Chapitre 1 : L'aube des murmures.

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L'aube naissait à peine lorsque Maëlle ouvrit les yeux. La lumière matinale, encore timide, se faufilait à travers les interstices des volets en bois, peignant des motifs de gris bleuté sur les murs de sa chambre. Le ciel à l'extérieur était un tableau de nuances évanescentes, où la nuit se retirait lentement pour céder place au jour. Le monde semblait encore plongé dans une semi-obscurité, comme s'il hésitait à se réveiller entièrement.

Le silence enveloppait la ferme, un silence profond et apaisant, rompu seulement par le léger souffle du vent qui s'infiltrait à travers les volets entrouverts. Les rideaux blancs, usés par le temps, ondulaient doucement, tels des fantômes dansant au rythme de la brise matinale. L'air était frais, chargé de l'humidité de la nuit, et Maëlle sentit la caresse douce et rafraîchissante de cette brise sur son visage encore tiède de sommeil. Les relents subtils d'herbe mouillée et de terre humide, qui semblaient monter des champs environnants, formaient une odeur familière et rassurante.

Maëlle cligna des yeux, encore à moitié dans ses rêves, et s'étira lentement dans son lit. Ses muscles étaient engourdis par le repos de la nuit, et elle profita de ce moment de transition entre le sommeil et l'éveil pour se détendre pleinement. Le contact des draps contre sa peau, légèrement rugueux après tant de lavages à l'eau dure, lui offrit une sensation de confort qui était devenue une constante dans sa vie. Elle se laissa aller un instant, se perdant dans la douce chaleur des couvertures.

Dans un coin de la chambre, le doux ronronnement d'Ely, son dalmatien, apportait une touche de vie à ce calme matinal. Le chien s'étirait, ses oreilles noires et tachetées frémissant au moindre bruit. Maëlle se souvenait encore du jour où Ely était arrivé à la ferme, une petite boule de poils tachetés qui avait immédiatement conquis son cœur. Ce jour-là, son père lui avait offert ce chiot pour son anniversaire, et depuis ce moment, Ely était devenu bien plus qu'un simple animal de compagnie ; il était devenu un membre de la famille, un confident silencieux et un compagnon fidèle.

Maëlle aimait ces moments d'accalmie, où la vie à la ferme semblait encore suspendue dans l'attente du réveil des autres. Le monde autour d'elle paraissait figé, plongé dans une tranquillité presque surnaturelle. On entendait parfois un craquement lointain du bois, ou encore un frottement léger, presque imperceptible, émanant des murs de la vieille maison. Ces sons, bien que discrets, résonnaient de manière amplifiée dans ce calme matinal, apportant avec eux une étrange sensation d'immuabilité. Elle resta immobile quelques instants, savourant cette sérénité rare, écoutant son propre souffle qui semblait suivre le rythme doux et régulier de la respiration d'Ely.

La chaleur réconfortante du café commençait à percer l'air, et Maëlle devina que sa grand-mère, Victoria, devait déjà être en train de préparer le petit-déjeuner. Le parfum du café, aux notes légèrement amères, se mêlait à la senteur boisée omniprésente dans la maison. Le bois de pin qui composait les murs de sa chambre, encore imprégné de l'humidité de la nuit, exhalait un arôme résineux, âcre, qui se mariait parfaitement avec l'odeur du café fraîchement passé. Cette odeur avait le don d'apaiser Maëlle, lui rappelant les petits déjeuners tranquilles de son enfance, avant que le tumulte du jour ne s'installe.

Victoria était une femme de traditions, une figure de stabilité qui avait toujours été là pour elle. Chaque matin, elle se levait avant tout le monde, préparait le café, et s'assurait que tout était prêt pour la journée. Maëlle se souvenait encore des histoires que Victoria lui racontait en préparant le petit-déjeuner, des récits d'un passé lointain, des souvenirs de son propre enfance à la ferme. Ces moments étaient empreints d'une douceur nostalgique, comme si le passé et le présent se rejoignaient dans un doux mélange de mémoire et de réalité.

Maëlle se leva finalement, posant ses pieds nus sur le sol en bois froid. Un léger frisson la parcourut, mais elle appréciait cette sensation. Le parquet était lisse sous ses pieds, usé par les années, par tous les pas qui l'avaient foulé avant elle. Chaque crépitement sous ses pas était une mélodie familière, un écho des jours passés et des vies antérieures. Elle se demandait combien de générations avaient traversé ces mêmes pièces, avaient entendu ces mêmes sons, et se sentait intimement liée à cette histoire collective.

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