Au-delà des limites

Mother |9|

Je me réveille lentement au son du grabuge de mon alarme. Je n'ai vraiment pas envie de travailler aujourd'hui. Il y a des jours comme ça où on n'a juste pas la motivation nécessaire. Oui, ces jours-là sont plutôt fréquents chez moi.

Je me lève nonchalamment pour prendre ma douche. Histoire de me sentir bien éveillée. Je m'habille et descends pour recevoir les tâches à accomplir et en allant vers le Salon Miteux, je vois le téléphone avec lequel j'ai parlé à ma mère il y a deux jours. J'ai demandé au prince un jour de congé, mais il a refusé, il m'a bien fait comprendre que si je demandais encore une fois, je serais renvoyée.

Mais ça fait tellement longtemps que je ne l'ai pas vue... Chaque seconde passée à ses côtés m'est précieuse. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir dire à ma mère ? Elle est censée m'appeler aujourd'hui pour savoir quand je vais venir. Le problème c'est que justement, je ne vais pas venir.

Mme Delphine nous distribue nos corvées. Maintenant que je sais ce que j'ai à faire, je fais le chemin inverse pour chercher le matériel de nettoyage. Cependant, je suis arrêtée en chemin par la sonnerie du téléphone. C'est sûrement ma mère ! J'accélère le pas vers l'appareil pour ne pas manquer l'appel.

— Bonjour, vous êtes bien à la résidence principale des Imperio. Que puis-je faire pour vous ? dis-je d'un ton solennel.

— Arrête ça, tu sais très bien que c'est moi, répond ma mère en riant.

— Je sais bien, mais avoue que ça sonne classe « Bien le bonjour, que puis-je faire pour vous ? » dis-je en prenant une voix grave.

Nous rigolons longtemps, mais ma joie se transforme vite en inquiétude quand je l'entends tousser brusquement.

— Maman, ça va ?

Un bruit à ma gauche attire mon attention. C'est cette gamine d'Azélie.

Elle m'imite en répétant « Maman ça va ? » en faisant mine d'essuyer des larmes invisibles. Elle m'agace et je n'ai pas envie de la laisser gâcher mon moment de bonheur. Je fais mine de chercher quelque chose dans la poche de mon tablier et elle me regarde avec une grande curiosité, un point commun qu'elle partage avec Zaria. Je souris alors comme si j'avais trouvé ce que je cherchais et ressors un doigt d'honneur que je tends à Azélie.

Sans attendre sa réponse ou sa réaction, je prends le combiné et monte dans les appartements de l'héritier. Comme ça, je pourrai parler à ma mère tranquillement.

— Excuse-moi Maman. J'ai rencontré un problème, mais c'est réglé. Comment vas-tu ces derniers temps ? J'ai l'impression que ta toux a empiré.

— Oh rien de grave. J'ai dû attraper froid, ne t'inquiète pas. Mais dis-moi plutôt, tout se passe bien ? Personne ne t'ennuie ?

Pendant un bref instant, je pense au vieux pervers de la réception et au sale tour qu'Azélie m'a joué.

— Non, tout se passe à merveille.

— Sûre ? Si quelqu'un t'ennuie, tu m'appelles que je lui botte le cul ! dit-elle en rigolant à moitié. Oh, j'allais oublier, quand viens-tu me voir ?

Oups, la question que je redoutais.

— En fait... il y a un manque d'effectif en ce moment et ils ont besoin d'un maximum de personnel. Mais ne t'en fais pas, je trouverai un moyen de venir, dis-je en sentant une boule se former dans ma gorge.

— Je te fais confiance ma puce, je t'aime.

— Moi aussi, Maman.

Je la laisse raccrocher et tombe sur mes genoux. Qu'est-ce qu'elle va penser ? Que mon travail est plus important qu'elle. Cette situation me monte à la tête. J'ai besoin de revoir ma mère. Quelques larmes glissent sur mes joues, je les essuie d'un coup de main et me lève lentement. Pleurer ne changera rien. Je me retourne et étouffe un hoquet de surprise en voyant le prince dans l'encadrement de la porte. Depuis quand est-il là ? Il a tout entendu ?