Allongée sur l'herbe

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Elle était là, allongée sur l'herbe verte de la colline, les yeux tournés vers les nuages. Ils les fixaient avec une telle intensité qu'on aurait pu dire qu'elle voulait les atteindre. Le vent faisait onduler le tissu de sa robe blanche et rouge au milieu d'une multitude de coquelicots. Le soleil, quant à lui, éclairait partiellement son visage aussi pâle que la Lune, illuminait tendrement son teint d'ivoire.

Elle était aussi belle qu'une statue de marbre dans un musée. La plus ravissante, la plus élégante de toutes. Une œuvre d'art dans toute sa splendeur frappante de simplicité.

Je me suis approché à pas lents, veillant à ne pas troubler cette nature morte. Je me suis avancé sans un bruit, j'ai retenu ma respiration tout en gravissant le flanc de la butte figée dans le temps, bloquée entre une seconde et une minute. Une fois arrivé à sa hauteur, je me suis agenouillé à ses côtés.

Je l'ai longuement observée, je me suis attardé sur le moindre petit détail. Le panier en osier posé à sa droite, le ruban pourpre emmêlé dans ses cheveux, le bout de ses doigts rouges, ses lèvres teintées d'écarlates nuances. Rien ne m'a échappé. Chaque détail, aussi infime qu'il soit, marquait de sa présence cette poésie spectrale.

Je l'ai admiré ainsi jusqu'à ce que les derniers rayons de soleil viennent s'éteindre lentement le long de ses joues et que la nuit vienne à son tour l'enlacer entre ses bras. Les étoiles commençaient à s'éveiller quand je me suis relevé pour redescendre. Il était tard, il était l'heure pour moi de rentrer. 

J'ai déposé un tendre baiser sur son front et je suis parti sans me retourner. 

En redescendant, j'ai revu notre dernière danse. Elle s'accrochait à moi comme on peut s'accrocher à la vie. Ses yeux pensaient à autre chose, elle était déjà ailleurs. Et nous dansions là, enlacés au bord d'un abîme de coquelicots et de vents décharnés. Avant de me quitter, sa main sur ma joue, elle me souffla un dernier souffle d'amour. Et elle s'évanouit dans la nuit sans dire un mot de plus qu'un simple je t'aime.

Elle est restée des heures allongée là sans ciller. 

Les coquelicots poussaient lentement tout autour d'elle, longeant ses bras, ses jambes et sa tête. Ils s'étendaient en un petit océan carmin autour d'elle. Les yeux toujours ouverts, elle continuait de fixer le ciel. On aurait pu penser qu'elle voulait s'échapper, s'enfuir loin d'ici, tout quitter sans rien dire à personne. On aurait pu dire qu'elle voulait s'en aller rejoindre la Cité d'argent.

Si j'avais bien regardé, j'aurais pu apercevoir la larme qui coulait au coin de son œil. 

Si j'avais su l'aimer, j'aurais pu la sauver.

L'écriture ou la vieDonde viven las historias. Descúbrelo ahora