Petite crise de noël
Et c'est reparti pour un tour !
L'année a défilé à une vitesse folle. Tellement que j'ai l'impression que le dernier noël date presque d'hier. À dire vrai, plus je vieillis, plus j'ai le sentiment que la vie est un tourbillon incessant, où tout se répète inlassablement. Noël y compris.
On y pense des mois avant, on le prépare pendant plusieurs semaines... Vraiment, noël est omniprésent. Et je crois que ça y est, je fais une overdose. De noël, de dindes farcies, et de cadeaux. Oui, même de cadeaux !
Trouver des idées pour gâter les autres est un véritable casse-tête !
Tous les ans, ma chère Adèle arrive à trouver le cadeau parfait pour moi, et tous les ans, je suis surpris. Je ne sais pas comment elle fait... Moi je galère toujours pour savoir quoi lui offrir. J'ai même peur de la décevoir !
A force, on peut dire que j'en ai ras le bonnet des traditions de noël. C'est quoi toutes ces règles idiotes qui nous mettent la pression afin que cette journée soit parfaite ?
Il y a un mois, j'ai décidé de prendre le renne par les cornes.
— Adèle, et si on ne fêtait pas noël cette année ?
Elle m'a ri au nez.
— Tu en as d'autres comme celle-là ?
— D'accord, je reconnais que c'est étrange comme idée, mais on n'est pas obligés de mettre les petits plats dans les grands, cette fois. On peut peut-être faire ça juste entre nous, sans fioritures.
— Sans fioritures ?
— Je n'en peux plus de tout ce cirque autour de noël.
J'ai lâché cette bombe sans me rendre compte des dommages collatéraux que cela pouvait causer. Adèle m'a regardé de travers.
— Qu'est-ce qui t'arrive ? Je ne comprends pas...
— Noël ne dure que vingt-quatre heures, pendant lesquelles nous nous gavons comme des oies, serrés comme des sardines autour d'une table, habillés en pingouins, à écouter notre chère belle-sœur caqueter tandis que les enfants piaillent d'impatience. Si ce n'est pas tout un cirque, qu'est-ce que c'est ?
— Ça ressemble plutôt à un zoo, vu comme ça, a-t-elle admis.
Puis elle s'est mise à rire.
J'avais réussi à lui montrer le côté ridicule de la chose, et au lieu de m'en vouloir, elle riait à gorge déployée.
— Tu n'as pas tout à fait tort, mais quand même, tu exagères ! m'a-t-elle dit.
— Mouais...
— Tu es un vrai grincheux parfois, mais je t'aime quand même !
— Alors, tu veux bien que noël soit moins...
— Moins quoi ?
— Moins tout !
— Je ne sais pas. Il faut voir.
— Tu as une idée ? Qu'est-ce que tu proposes ? ai-je demandé avec curiosité.
— Tu verras...
Un mois plus tard, nous sommes le 25 décembre. Comme d'habitude, nous nous réunissons avec ma belle-famille. Sans poser de questions, j'ai suivi les instructions de ma belle, et me voici vêtu de mon plus beau pyjama pour accueillir nos invités.
— Tu ne serais pas en train de me tendre un piège ? questionné-je, méfiant.
Je n'ai pas envie d'être le dindon de la farce en me retrouvant seul en pyjama pendant que tout le monde se moque de moi !
— Tu vois bien que les enfants et moi, nous sommes aussi en pyjama ! rétorque Adèle.
— Peut-être, mais nos ados ne demandent pas mieux que de traîner dans cette tenue toute la journée !
Quand la famille arrive, je constate, éberlué, que tous ont joué le jeu. Liquette, chemise de nuit... Je regrette presque de voir mes beaux-parents dans cet accoutrement !
Nous nous installons confortablement, les adultes à la grande table, les enfants autour de la table basse. Adèle me regarde tendrement, et je lui souris, reconnaissant. Plus de pingouins en costumes, serrés comme des sardines.
— Merci à tous d'avoir compris qu'Etienne souhaitait un noël plus épuré et moins classique cette année. Même le repas sera plus simple.
— Par contre, on est toujours obligés de se farcir la dinde ! plaisanté-je pour m'excuser de mon caprice.
— Tu sais ce qu'elle te dit la dinde ? se vexe la belle-sœur.
D'un coup, le rire d'Adèle emplit mes oreilles. Ce rire... c'est le plus beau des présents. Une fois encore, je reçois le cadeau parfait. C'est ça noël.
