CHAPITRE 3

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ABDOURAHMANE SALL

Je reviens de chez Mossane. J'ai parlé à son père qui m'a dit d'envoyer mes émissaires le jour que j'aurai décidé. J'ai opté pour le samedi prochain. Et si ça ne tenait qu'a moi ce serait aujourd'hui même mais Mossane m'a demandé de lui laisser le reste de la semaine pour se préparer.

Je suis actuellement en route pour chez moi, je dois parler à ma femme. Maman a eu un empêchement. Avec Mossane nous irons la voir demain in sha Allah.

Arrivé à la maison, je trouve Aïcha devant la télé avec les enfants. Amadou n'avait même pas senti que j'étais là tellement il était absorbé par ses dessins animés J'ai du me mettre devant la télé pour qu'il réagisse.

Coumba elle, dés qu'elle a entendu ma voix, elle a couru vers moi. Je la prends dans mes bras et elle se met à marteler je ne sais quoi dans un langage que j'ai du mal à saisir. Je pars m'assoir à côté de Aïcha qui me donne un doux bisou sur les lèvres.

J'eus comme un pincement au cœur. Je me demandais comment allait-elle réagir quand je lui annoncerai la nouvelle.

Il était 17 heures. Je pris une douche, priais et la retrouvais dans le salon entrain de me préparer le thé.

C'était chaque jour pareil, depuis qu'on est marié. Quand je rentre du boulot, je monte prendre ma douche et quand je redescends elle était déjà en train de préparer le thé, à n'importe quelle heure. Le dimanche, elle commençait le thé avant même mon réveil et me le servait juste après le petit déjeuner.

Elle me servit le déjeuner et bien sûr, je mangeais sans grand appétit.

-chéri xana tu es fatigué ? Tu n'as presque rien mangé ? Ou bien ce n'est pas bon?

-si, c'est très bon. C'est juste que je suis un peu fatigué.

A vrai dire, depuis que je suis entré dans la maison j'ai un nœud au fond de ma gorge. Pourtant je pensais avoir été bien coaché par mon frère quand je lui ai demandé comment il avait annoncé la nouvelle à sa femme.

-y a pas mille façons Man. N'y vas pas par quatre chemin et ne perds pas ton temps à lui chanter ses louanges ou autres choses du genre. Crois-en mon expérience. Tu as été un véritable guerrier jusque là, restes le. L'essentiel est que tu le lui dises toi et non un autre et surtout maintenant. Aïcha est calme et docile, ce n'est pas comme ma lionne là. M’avait-il dit.

En effet, le jour où Abdoulaye a annoncé à Seynabou qu'il avait pris une deuxième femme, nous, on était au salon et on l'a vu détalé les escaliers comme une furie, Seynabou le poursuivant en lui jetant tout ce qu'elle trouvait sur son passage. Même la photo de Papa qui trônait en haut des escaliers en a fait les frais. On s'y attendait tous car Seynabou avait un caractère bien trempé. On avait même l'habitude de dire à mon frère que c'était elle qui portait la culotte. Sa réaction était prévisible, d'autant plus qu' il lui a annoncé la nouvelle après le mariage. Il lui avait dit qu'il avait un voyage urgent à faire et il est parti en lune de miel. Et quand il est revenu, il a du faire face à la réalité. J'avoue que ce n'était pas du tout responsable. Maman n'était pas au courant. Et pour lui, c'était mieux car elle n'aurait jamais été d'accord. Il les avait mis sur le fait accompli. C'était mes deux oncles, quelques uns de ses amis et moi même qui étions partis demandé la main de la fille et tout cela dans la plus grande discrétion. Elle nous en avait vraiment voulu. Surtout à moi.

-ya yaay yeugeulmako binga ko défei ba parei (tu as eu raison de me l'annoncer après) mais cela n'empêche Abdoulaye Sall je vais te tuer aujourd'hui, lui avait lancé Seynabou.

Mais on a beau se préparer ou être préparé à certaines choses, au moment de les accomplir, on se rend compte que ce n'est pas aussi facile que ça.

Après le diner et lorsque les enfants sont allés se coucher je suis venu me mettre à coté d'elle au salon

-chérie je veux te parler lui dis-je en lui prenant la main.

-oui je t'écoute mon cœur, me dit-elle en me regardant d'un regard tendre.

Et là, mon cœur a commencé à battre à cent à l'heure. Je ne pensais pas que ça serait aussi difficile de lui annoncer la nouvelle. Et elle me rend pas les choses faciles non plus avec son regard, ses gestes tendres, ma main qu'elle caresse... Mais quand faut y aller, faut y aller.

-Aïcha, je ne veux pas tourner autour du pot. Mais tout ce que j’aimerai, c’est un peu de compréhension de ta part.  Je vais prendre une deuxième femme. Le mariage aura lieu ce samedi. Je ne veux en aucun cas que tu penses que je le fais parce que tu as eu des manquements envers moi en tant qu'épouse ou que je ne t'aime plus. Bien au contraire, je suis et ai toujours été satisfait de toi. Et je t'aime. N'en doute jamais. Mais je suis musulman et je ne veux commettre aucun péché, du moins volontaire. Et cela, tu le sais…

Une minute
Deux
Trois
Quatre…

Elle n'avait rien dit, mais avait retiré sa main de la mienne. Son visage était impassible, comme si elle n'avait pas encore réalisé ou entendu ce que j'ai dit.

Son silence me désarmait au plus haut point. Et après quelques minutes où je ne savais vraiment plus où me mettre, elle me répondit avec le plus grand des calmes sans me regarder, ce même calme qui la caractérisait au quotidien :

-tu vas te marier avec qui Abdou?

-je doute que tu ne la connaisses. Elle s'appelle Mossane et elle habite à Garga.

-Tu l'as connu où ? Ça fait combien de temps ? Est-ce que tu l'aimes ? me demanda t-elle toujours aussi calme.

J'étais gêné face à ses questions surtout la dernière. Que cherchait-elle ? Que voulait-elle?

-je l'ai connu il y'a de cela trois mois quand je revenais d'une mission de Tamba. C'est allé très vite. Tu me connais, je n'aime pas les futilités ni perdre mon temps et...

Et là, sans me laisser terminer elle se leva, heurta la table et se mit devant moi, les mains sur les hanches et explosa :

-ET TU ME L'ANNONCES COMME ÇA? ... DONC DURANT TOUT CE TEMPS TU ME TROMPAIS ! ROIS MOI ABDOURAHMANE SALL, TROIS MOIS. J'ÉTAIS LÀ A T'ATTENDRE. TU ME DISAIS QUE TU ÉTAIS EN DEPLACEMENT A L'INTERIEUR DU PAYS. JE TE CROYAIS AVEUGLEMENT ALORS QUE TOI TU T'ENVOYAIS EN L'AIR AVEC UNE GARCE QUE TU DECIDES AUJOURD'HUI DE PRENDRE POUR EPOUSE.

Elle eut un rire sarcastique avant de continuer

-OÙ ETAIS-JE MOI DURANT TOUT CE TEMPS LA ABDOURAHMANE SALL ? OÙ EST-CE QUE TU M'AVAIS MIS ? TU ME TROMPAIS ET ME REGARDAIS DANS LES YEUX. LE SOIR, TU ME TOUCHAIS, TU ME FAISAIS L'AMOUR ALORS QUE TU PENSAIS A CETTE PUTE, SALE EGOÏSTE DOUBLÉ D'UN HYPOCRITE. ET TU OSES ME DIRE QUE TU N'AIMES PAS LES FUTILITÉS. TU ES TOI-MEME FUTILITÉS ABDOURAHMANE SALL. SINON TU N'AURAIS PAS ÉTÉ AVEC CETTE GARCE PENDANT TROIS MOIS. TROIS LONGS MOIS OÙ TU TE TENAIS LÀ EN FACE DE MOI ME MENTANT SUR TOUT. SI TU AS TOUJOURS ÉTÉ SATISFAIT DE MOI COMME TU LE DIS, QU'EST-CE QUI TE POUSSE À EN EPOUSER UNE AUTRE ? SI TU M'AIMES QUE VAS TU CHERCHER CHEZ UNE AUTRE?

J'avais l'impression de rêver là. Non, ce n'était pas la même Aïcha que j'avais épousé. On m'a changé de femme car en six ans de mariage elle n'avait jamais élevé la voix devant moi. Aïcha ne sait pas crier. Elle ne le fait jamais. Même quand je m'énervais contre elle à tord elle s'excusait et attendait que je me calme pour venir me parler. Et là...

Je lève les yeux, la regarde. Je ne lui connaissait pas ce visage là. Elle bouillonnait.

Mais pas plus que moi.

-DONC TOI HIER QUAND TU ES SORTI ET QUE TU ES RENTRÉ TARD, TU ETAIS AVEC TA GARCE. ET TU T’ES PERMIS DE ME MENTIR EN ME REGARDANT DANS LES YEUX ET TU AS EU LE CYNISME DE M'ENLANCER AVEC CES SALES MAINS AVEC LESQUELLES TU AS TOUCHÉ TA PUTE.

Je me levais…

-je ne te permet pas, en aucune façon Aïcha de te mettre au dessus de moi et de me crier dessus. Non mais tu t'entends parler ? Depuis quand es tu devenue vulgaire au point de sortir de ta bouche des choses pareilles. Tu as le droit d’être en colère mais pas d’être aussi vulgaire. Et je te rappelle que je n'ai pas signé monogamie avec toi. Je pouvais, comme le font beaucoup d'hommes, courir derrière les filles de gauche a droite mais tu me connais assez pour savoir que je ne verserai jamais dans le libertinage. Si je te parle de mon mariage c'est parce que je te respecte assez pour ne pas te laisser l'entendre de la bouche d'un autre que moi. Et que ça soit la dernière fois que je t'entende traiter Mossane de garce ou de pute. Elle sera ma femme au même titre que toi. Alors respecte la et respecte moi. Lui dis-je dépassé.

-je me permets de te parler comme bon me semble Abdourahmane Sall. Je me permets de te parler comme je veux car tu n'es qu'un vaurien. Tu penses que tu vaux mieux que ces hommes dont tu parles? Non, tu es pire, mille fois pire. Eux au moins ce sont des hommes, toi tu n'es rien. Ann han, c'est parce que je ne dis jamais rien du tout que tu penses que je cautionne tout. Tu pensais que tu allais faire ce que tu veux et venir ici me dire « eh ben voila je me marie ce samedi » ( elle parlait en imitant ma voix et mes gestes) et que moi comme toujours j'allais me coucher, te laisser passer et essuyer tes chaussures sur moi comme sur une serpillère. Mais je veux que tu te rentres une chose dans ta petite cervelle, si jamais elle franchit le pas dans cette maison, je m'en vais avec les enfants.

Je réduisais alors la distance qui me séparait d’elle et lui dit d'un ton calme et ferme :

-si jamais tu quittes cette maison, sois certaine que je ne viendrai pas te chercher.

Je me retournai et je allai directement au lit, énervé outre mesure mais plus surpris encore car je n'aurai jamais pensé qu'Aïcha serait capable de me dire tout ça et surtout en me regardant dans les yeux. Je savais que ça allait lui faire mal et qu'au pire des cas elle allait en pleurer ou me faire culpabiliser. Aucune femme n'aime s'entendre dire qu'on va lui trouver une coépouse. Mais je trouve sa réaction excessive.




AÏCHA NDIAYE


Mon monde s'effondre. J'ai mal. Jamais dans mes pensées, je n'aurais imaginé que Abdourahmane Sall puisse me faire autant mal. Jamais au plus grand jamais je n'aurais imaginé que l'idée de regarder une autre femme comme il me regarde lui viendrait à l'esprit. Et de là à prendre une deuxième épouse...

Je me sens trahie, j'ai mal. Mon Dieu où ai-je failli dans mon ménage?

Abdourahmane Sall a été le centre de mon monde. Je l'ai aimé Dieu m'est témoin. Je lui ai fait de beaux enfants et j'ai fait tout ce qui était humainement possible pour le rendre heureux.

J'ai supporté ses sauts d'humeur, ses crises d'autorité. Monsieur n'aimait pas les pantalons, je n'en portais plus. Il trouvait que les coupes de mes tailles basses était trop courtes, trop serrées, qu'ils montraient trop mon corps, j'ai dit au tailleur de les rallonger. Il ne voulait pas que j'ai beaucoup de fréquentations, que je ne prenne pas part aux tontines et autres activités des femmes de la cité. J'obéissais.

Il me voulait pour lui tout seul, à la maison avec les enfants. Je ne bougeais pas, j'étais à la maison h24. Depuis qu'on est marié je ne l'ai jamais contredit, je ne suis jamais sortie de la maison même pour aller au marché sans lui avoir dit. Même quand il était au bureau, je l'appelais pour lui demander la permission de sortir. Je n'ai jamais laissé personne faire quoique ce soit à ma place pour lui. J'avais une bonne mais c'est moi qui m'occupais de tout le concernant. J'étais toujours en alerte face à ses désirs. Je les anticipais même. Et au lit, j'ai usé de toutes les astuces pour lui faire tourner la tête et le satisfaire. En six ans de mariage, hormis les jours où j'avais mes règles ou quand j'avais accouché, je ne lui ai jamais refusé mon corps.

Sans prétention je dirai que j'ai été une bonne épouse . Je pensais que fess na beutam, biiram ak soufou biiram ba dou guiss dara louko diomal ci bitti (j'avais rempli ses yeux, son ventre et son bas ventre et qu'il ne verrai pas quelque chose qui l'étonnerai venant d'une femme).

Alors quoi ? Qu'est ce que j'ai manqué qu'il est allé chercher chez une autre ? Qu'est ce que cette autre a que je n'ai pas ? A moins que ce ne soit...

Non Abdourahmane n'oserait même pas. Moi même, je n'ose pas y penser.

J'ai mal, si mal que je ne peux même pas pleurer. Mes larmes eux même refusent de croire à ce que mes oreilles viennent d'entendre. Mais je jure sur ce que j'ai de plus chère au monde que je n'aurai de répit que le jour où cette garce regrettera jusqu'à la seconde même où elle a posé ses yeux sur mon mari.



Hello

J'espère que vous avez aimez.

Comment trouvez vous la réaction de Aïcha? A t-elle raison d'en vouloir à Mossane?

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Mouaaah

LES TURPITUDES D'UN MARIAGE POLYGAMEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant