaient écoulées. Elle se mit à scruter avec intensité les eaux marines devant elle.

Rien.

Elle se mit debout, et avança vers la mer. Son regard se fit plus intense.

« Si je ne suis pas de retour dans 45 minutes, repartez »

Contrairement à ce que lui avait indiqué Taran, la biologiste décida d'attendre encore. Elle sentit un mélange de peur et de remords l'envahir. Que se passait-il là-dessous ?

Elle retourna près des vêtements, sans pour autant s'asseoir et patienta. Une vingtaine de minutes supplémentaire s'écoulèrent, avant qu'enfin, elle n'aperçoive Taran émerger. Ses épaules se relaxèrent alors qu'elle soupirait de soulagement.

Dans l'eau, Taran tirait son coffre avec peine vers la plage. Persuadé que Célestine était repartie, il fut surpris de voir deux mains agripper la poignée de son coffre.

Il releva les yeux vers la biologiste qui lui adressa un bref sourire gêné avant de commencer à tirer la malle de fer.



Homo AquaticusWhere stories live. Discover now