CHAPITRE 10

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AÏCHA NDIAYE

Depuis que je suis revenue à la maison, je passe le plus clair de mon temps dans la chambre.

L'ambiance n'est pas des meilleures ici. J'évite de rencontrer mon père dans la cour de la maison, je fais même mon petit linge dans la salle de bain de ma chambre, celle que je partage maintenant avec ma soeur. Je ne vais plus dans le salon depuis qu'il m'y a chassé comme une mal propre en me disant:

-ta vie dans cette demeure sera impossible si tu ne retournes pas chez toi.

Alors j'attends le soir pour aller me promener sinon je reste dans ma chambre presque toute la journée, comme en ce moment.

Je suis couchée sur mon lit. Je défile entre les applications de mon téléphone mais mon esprit est ailleurs. Il voyage dans les recoins les plus éloignés de ma vie. J'essaie de trouver des réponses à une seule et unique question depuis que je suis ici: qu'est ce qui a poussé Abdourahmane Sall à prendre une seconde épouse?

Je suis perdue dans mes pensées quand je sens quelqu'un s'assoir à coté de moi sur le lit. Je lève la tête et le vois qui me demande comment je vais.

Je ne l'ai pas entendu entrer et je suis surprise à vrai dire car je me demande ce qui peut bien l'amener ici.

-qu'est ce que tu es venu faire ici? Lui demandais-je avec la voix plein de dépit.

-tu pourrais me saluer au moins et me répondre.

-je vais bien comme tu le vois. Merci.

-non tu ne vas pas bien Aïcha. Regarde toi, tu as perdu toutes tes couleurs, tu as maigri et regarde le contour de tes yeux comme ils ont noirci. Louko fi diar Aïcha ( qu'est ce qui en vaut la peine).

-depuis quand te soucies-tu de moi? Ça fait plus de deux semaines que je ne t'entends pas, que je ne te vois pas. On dirait même que je n'existe plus pour toi.

-Aïcha, je ne suis pas venue pour me disputer et si c'est ce que tu comptes faire dis le moi que je m'en aille. Je suis venu vous chercher les enfants et toi. Ta place n'est pas ici, mais à la maison. Reviens s'il te plait.

-tiens donc! Après tout ce que tu as dis, après avoir crié sur tous les toits que tu ne viendras pas me chercher, tu décides de le faire. Qu'est ce qui s'est passé? Ou bien c'est ta maman qui t'a demandé de le faire? c'est ça?

-je suis venu parce que je veux que tu reprennes ta place dans ma vie. C'est vrai maman m'a demandé de venir te chercher mais toi comme moi savons que ce jour là chacun de nous a parlé sous le coup de la colère.

Je laisse échapper un rire, un rire de dégoût je dirai.

-j'aurais dû m'en douter. Le gentil petit toutou exécute les ordres de maman. Tu me surprends de plus en plus Abdourahmane. Donc si tu es là c'est à cause de ta mère? Tu es vraiment pathétique.

-mais c'est quoi ton problème Aïcha? Tu n'es ni la première ni la dernière à qui on trouve une coépouse. Tu en fais tout un plat, tu quittes ta maison, tu amènes les enfants sans te soucier du fait que ça pourrait les déséquilibrer. Et parlant de ça, qu'est ce que c'est que ces idées que tu mets dans la tète de Amadou? Il a cinq ans bon sang, c'est un enfant. Ou bien tu le fais pour qu'il me déteste? A quelle fin Aïcha? En plus que ça soit ma mère qui me le demande ou moi même qui suis venu de mon propre chef, qu'est ce que ça change? L'essentiel est que je sois là.

-ça ne change absolument rien du tout, tu as raison. Mais je ne suis pas mariée à ta mère que je sache pour que tu viennes me chercher à sa demande. Je ne reviendrai pas pour jouer le rôle de la première qui reste pour sauvegarder l'intégrité de la famille. Parce que c'est ce qu'on me demande de faire. Je ne suis pas de celles là. Je ne suis pas de celles qui pensent qu'une fois mariée, avec des enfants on doit rester, souffrir et mourir dans son foyer pour le bien de tout le monde; surtout pour le bien de monsieur. Abdou, vas-tu me regarder avec les mêmes yeux que tu me regardais avant? Si même tu m'as déjà regardé avec amour. Est ce que notre relation sera toujours la même? On sait très bien que l'homme sénégalais ne sait pas se comporter de manière juste avec deux ou quatre femmes. Dés qu'il y en a une nouvelle, la précédente n'existe plus. Bien vrai que tu viendras accomplir ton devoir chez moi mais le cœur n'y sera pas car il sera ailleurs, chez l'autre. Et cette situation là, eh bien c'est trop peu pour moi.

LES TURPITUDES D'UN MARIAGE POLYGAMEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant