Octo/ tome 2 • L'appel

[Partie 1] Chapitre 11 :

Un matin, Laëticia fut réveillée par des bribes de voix assez proches. Elle se redressa de sa couchette et se pencha à la fenêtre de sa cabane désormais terminée. Le temps était passé, la petite fille était devenue une belle adolescente. Elle avait quinze ans, et sa longue chevelure blonde vénitienne lui arrivait désormais à la taille.

Ses grands yeux bleus se levèrent en direction du Soleil perçant au travers de son petit rideau en tissu blanc et elle constata que la matinée s'était déjà bien profilée.

Elle avait mal dormi, car le jaguar qui lui tenait compagnie n'avait cessé de gémir de la nuit. Il fatiguait et haletait de plus en plus et la jeune femme avait veillé sur lui plusieurs heures durant.

Une fois qu'elle fut complètement réveillée, elle apporta à Eraflu un peu de nourriture pré-mâchée puis prépara son propre petit déjeuner – notamment à l'aide du couteau dérobé au village des Ménas, cinq ans plus tôt. Il s'agissait d'une préparation ressemblant fortement à la bouillie que lui faisait son père quand elle était petite. Le mélange était entre autre composé de framboises, baies juteuses et autres fruits de la forêt.

Après cela, elle prit ses outils de dessins et s'attela à un énième chef-d'œuvre. Dans un coin de la pièce, une pile de carnets remplis à craquer de tout ce qu'elle avait déjà dessiné manquait de tomber, juste à côté du petit meuble en bois dans lequel elle rangeait ses rares vêtements.

Tout en dessinant, l'adolescente tendit l'oreille, à l'écoute de tous les bruits de la forêt, qu'ils soient animaliers ou humains, analysant chaque détail. Il s'agissait d'un réflexe qu'elle avait développé durant ses longues années de vie en solitaire. Elle connaissait les mille-et-unes menaces qui peuplaient les bois. Même la nuit, elle demeurait continuellement à l'affût d'une éventuelle forme de danger.

Ce fut donc la raison qui la poussa à écouter la conversation des individus marchant sous sa cabane. Ils étaient loin de se douter de ce qui se tramait quelques mètres plus haut.

– Wesh les gars ça fait trop du bien de vous retrouver, commença l'un d'entre eux, un jeune homme blond visiblement plus grand que les deux autres.

En se penchant à la fenêtre, Laëticia comprit immédiatement qu'il ne s'agissait pas d'un Ménas. Elle ne l'avait jamais vu lors de ses rares excursions sur l'île. Elle ne put s'empêcher de le trouver extrêmement attirant. C'était sans doute l'âge ainsi que le manque d'interactions sociales qui la faisait penser ainsi. Elle se força donc à se tourner vers le reste du groupe.

« Les gars » étaient en réalité une jeune femme aux cheveux rouges sang ainsi qu'un Ménas de sa génération. Malgré cela, Laëticia ne se souvenait plus vraiment de son prénom mais parvint à le reconnaître grâce à ses yeux. Il s'agissait de deux perles noires étrangement gravées dans sa mémoire, de la même couleur charbon que sa chevelure brune.

Les trois adolescents paraissaient tous un minimum musclés. Pour le Ménas, il semblait évident que le temps à tuer sur Setchâ n'était pas moindre et qu'il pouvait s'entraîner à sa guise.

Les trois amis se serrèrent tour à tour dans les bras des uns et des autres avant de s'installer sur les rochers présents à côté d'eux. Juste sous la cabane de Laëticia, qui ne parvenait à détacher son regard de l'adolescent blond.

– Vous m'avez trop manqué vous avez pas idée, confia le plus petit des deux garçons.

– Et toi donc ! s'écria la fille. Que s'est-il passé durant cinq ans ? Plus même...

– Oh vous savez, reprit le Ménas. Pas grand chose à vrai dire. La vie ici est monotone et affreusement répétitive. Heureusement que nous sommes plusieurs, ça aide.