DIX

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Je reste bloquée sur le message pendant quelques secondes, hésite un instant, puis me rhabille rapidement et prends la direction du parking. Je ne réponds plus de rien, seules mes jambes me dirigent.

Je marche pieds nus sur le sol sableux en regardant autour de moi. Et alors, je vois Matt, à quelques pas de moi, les bras ballants, comme s'il ne m'avait pas vu depuis des années. Tout à l'heure, ce n'était pas pareil. Là, je suis devant lui en tant qu'Angie. Je reste immobile en commençant déjà à regretter d'être venue. Il s'approche de moi.

— Je le savais...

Je ne réponds pas, et le fixe. Ma respiration est haletante, mon coeur au bord de l'explosion. Je n'aurais pas dû venir.

— Comment ça va ? demande-t-il, gêné de poser une telle question.

— Et toi ? fais-je d'une petite voix.

— Je n'en sais rien, à vrai dire.

Il est à moins d'un mètre de moi. Je le vois se rapprocher en deux pas et entourer ses bras autour de mes épaules. Je ne réagis pas sur le coup, pétrifiée, puis finis par rassembler mes mains dans son dos, hésitante. Je ne l'avais pas serré dans mes bras depuis longtemps. Je ne sais plus comment faire. Ma poitrine se serre douloureusement lorsque je sens son odeur. Ma soeur l'avait souvent sur elle, cette odeur.

Sentant que je pourrais m'effondrer si l'étreinte dure, je me détache de lui. Il secoue la tête.

— Angie, si tu savais comme je suis désolé pour ce que tu traverses...

— Tu n'as pas besoin de t'excuser. Tu traverses aussi des choses difficiles.

Il me lance un regard triste, avant de reprendre.

— J'ai l'impression que ma vie est vide sans Sarah...

— Je sais.

Tout mon corps tremble, et j'ai l'impression de pouvoir sentir mon coeur brutaliser ma cage thoracique.

— Comment va April ? ne puis-je m'empêcher de demander d'une voix fébrile.

— Elle a perdu sa meilleure amie. Pour elle, c'est comme si toi aussi tu étais morte dans cet accident.

Morte. Ce mot me frappe comme une massue. Un frisson me parcoure le corps. Je n'ose pas répondre, alors je hoche la tête.

— Comment tu gères... tout ça ? me demande-t-il.

— Comme je peux. J'ai changé de nom et de vie. Personne ne me connaît ici.

— Pourquoi ?

— Pour éviter le harcèlement des journalistes. Mais bon, en vrai, ça ne changerait pas grand chose qu'ils m'interrogent.

— Bah alors pourquoi tu ne restes pas Angie Hopkins ?

J'hésite à répondre. Je n'ai pas vraiment de réponse.

— Je ne veux pas de pitié, me contenté-je de répondre. Je préfère que personne ne me connaisse, et recommencer à zéro.

— Tu as peur...

— Quoi ? bafouillé-je.

— Tu as peur que le regard des autres te mette en face de tes problèmes. Tu as peur que les gens te fassent comprendre que t'es complètement paumée maintenant. Tu as peur de voir ta vie en face.

— Je n'ai pas peur.

Même quand je l'ai dit, peu importe à quel point j'ai pu sembler sûre de moi, je sais qu'il a raison. Mon ancienne vie me terrifie. Et penser qu'elle puisse me poursuivre, encore plus.

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