19. Elle a les yeux verts.

2.3K 272 139
                                    

Allongé sur la couche, un bras autour de la taille de Tracy, je ne dormais pas. Mes pensées étaient tournées vers cette mystérieuse jeune femme rousse, qui m'avait interpellé plusieurs jours auparavant. J'avais eu un instant l'impression fugace de l'avoir déjà vue, mais... Je ne savais plus où. Pourtant... Un étrange sentiment m'avait envahi.

Tracy remua, se retournant de l'autre côté. Je la lâchai pour m'asseoir, me prenant la tête entre les mains. Je haïssais cette sensation de déjà-vu, et aussi ce vide sur mon passé. La brune m'avait assuré m'avoir trouvé dans une ruelle, et s'être occupée de moi. Mais alors... Pourquoi avais-je une bague dans ma poche ? Ce ne pouvait être pour Tracy, puisque je ne la connaissais pas.

Mais l'inconnue me connaissait, elle. Elle m'avait appelé par mon prénom. Et elle avait eu l'air bouleversée lorsque je l'avais interrogée. Et quand la brune s'était accrochée à mon bras, cette femme avait parue blessée, et sur le point de pleurer. Que lui avais-je fait ? Etait-ce une de mes nombreuses maîtresses ?

« - Tu dors pas, mon chou ? »

Je sursautai, et tournai le visage, pour voir Tracy, langoureusement étendue sur la couche. Je détournai le regard en secouant la tête :

« - Non. Je n'y parviens pas.

- Ben j'y peux rien. »

Son ton était vexé. Elle espérait sans doute que je l'embrasse, que je la fasse mienne, puis que je m'endorme à ses côtés en lui disant que je l'aimais. Mais j'en étais incapable. Je repensais à cette rousse. Elle était bien plus importante qu'une simple maîtresse, je le savais. J'entendis Tracy remuer, et bientôt, sa respiration se fit plus lente.

Lentement, je me rallongeai, et fermai les yeux.

Je préfère autant mourir, ou finir seule et vieille que de vous épouser ! Allez au diable, maudit catholique !

Je rouvris les yeux en sursautant, la respiration haletante. Cette voix... Je la connaissais. Je fronçai les sourcils, essayant désespérément de la rattacher à une personne. Cette même personne, une femme, semblait me détester. Pourquoi ? Apparemment, elle n'aimait pas les catholiques. Elle était donc protestante. Un brusque visage apparut devant mes yeux, trop rapide pour que je ne puisse le détailler ou le reconnaître. Un soupir de frustration m'échappa. Je me relevai rapidement et m'habillai. J'allais sortir, faire un tour. J'enfilai mon manteau, et attachai le fourreau de mon épée autour de ma taille. La nuit, la ville n'était pas sûre. Sans un regard pour Tracy, je sortis de notre mansarde. Je descendis les escaliers de cet endroit qui m'oppressait, impatient de sortir.

Une fois dehors, je fis quelques pas, sans regarder où j'allais. J'étais préoccupé par cette voix. Pourquoi sentais-je qu'un sentiment trouble était rattaché à cette femme ? Qui était-elle ? Et qui était cette inconnue rousse ? Encore une fois, je plongeai la main dans ma poche, et en sortis la bague. Une émeraude en ornait le dessus. Je savais que c'était une bague de fiançailles, Tracy me l'avait dit. Elle espérait sans doute que je lui offre, mais je savais que ce bijou n'était pas pour elle. Je soupirai en la remettant dans ma poche.

Encore une fois, le visage bouleversé de cette rousse envahit mon esprit, provoquant un étrange mal-être en moi.

Que faîtes-vous ? Comptez-vous attendre ici qu'il fasse nuit ?

Je sursautai, et trébuchai brusquement, m'étalant dans la boue malodorante. A genoux dans la saleté, je fermai les yeux de toutes mes forces, cherchant à revoir la scène qui m'était apparue un fugace instant. Un village, un cheval, et... Une jeune femme aux contours flous. La même jeune femme protestante, je le savais. Sa voix aux accents colériques était la même. Un sentiment d'amusement m'envahit. J'étais amusé lorsque j'entendais cette voix furieuse. Mais pourquoi ?

Raison ou sentiments ? ✅Où les histoires vivent. Découvrez maintenant