Chapitre 44 : Sofia

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"I got a brand new attitude
And I'm gonna wear it tonight
I wanna get in trouble
I wanna start a fight"

So what, P!nk


Sofia retrouva très vite ses petites habitudes en rentrant chez elle. Pourtant elle ne savait pas vraiment quoi, mais quelque chose avait changé dans l'équilibre de la maison.
Ce fut lors du premier repas en famille qu'elle réalisa le problème : son père n'adressait la parole à personne, ou du moins que pour des choses moindres comme "Peux-tu me passer le sel ?" ou "Sers-moi de l'eau s'il te plaît !". Et surtout, il ne les demandait surtout pas à Alan, comme s'il était atteint d'une maladie grave et contagieuse.

- C'est comme ça depuis quand ? demanda Sofia à sa mère tandis qu'elles rangeaient la vaisselle.

- Depuis qu'Alan a présenté Eliott. Ça a empiré après ton départ car Dany et moi avons essayé de raisonner ton père mais il ne veut rien entendre.

- Comment peut-il faire ça à son propre fils ? s'agaça Sofia.

- Je ne sais pas. Je n'ai pas la réponse à cette question et pourtant ça arrangerait tellement de choses si je savais.

Sofia réfléchit longtemps au problème que son père causait, car l'orientation sexuelle de son frère n'en était sûrement pas un. Plus elle cherchait des raisons, plus elle s'énervait. Après une heure à ruminer, elle bouillonnait de rage. Elle sentait qu'elle devait évacuer sa frustration et sa colère alors elle installa son sac de frappe au milieu du garage.

Elle frappa avec un rythme effréné pour vider ses émotions négatives. Elle s'en fit mal aux doigts. Ses phalanges se mirent à saigner à force de frotter le tissu avec violence.

- Sofia ? Qu'est-ce que tu fabriques ? demanda Alan, surpris par le bruit.

- Je me défoule.

- Tu dois être très énervée pour aller jusqu'à t'abîmer les phalanges.

- Très !

- Quel est ton problème ?

- Papa ! Je ne comprends pas sa réaction, expliqua-t-elle en continuant de frapper de plus en plus fort. On dirait un enfant immature qui fait un caprice. J'arrive pas à croire qu'il puisse être aussi intolérant.

- Moi-même je ne comprends pas, mais j'ai arrêté de chercher à le faire.

- Tu n'aurais pas dû ! C'est ton choix pas le sien !

- Calme-toi ! Tu vas te faire mal, tenta-t-il de l'avertir. Sofia !

Trop tard, le mal était fait. Un mauvais coup et un craquement retentit dans le garage. Sofia s'empêcha de hurler de douleur. Son poignet commençait à enfler et après un certain temps, il devint bleu.

- Ça va ? s'assura Alan.

- Mouais, marmonna Sofia en retenant ses larmes par l'action simple de se mordre les joues.

- Maman !

Leur mère accourut, suivie par les jumelles, à moitié vêtues comme à leur habitude.

- Qu'est-ce qu'il passe ? demanda-t-elle affolée.

- Regarde !

Dès qu'elle vit le poignet de sa fille, elle s'agita dans tous les sens. Mais Sofia ne cessait de répéter qu'elle ne sentait rien. C'était un mensonge bien sûr, elle souhaitait juste être seule pour se calmer mais maintenant tout était agité autour d'elle. Ses sœurs couraient dans tous les sens et voulaient toucher la main de leur grande sœur.
Alan appela Dany et leur mère tenta de joindre leur père, "sorti prendre l'air" ou plutôt "je fais tout pour vous éviter". Ce fut Valéria qui réussit même si Sofia sentait l'énervement dans ses paroles.

Au final, ce fut son père qui l'amena à l'hôpital. Par chance, elle n'eut pas besoin d'un plâtre, simplement d'une attelle.

Sofia tenta vainement d'engager une conversation avec son père mais il ne répondit pas. Alors elle décida de déballer tout ce qu'elle avait sur la poitrine.

- Que tu ne veuilles pas nous parler est une chose que je ne comprends mais si en plus tu nous ignore, je n'ai même plus envie de t'apprécier. Je n'ai aucune envie de m'excuser pour ce que je vais dire car c'est ce que je pense franchement. Ce n'est pas parce que tu es mon père que tu peux m'empêcher d'exprimer mon avis.
Comment peux-tu refuser la sexualité de ton fils ? Ce n'est pas anormal. Je conçois que tu puisses avoir du mal à l'accepter au début mais au point de le renier ! C'est juste homophobe et l'homophobie c'est du racisme. Toi qui nous a toujours appris à respecter toutes les cultures, tu n'es même pas capable de le faire avec Alan. Ça me dégoûte ! Tu ne crois pas qu'il a besoin du soutien de son père dans une société où beaucoup trop de gens réagissent comme toi et rejettent les homosexuels.

- Sofia ! s'énerva son père. Je ne t'autorise pas à me parler sur ce ton.

- Si ça me permet de te rendre la raison alors je le ferai. Essaye au moins de comprendre et de te mettre à sa place pour une fois. Il est toujours le même.

- Sofia ! Arrête toi maintenant où tu regretteras les conséquences de tes paroles !

- Je m'en fous ! Je veux juste que tu m'écoutes !

- C'est fait ! Je t'ai écouté, tu es contente ? En attendant tu resteras dans ta chambre jusqu'à demain pour réfléchir à ton comportement.

Sofia soupira mais au fond, elle savait qu'elle avait touché une corde sensible et que son père allait y penser, même s'il lui faudrait du temps.

Bilan de la journée : samedi de retour pourri avec entorse au poignet et dispute avec son père. Heureusement qu'Astrid passait le lendemain. Sa meilleure amie lui avait manqué. Cela faisait des semaines qu'elles ne s'étaient pas vues.

Astrid et Sofia se connaissaient depuis longtemps maintenant. Leur rencontre remontait à l'école primaire quand Astrid était considérée comme la nouvelle du CE2 puisqu'elle n'était pas en CE1 ni en CP avec les autres élèves de sa classe. Sofia, quant à elle, avait sauté le CP en cours d'année précédente et donc ne s'était pas vraiment intégrée dans sa classe. Le fait du voir une nouvelle tête la sauva : elle commença tout de suite à lui parler, elles se firent d'ailleurs réprimander par la maîtresse et depuis elles ne se quittaient plus. Elles s'étaient toujours débrouillées pour choisir les mêmes options dans les mêmes écoles pour avoir le plus de chance de se retrouver ensemble, et jusqu'à présent ça avait fonctionné.

La meilleure amie de Sofia arriva en début d'après-midi, à sa plus grande joie. Elles la passèrent à raconter les aventures estivales et leurs projets pour les semaines à venir.

Sofia était plus que ravie d'avoir quelqu'un à qui parler car, qu'ils le veuillent ou non, les théâtreux étaient tous plus âgés que Sofia et refusaient parfois inconsciemment de l'écouter. Sofia ne leur en voulait pas car ils ne se connaissaient pas assez pour la comprendre et puis elle était habituée à ce genre de situation. Il n'empêchait que Sofia était vraiment heureuse de pouvoir confier tous ses états d'âmes à sa meilleure amie. Astrid connaissait sa famille et ses amis donc il était nettement plus simple de lui en parler. Surtout lorsque venait le sujet de la relation entre son frère Alan et son père.

Sofia était toujours remontée après son père mais au fond d'elle, elle savait qu'il allait réfléchir à ce qu'elle lui avait dit. Elle espérait seulement qu'il serait capable d'écouter ses paroles et de prendre la bonne décision. Bien entendu, elle savait que son père ne ferait pas d'effort tout de suite car il avait un caractère aussi trempé que celui de sa fille. Sofia souhaitait seulement qu'il ne prenne pas trop de temps au risque de perdre la confiance et l'amour de son fils.

Petit chapitre de colère chez Sofia.

Comprenez-vous sa réaction ?

Petit indice pour le prochain chapitre : Libérée Délivrée !

Voili voilou

Les étoiles d'un été  Tome 1Where stories live. Discover now