HDM : AIRE COMMUNE

10 1 0
                                    

C'est déjà l'automne.

Contrairement à la nature qui se met sur son 31 avant de mourir lentement,

Nous,

On renaît.

On s'est réinventées.

On s'est découvertes.

On a changé.

Maintenant,

On se trouve extraordinaires, différentes des autres.

Bien dans sa peau.

On arrive finalement à croire que la personne qui nous choisira sera chanceuse.

D'ailleurs, on n'a plus besoin de se convaincre : on est déjà convaincues.

On y croit tellement désormais qu'on se demande, justement, pourquoi personne ne nous a choisies encore.

On est prêtes à laisser une chance au prochain qui fera battre notre cœur.

De préférence pas à celui qui nous l'a brisé auparavant.

De toute façon, nos amies le détestent, lui.

Question de solidarité, tsé.

Alors, on se lance dans le monde vertigineux du dating.

On télécharge une multitude d'applications de rencontre pour les supprimer quelques jours plus tard.

Et les réinstaller à nouveau.

On swipe plus souvent à gauche qu'à droite.

On n'est pas tant intéressées par des profils remplis de photos de chest.

Ou des garçons qui prennent des selfies en faisant des fuck you.

Pis quand on swipe à droite, on espère que l'autre n'ignorera pas notre message bien intentionné qui se veut, principalement, plus drôle qu'autre chose.

On espère aussi ne pas se faire unmatcher randomly après deux jours de conversation.

Quoique, maintenant, l'estime de soi est rendue tellement béton qu'on préfère en rire qu'en pleurer.

« His loss », disons-nous avec la plus grande des convictions.

On est, comme, désensibilisées au ghosting ou tout autre trend de dating populaire qui n'est nul autre que le résultat de personnes qui ne s'assument pas ou qui sont fainéantes.

On n'a plus peur d'affirmer qu'un boy ne nous convient pas plutôt que de tenter de se convaincre que c'est l'homme de notre vie.

Juste pour pas être seule.

Juste pour fitter avec tous les #relationshipgoals qu'on retrouve sur Insta.

On to the next one.

On est ben ben contentes quand nos amies ont eu une date qui s'est bien passée.

One for the team.

Puis, secrètement, on attend patiemment notre tour tout en continuant de s'épanouir dans la vie.

On comprend lentement, mais sûrement, qu'on n'a pas vraiment besoin de qui que ce soit pour être heureuse.

Qu'on accomplit nos objectifs, petit à petit, sans l'aide d'un partenaire.

Mais, qu'on aimerait quand même ça être amoureuse de quelqu'un le temps d'une vie.

Ça ajouterait une petite douceur à notre quotidien déjà rempli.

On multitask travail, amis, dates, parents, yoga, épicerie et Netflix.

On sort au même endroit avec les mêmes amies.

On se permet de rêver entre filles single.

De notre endroit, une petite terrasse en bois – la plus haute de la place – on s'amuse à admirer les garçons bien habillés, bien coiffés, bien cutes. Chacune s'en choisit un, au hasard, en le désignant du doigt et en ricanant d'un rire gêné.

Comme celui qui nous prend quand on sait qu'on a fait un mauvais coup.

Ou pris une mauvaise décision.

Les coudes sur les rampes de la terrasse, en sirotant tranquillement notre Romeo's gin+tonic, les yeux rêveurs, on laisse notre imagination débordante nous emporter au loin dans des scénarios dignes de films romantiques avec celui que notre cœur a élu le temps d'une soirée.

On se sourit à nous-mêmes.

On est confiantes qu'un jour ce sera notre tour.

Que malgré tout ce qu'on a pu vivre,

On y croit encore.

On est comme des eternal believers.

On est prêtes.

On baissera pas les bras.

Pis j'pense que

C'est ce qui fait de nous

De sacrées belles personnes.

Aire communeWhere stories live. Discover now