38. Je... Je suis mariée à un catholique !

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Un cri d'épouvante mourut dans ma gorge. Non... Non ! Je la lâchai aussitôt pour me lever, des larmes roulant sur mes joues. J'attrapai ma pèlerine avec des gestes précipités, et l'enfilai en balbutiant :

« - Comment... Comment le sais-tu ? Qui l'a dit ?

- C'est au village, y disent qu'y z'ont capturé le capitaine, avec ses hommes, et... Elle me considéra d'un regard profondément désolé. Ils vont les exécuter. Aujourd'hui. »

Mes jambes se dérobèrent sous moi. Nolwenn me rattrapa de justesse. Je cherchai son regard, murmurant avec peine :

« - Non... Non, ce n'est pas vrai... Pas lui...

- Mamzelle, j'comprends rien à c'que vous racontez !

- Je dois y aller ! Reste ici, au cas où ! »

Je la repoussai brusquement pour me ruer hors de la pièce, le cœur déchiré. Je devais empêcher cela ! Je l'entendis s'écrier :

« - Mamzelle ! Non, n'y allez pas ! »

Je m'arrêtai au bas des escaliers pour lui ordonner d'un ton impérieux, mais mouillé de larmes :

« - Reste ici. Si je ne suis pas revenue à la fin du jour, prends tout ce que tu peux, pour le revendre.

- Attendez ! »

Elle m'agrippa le bras et me serra contre elle :

« - Laissez-moi v'nir avec vous !

- Il n'y a pas de deuxième cheval. Baptiste... Ne m'en a payé qu'un seul, et tu le sais. C'est à moi d'y aller.

- Mais s'y z'apprennent que vous êtes sa femme ? S'y vous tuent ?

- Alors vends tout ce que tu peux pour profiter de mon argent. Je dois y aller, Nolwenn ! »

Je fondis en larmes, m'écroulant dans ses bras. Elle balbutia, pleurant elle aussi :

« - J'suis désolée, mamzelle...

- Ce n'est pas de ta faute. »

Je me redressai pour essuyer mes joues, et la considérai longuement, le cœur serré. Avant que le courage ne disparaisse, je me détournai et sortis précipitamment du château. Je me ruai dans les écuries, ne pris pas la peine de seller Prince, et l'enfourchai. Je le talonnai brusquement, la vision brouillée par les larmes. Il galopa aussitôt, sortant brusquement des écuries. Si jamais j'arrivais trop tard...

Le paysage défilait sous mes yeux hébétés. Je m'accrochais à la crinière de Prince, le laissant galoper en direction du village. Ce n'était pas la première fois que des hommes étaient exécutés, mais je n'y comprenais rien. Le village était dans une zone catholique, alors pourquoi exécutaient-ils justement des catholiques ?!

Lorsque j'aperçus le village, je talonnai ma monture pour qu'elle accélère. Et si Baptiste était déjà... Mort ? Qu'allais-je devenir sans lui ? De nouvelles larmes m'échappèrent, et disparurent avec le vent qui me fouettait le visage. J'aurais dû le retenir, le forcer à rester ! Un sanglot me noua la gorge, et je secouai la tête. Non, j'allais arriver à temps !

Arrivée devant l'entrée, je descendis brusquement de Prince, et me précipitai dans le village sans l'attacher. Il y avait foule sur la grande place. Tous se massaient devant une grande estrade, sur laquelle se tenaient sept hommes, le visage masqué par un morceau de toile qui leur recouvrait la tête. Je portai une main tremblante à mon cou, m'avançant lentement parmi les habitants. Un homme, vêtu de noir et une hache à la main, s'approcha du bord de l'estrade, et s'écria :

Raison ou sentiments ? ✅Où les histoires vivent. Découvrez maintenant