Partie 1

50 1 0
                                    

Je suis né pour briller. En tout cas, c'est pour cela qu'on m'a élevé. Fils du conseiller impérial, je deviendrais conseiller à mon tour. On m'a choyé, habillé avec goût, appris à bien parler. On a lavé ma peau avec des huiles merveilleuses, brossé mes cheveux avec des savons parfumés. On m'a appris à réfléchir, à souffrir, à me battre. On m'a appris à être charmant, à sourire, à rester gracieux et habile en toute circonstance. On m'a dit de garder la tête droite, d'être fier de ma famille, de porter mes mots avec justesse à tout instant. Enfin, on m'a affirmé que j'étais spécial, que j'étais proche des dieux. Du Dieu. Est-ce que je les ai crus ? Sans doute. Pourtant, il ne faut pas être un renard pour voir que l'amitié portée par l'Empereur peut vite s'effriter. Ne soyez pas trop dur avec moi, car je ne suis pas aussi filou qu'on le dit. J'étais jeune, insouciant. J'ai été orgueilleux, mais juste un peu. J'étais surtout ignorant et trop confiant.

++++

« Maître Renard ! »

Une jolie femme aux longs cheveux noirs s'approcha du jeune homme d'un pas pressé, lui attrapa sa longue manche avec enthousiasme. Elle était suivie par de nombreuses autres personnes, de tout sexe et espèce confondus, qui l'entourèrent en riant.

« Savez-vous ce que l'ont dit ?! »

Elle continuait d'un ton joyeux, les yeux braqués sur le garçon ainsi immobilisé. Il était jeune, bien fait, les cheveux orange, brillants et longs, la peau blanche et duveteuse. Il sourit, fit apparaître deux petites canines blanches entre ses lèvres roses, regardait la femme avec intérêt. Maître Renard avait du succès auprès des gens de la cour impériale, et ne se faisait jamais prier pour répondre aux demandes de chacun.

« Seigneur Singe serait revenu de son voyage, et aurait apporté des présents pour tout le monde ! »

Le renard fit un sourire enjoué.

« Ha, il a pris quelque chose pour moi aussi ?

—Sans doute ! Comment aurait-il pu vous oublier ?

—Après tout, ce n'est pas au vieux singe qu'on apprend à faire la grimace... »

Une voix chaude et mielleuse avait coupé court à la discussion sans écarter le monde autour.

« Sire Chat ? Vous aussi vous avez entendu la nouvelle ?! continua la jeune fille.

—Moui... Pas besoin d'en faire une histoire, soupira le matou.

—Des trésors venus de l'Ouest !

—Peut-être même d'au-delà les océans ! continua une autre, tout aussi réjouie.

—Voulez-vous venir avec nous ?

—Ho oui, Maître Renard, allons-y tous ensemble. »

Le jeune garçon baissa ses oreilles rousses en souriant. Déjà les gens pressés autour de lui commençaient à le tirer doucement, l'invitaient à suivre avec empressement.

« Allons, allons, je viendrais tout à l'heure. Ne soyez pas si impatients. »

Il avait un ton doucereux et poli, son sourire était lumineux et ses gestes retenus. D'un coup, l'une des femmes à côté de lui se fit bousculer, tirée sur le côté.

« Allez, on se pousse et on va voir ailleurs si on y est, la plèbe ! »

Chat, plus grand et plus vieux, n'était pas du genre conciliant. Sec, agressif, il n'hésitait pas à montrer les griffes au besoin auprès des gens qu'il ne considérait pas important.

« Ha ! Ramina ! Ne sois pas si méchant ! » se moqua Renard en riant.

Aussitôt le félin baissa les oreilles, grondant presque, regardant finalement les gens s'écarter. Il s'approcha de Renard, lui murmura d'un air agacé.

Le Chat et le RenardWhere stories live. Discover now