- Ça va aller ?
La pluie crépitait autour des deux hommes. Elle fut si intense qu'à la distance où ils se trouvaient, ils ne pouvaient qu'être deux. Ces rideaux humides s'étendaient infinis et lourds et redoublaient d'intensité sur toute la mégalopole divine. Depuis des mois le déluge vertical enfonçait les habitations dans le sol épuré et plombait chaque être d'une lancinante morosité. Des plaintes qui s'élevaient vers les cieux, vers le Conseil dans sa structure céleste, convainquirent à la dissipation de la tempête. Après ça, les Anciens s'exercèrent à faire disparaître l'orage mais les éclaircies obtenues de leur dur labeur se firent de ce pas dévorer par le monstre cumulus qui marquait la voûte céleste de limites qu'elle n'avait jamais connues. Ces échecs empoignaient les habitants par l'âme et les faisaient bouillir dans toute la rage citoyenne et stéréotypée qu'ils pouvaient signaler.
Outre le personnage qui souffrait de tout ça sous ses yeux, Tudan détestait aussi bien cette situation désespérée.
- Ça va aller... ?
L'interrogation resta encore sans réponse. Il observait, attristé, le spectacle de malheur et se rembrunit aux idées bénévoles qui lui survenaient. L'homme était svelte, recroquevillé contre le mur froid et blanc, aussi blanc que sa peau. Il enfonçait ses pieds nus dans une flaque immense et son visage se cachait, mais semblait mort de ce qu'il en dévoilait.
Tudan retira ses souliers et trempa ses pieds nus dans la même flaque. Il s'accroupit et capta un regard qui lui sembla très vaporeux. Ce qui apparaissait comme un homme détenait des cheveux si longs qu'ils lui couvraient partiellement le corps, et l'on aurait pu dire que sa tête était rejetée inconfortablement, comme bannie du reste de son organisme.
Mais dans l'immobilité du personnage ses mains se mouvaient. Il y avait là une petite poupée de bois aux couleurs éteintes barbouillées par la pluie qui accaparait ses mains et ses jointures pâles. Et elles se mouvaient autour d'elle avec des sentiments puissants qui donnaient leur frénésie.
- Rosa... annonça l'ombre grise dans un murmure rauque. Ma Rosa...
L'ondée redoublait d'intensité et Tudan attrapa l'homme d'un bras, et le traîna plus loin. Après quelques pas, ils disparurent tout deux.
Ces bâtiments étaient encore monnaie courante à cette époque, de sorte que si l'on devait relever la tête depuis un endroit sur la terre ferme, des merveilles de toutes sortes se pâmaient dans le ciel et offraient leurs dessous les plus affriolants. Ce mécanisme existait dans un but purement esthétique. Ces habitations artistiques s'étendaient parfois aussi grandes que des baleines ou aussi petites que des souris. La transformation se produisait par ces splendeurs : sculptures, verreries, mosaïques couvraient les dessous terreux des îles flottantes. Elles n'étaient que des propriétés privées aux dieux les plus aisés, et le monde grouillait à des centaines de mètres plus bas.
« Nous avons une éternité suffisamment grande pour avoir le temps des nous extasier sur des choses qui n'ont pas grand intérêt, et de ne plus nous inquiéter des choses les plus essentielles. On peut se vanter, tout du moins, d'avoir le ciel le plus esthétique qui puisse exister. Je devrais arrêter de me créer des problèmes et faire comme tous les autres... », pensa Tudan.
Ils apparurent sous le porche d'une bâtisse sphérique et joliment décorée. Des cirrus caressaient sa pierre froide et couvraient la végétation environnante d'une pellicule givrée. A cette hauteur, la vieille baraque siégeait au-dessus du grondement de l'orage. L'on pouvait dire que les nuages déchaînés étaient un royaume sombre et dur qui s'étendait à l'infini quelque mètre plus bas.
Tudan s'avança vers l'entrée de la bâtisse, écrasé, sous le poids de son clochard. La porte était une vieillerie composée de deux battants en bois couverts de multiples arabesques qui lui donnaient des allures mystiques, mais au milieu se trouvait un papier jaunâtre abîmé d'un poignard. Il arracha le parchemin brusquement. Le considéra. Malheur.
- Et je me mets à être bienfaisant...
Il se sentit extrêmement affaibli soudainement et releva lentement la phalange vers l'homme. Il concentra son pouvoir et l'air crépita. Le corps lourd se souleva de son dos et lévita de quelque centimètres, il souffla soulagé. Mais poussa un cri de douleur lorsqu'une puissance contraire le fit a nouveau tomber sur son dos puis sur le bitume. Ce fut le clochard qui s'était libéré et qui croisa son regard surpris lorsqu'il se redressait jusqu'à se trouver à quatre pattes. Entre les filets argentés que composait sa chevelure, des demis lunes magnétiques vivaient et ses lèvres fines s'étiraient doucement. Il était pareil à un chien avec un sourire. Et ils'étonna que la personne qu'il sauva soit une de ces gens aux yeux remplis de tout une foule.
Il froissa le papier sous les yeux lunatiques qui le dévoraient et commençait à douter de sa décision d'hospitalité miséricordieuse.
- Rentrons, avant qu'il ne soit trop tard.
Note de l'Auteur : C'est un nouveau compte et une nouvelle histoire, dans le cas présent j'attend des conseils et des avis avec impatience. ^^ Si ça vous a plu vous pouvez voter ou laisser un message : ça fait toujours plaisir. A la moindre question contactez-moi. La suite prochainement...
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Fantastic Planet : Tud et Uki.
ParanormalDans la capitale des dieux, à une époque reculée, Tudan ne connaît pas ses origines. Ce qu'il possède c'est une maison volante piquée à un de ses anciens petits amis, son goût caché pour les habits féminin, et les menaces du tribunal. Et le voila q...