Un génie sans histoire

Yann

1 Naissance d'un mythe

Quand Yann Kervarec vint au monde dans ce coin de la Bretagne, ce ne fut pas une naissance classique comme tout le monde, son père avait décidé que ce serait à la maison avec une infirmière, si c'était possible, quels sont les risques encourus. Heureusement, la maman était bien bâtie et l'infirmière pas trop loin. Celle-ci accourut juste après l'accouchement et mis aux premiers soins sanitaires préventifs.

Yann est né petit, maigre et, dès le premier regard, son père ne put l'accepter, lui qui était tout l'inverse. Agriculteur, son monde ne dépassait pas le périmètre de ses champs, son travail très tôt le matin jusqu'à tard le soir, du lundi au dimanche.

Ce petit était mal barré et pourtant, mentalement, il se développait bien vite, son père mit bien du temps à s'en apercevoir. Sa mère s'en rendit compte bien plus tôt.

À un an, il parlait encore deux langues: la maternelle (le breton) et celle plus officielle (le français). Comprendre, observer et retenir, tout jeune il savait faire. Suivre sa maman dans la cuisine, regarder les recettes qu'elle faisait puis lui rappeler, soigner les animaux, comprendre le fonctionnement du matériel agricole en voyant son père l'utiliser.

À tout juste 3 ans, ses parents ont décidé de l'envoyer à l'école maternelle. Partir tôt le matin, ne le dérangeait pas. Évidemment, le plus jeune, le plus petit et le moins fort de la classe, c'était lui et ses camarades de classe s'en aperçurent rapidement. Yann comprit tout aussi vite qu'il valait mieux cacher sa véritable personnalité et surtout ses talents sinon gare aux raclées, brimades en tout genre.

Sa mère le voyait bien rentrer avec des bleus sur le corps mais jamais, Yann se plaignait. Il commença alors un long processus de repli sur soi, mais son esprit curieux, toujours en éveil, le poussait malgré tout à découvrir le monde autour de lui.

Les classes suivantes s'enchaînèrent dans le même esprit. Il lisait en quelques nuits les manuels distribués par la maîtresse puis s'asseyait en classe le reste de l'année avec le programme dans les différentes matières en mémoire dans la tête. Le temps était bien long à écouter du déjà appris et faire semblant apprendre.

Mais, pendant les récréations, il découvrit le ballon rond, le pied et dompter cet objet rond, devint de suite une véritable passion voire obsession. Quelquefois, chez lui, il se cachait pour voir discrètement les matchs qui passaient à la télévision. Là aussi, sa mémoire édéitique enregistrait les techniques gestes.

Le car scolaire le prenait le matin et le déposait le soir à 800m de chez lui. En partant et revenant, avec son sac d'école, il emmenait un ballon avec lequel il s'entraînait à jongler, à reproduire ce qu'il avait vu. Il le cachait à l'arrivée de la voiture, de ses camarades de classe. Aux récréations, on fait commencer à jouer gardien de mais puis, par hasard par manque de joueur, sur le terrain et, sans que lui-même le sache vraiment, le soir, il reprenait son ballon pour jongler, contrôler ce foutu ballon rond.

Quand, à 6 ans, il demanda à aller jouer au club de foot communal, son père posa un veto net et formel, il fallait l'aider sur la ferme!

Travailler ne le déranger pas sauf quand celui-ci devenait trop répétitif, mais il aimait encore plus le pied. Il fallut une saison de négociations avec sa mère pour obtenir une autorisation limitée aux entraînements, pendant les 7 ans qui suivirent, Yann manqua parfois quelques matchs officiels le samedi pour cette raison.

Le dribble, çà, il l'apprit au cours des récréations de l'école, crochets, feintes, cependant, ses différents entraîneurs lui montrèrent comment frapper le ballon, les effets frappés intérieurs ou extérieurs et la conséquence sur la trajectoire de la balle. Rapidement, ils s'aperçurent que Yann était totalement ambidextre, pied droit ou pied gauche, il reproduisait très rapidement les gestes, restez à s'adapter au terrain qui était souvent bosselé!