White Silence

Silence 16

Musiques écoutées pendant l'écriture :

-Interstellar (Soundtrack) - Don't Let Me Leave, Murph
-Interstellar Main Theme [Fingerstyle Guitar Cover by Eddie van der Meer]
-Hans Zimmer - Interstellar - Main Theme (Piano Version)
-Hans Zimmer - Time (OST _Inception_) │ Fingerstyle guitar

Touka se glissa à l'extérieur du quartier général, au nez et à la barbe des gardes. Elle connaissait suffisamment l'organisation de leur ronde pour pouvoir sortir du bâtiment sans se faire prendre. Il aurait été certes plus simple d'aller vers eux et prétendre à une petite promenade nocturne en attendant de trouver le sommeil, mais elle soupçonnait Kaneki d'avoir pris certaines dispositions. Touka ne connaissait que trop bien le jeune homme, s'il avait soupçonné quelque chose quant à son comportement, il n'aurait rien dit, mais aurait pris des mesures pour l'empêcher de mettre son plan à exécution. Il avait appris depuis longtemps qu'il ne pouvait pas la raisonner quand elle savait que ses actions étaient justes.

Et en ce moment, son action était aussi juste que dangereuse.

Touka longea les bâtiments aux alentours du QG, profitant de leur ombre pour s'éloigner en toute impunité. Le ciel était de son côté, car la nuit était nuageuse et rendait les environs plus sombre qu'à l'ordinaire. La jeune femme prit soin d'effacer ses traces et d'en fabriquer des fausses, afin de mener de potentiels poursuivants sur la mauvaise piste. Cela ne les empêcherait pas de la retrouver, mais ils seront suffisamment retardés pour qu'elle ait le temps de mener son opération à bien.

Après avoir soigneusement couvert ses arrières, Touka escalada une vieille maison au toit instable et commença à se déplacer de bâtiment en bâtiment, tel un chat noir se mouvant dans la nuit. Ainsi, il serait beaucoup plus difficile de retrouver sa piste. Par ce temps neigeux, nombreuses étaient les goules à choisir ce même mode de déplacement car il permettait aux prédateurs de ne pas les retrouver et de les prendre par surprise. La neige, bien qu'épaisse, glissait des toits, la glace ayant déjà marqué son territoire. Et le peu de poudreuse qui parvenait à s'agripper était boueuse, martelée par les pas de dizaines d'êtres différents, proposant tant de possibilités de chemin à suivre qu'il était impossible de faire un choix.

Touka progressa lentement, prenant garde à ne pas trébucher. Le mauvais état de certaines structures ne lui facilitait pas la tâche, mais elle avançait à un rythme correct. Depuis combien de temps était-elle partie, elle l'ignorait. Les nuages épais étouffaient les rayons de la lune, supprimant ainsi toute notion temporelle. Touka se référa donc à la fatigue de ses muscles pour se repérer et estima qu'elle était partie depuis près de trois heures. L'exercice lui faisait à peine ressentir le froid, et ses poumons s'était habitués à l'air glacé.

Elle arriva bientôt à un endroit qui lui était familier. C'était une vieille bâtisse, écrin de nombreux souvenirs.

L'Anteiku. Son premier lieu de travail. Sa deuxième maison.

Voir les ruines remua une foule de sentiments en Touka. Ici, elle avait rencontré des gens qui étaient devenus sa famille. Avec eux, elle avait mené de durs combats, elle avait grandi, mûri, changée. Ici, on l'avait aidée à devenir celle qu'elle était aujourd'hui. Elle avait appris la tolérance, à faire la paix avec sa rage et ses ressentiments. Elle avait souffert, aussi. Souffert de la séparation, parfois brutale et définitive de certains êtres qu'elle avait considéré comme des frères, des sœurs. Souffert de la violence des mots, des actions... Mais elle ne les regrettait pas.

Elle n'était plus revenue ici depuis la guerre, et à présent, Touka se sentait coupable de ne pas avoir rendu hommage comme il se doit aux gens qui l'avaient recueillie. Elle demeura immobile une longue minute devant l'ancien café, les yeux fermés, toutes ses pensées tournées vers ceux qu'elle avait perdus. Puis, décidant qu'elle ne pouvait pas perdre plus de temps, elle s'engouffra dans les ruines.