01 / To die clean

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Omar,

Ils ont tout pris, absolument tout. Même mon journal. Ce n'est pas comme si j'en avais encore besoin, je ne suis plus une enfant. Il fait froid dehors. Le ciel pleure souvent, pas moi ! Il fait froid la nuit, il fait froid partout, à chaque instant. Ma chambre me manque. Tu te moquais sans cesse de ses murs verts et pourtant c'est toi qui les avais peint pour moi. Tu me manques. Le cimetière ne veut pas de moi.

Reviens,

Nour.

( Dixième jour après la Catastrophe )

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( Dixième jour après
la Catastrophe )

Le cimetière est vide. Pas même une pauvre âme égarée. Techniquement elles se réfugient là-bas, les pauvres âmes égarées, mais ce soir elles sont bien silencieuses. Elles cherchent à se faire discrètes. Elles ne se lamentent pas, pas cette nuit. La nuit sacrée du mois. La nuit des tombes. Drôle de nom pour un drôle de rituel. Les rituels c'est cependant la seule manière de survivre dans ce monde. Il faut s'accrocher à la foi lorsqu'elle est assez solide pour transpercer une catastrophe. La catastrophe. Celle de Nour, celle de sa famille, de ses voisins, de son peuple. La catastrophe n'a épargné personne.

Le ciel est tombé sur la tête des innocents parce qu'ils ont été jugés coupables par les coupables.

Nour croit en son frère. Peu importe où il se trouve. Omar a la tête dure. Elle sait qu'il reviendra. Il revient toujours. Cela fait déjà plusieurs jours mais elle attendra des mois si nécessaire. Des mois, des années, l'éternité. Sa foi restera en vie aussi longtemps que son frère dans sa mémoire.

Elle n'a pas trouvé de fleurs pour le cimetière, seulement des orties dans les débris au coin d'une ruelle. Ses mains sont rouges à force de les serrer entre ses doigts. Elles ne sont pas très belles, les orties. C'est peut-être dans cette espèce de laideur qu'elles tirent leur beauté. Une laideur liée à la peur, une peur légitime. Elles font mal. Elles démangent. Elles brûlent. Personne n'en veut sur sa tombe. Personne n'en veut. Pourtant elles sont vertes, se dit Nour. Comme le printemps. Comme sa chambre.

Le cimetière est grand. Nour le traverse avec précaution. Elle marche presque sur la pointe des pieds. C'est aussi pour ne pas se couper sur les morceaux de verre éparpillés par terre. Le grand portail noir est tout tordu, il n'a pas résisté aux chars. Il n'a pas cédé non plus puisqu'il se tient toujours là. Il se tient fièrement mais abîmé. Un peu comme Nour. Ses grands yeux noirs se posent sur les tombes avec peine. Ils ont retrouvé de la couleur, ses yeux. Un semblant de vie pour mieux voir la mort. Elle est partout autour d'elle. La mort lui colle à la peau. La mort fait vibrer ses cicatrices comme pour lui rappeler qu'elle arrive.

— Qu'est-ce que tu fais là petite ?

Nour se fige. La voix casse le silence de la nuit. Elle n'a pas le temps de se tourner qu'une paire de bras l'attrape. Son équilibre est bouleversé, elle cherche à se débattre mais tombe à la renverse. Aucun son ne sort de sa bouche. Aucune pensée ne se forme de manière cohérente dans sa tête. Elle a l'impression que tout se mélange pour la plonger dans la panique la plus totale. Cette panique la saisit à la gorge. Elle a du mal à respirer. C'est peut-être son cœur. Il ne fonctionne plus correctement ces derniers temps.

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⏰ Last updated: Jun 01 ⏰

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THE GRAVEYARD (dystopie)Where stories live. Discover now