Les Oeufs Volés

Etrange Fille (1)

Les dragons sont des créatures – car on ne peut les qualifier d'« animaux » - pacifiques. Aucun Homme n'a été assez proche d'eux pour pouvoir le dire ou prouver son contraire... « Il y a les dragonniers » me direz-vous, mais ils sont à moitié dragon, par conséquent, ils sont tenus au secret de leur race. On ne les considère d'ailleurs plus comme des personnes, mais comme des surhommes ou des surfemmes.

Comme je le disais donc, les dragons sont pacifiques. Ils veulent seulement vivre en paix entre eux dans leurs vallées reculées. Le problème est que l'Homme n'est pas une créature pacifique, mais au contraire belliqueuse. Sinon pourquoi y aurait-il autant de guerres si l'Homme était pacifique ? Si vous ne vous étiez jamais posés la question, c'est parce que vous n'avez jamais réfléchi à ce qu'était l'Homme. C'est une chose difficile que de se définir, ne trouvez-vous pas ?

Mais reprenons ce que je disais sur les dragons, car c'est pour cela que vous avez ouvert ce livre. Les dragons sont des créatures majestueuses et puissantes. Elles ne parlent pas, mais...

- MAMAN! Maman ! Il y a le monstre ! Il est ici ! s'écrie une voix de petit garçon près de moi.

Je lève la tête de mon livre et le referme. Il faut que je parte avant que la mère du petit ne me fasse jeter dehors à coups de pieds et d'insultes. Je me lève en gardant le bouquin en mains. Je n'aurai qu'à le finir au château. Je vais à la caisse de la librairie tout en sortant quelques pièces de saphir pour m'acheter le volume. Il y a un autre homme à la caisse, en plus du libraire. Merde...

Fait chier ! Pourquoi elle s'est montrée maintenant ? Elle sait pas que j'ai des clients jusqu'au coucher du premier soleil ?! Elle va me faire fermer boutique un de ces jours, bordel !

Oh, bordel ! C'est le monstre ! OK, OK, fais ce que tu as appris en entraînement. Il faut juste que je me calme et que je...

Je ne perds pas mon temps et lance la corde de saphir que j'ai sur moi à Claton-din. Il y a bien plus qu'assez dessus pour couvrir l'achat du livre. Le libraire m'insulte, alors qu'il reçoit les pierres triangulaires sur le front. Sans perdre une seconde de plus, je pousse l'homme qui se tourne vers moi et exhibe alors les 4 triangles en forme de croix cousu à l'avant de son chapeau. Merde ! J'aurais dû reconnaitre le chapeau caractéristique de cette bande de fanatiques. Je cours vers la porte de l'établissement.

Je faillis faire tomber une petite fille qui passe juste devant la boutique.

Quand il fait mauve, c'est la sortie des fauves. Quand ils sont là, tout le monde se sauve...

Je la contourne et m'engouffre dans une ruelle. Je jette un coup d'œil derrière moi et vois que l'homme me suit à la trace. Heureusement, il y a plusieurs personnes dans la ruelle pour le retenir.

Mais elle sait pas faire attention, cette peste ! Quand on bouscule quelqu'un, on s'excuse. Les jeunes..., pensa un vieil homme derrière moi.

Au secours !! Le monstre m'a bousculée !!! Raah ! Je venais de me changer pour aller voir...

Ce monstre traine encore dans les rues du village ? Je pensais qu'on lui avait interdit l'entrée...

Pourquoi la dinja, elle court ? Et pourquoi ils sont bizarres ses yeux ?

- Maman...

Il y a un petit cri de surprise à ma droite tandis que je perçois des pensées insultantes.

Je cours plus vite. Je jette quelques coups d'œil derrière moi et vois que le Bienveillant s'occupe d'une jeune femme. Je me rends compte que j'ai semé mon poursuivant quand j'atteins les limites du village. Je fais tout de même un détour pour rentrer au château. On ne sait jamais.

Je cours jusqu'à la grille rouillée et tordue du château. Je passe le portail sans ralentir. Je ne referme pas la barrière qui tomberait au moindre coup de vent, mais qui a le mérite d'effrayer les gens avec son allure de portail abandonné. Je cours dans l'allée bordées de grands arbres s'élèvent de chaque côté.

Je regarde le château en ruine que je squatte. La pierre grise est envahie par de la mousse et s'effrite. Le bois des portes pourrit. Il y a un nombre incalculable d'araignées et de toutes autres bestioles. Le fort a des dimensions dragonesques ce qui est ridiculement grand pour une seule personne.

J'entre par une porte de serviteur, ouvrir la grande porte (qui est faite pour qu'un dragon adulte puisse entrer à son aise dans le bâtiment) est trop difficile et ennuyant. Je referme la porte à clé derrière moi et m'appuie contre le battant le souffle court. Une fois que mon cœur s'est calmé, je m'avance dans le couloir froid afin de rejoindre le salon, l'une des deux pièces que j'habite. J'utilise aussi la cuisine, mais je ne la chauffe pas, ça consommerait trop de bûches donc je cuis ma nourriture dans le salon. C'est plus économique. Je n'ai besoin de me chauffer que pendant la saison de Hatt, la partie de l'an où il fait le plus froid.

Je ne fais pas attention aux murmures incessants que toutes les petites bêtes autour de moi font, je m'y suis habituée depuis longtemps.

Crac !

-Din: Suffixe honorifique qu'on ajoute au nom propre pour signifier, monsieur ou madame.

Terme dérivé du suffixe « din » qui veut dire madame, son pendant masculin est « dinjo »