Contemplations.

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Cela faisait plusieurs heures qu'il avait remarqué depuis son balcon cette fille solitaire assise au bord de l'eau. S'il ne lui avait pas réellement prêté attention au début, sa parfaite immobilité avait désormais attisé sa curiosité.

La nuit était tombée depuis longtemps, mais il ne pouvait se résoudre à aller dormir, sa conscience le poussant à aller verifier qu'elle allait bien.

En cette nuit d'hiver, la brise fraîche l'avait incité à se couvrir, et en marchant vers l'inconnue il ressera les pans de son écharpe, frissonnant. Ce n'est qu'en arrivant auprès d'elle, qu'il constata qu'elle n'était vêtue que d'une fine tunique.

« Tu n'as pas froid? »

Elle releva son visage vers lui, son regard clair, reflétant un rayon de lune, rencontrant le sien. Ses lèvres s'étirèrent en un énigmatique sourire, puis elle se retourna vers l'océan.

Intrigué, il l'interrogea:

« Qu'y a-t-il de si intéressant là-bas?

- Regardes tu verras... »

Il se tourna alors vers l'objet de ses contemplations, et chercha la quelconque source de son engouement, en vain. La nuit avait beau être claire, permettant de voir une myriade d'étoile, on ne distinguait que très légèrement l'horizon, et il n'y avait strictement rien naviguant sur l'eau, ce qui ne permettait définitivement pas d'expliquer une telle attention.

«  Je ne vois rien.

- C'est parce qu'il n'y a rien justement... » Ajouta-t-elle dans un sourire.

Sans réellement comprendre le sens de ces paroles, il ne chercha pas à répliquer, de peur de briser la douceur de l'instant. Le silence s'installa peu à peu entre eux, bercé par la mélodie de l'océan. Au bout de quelques minutes, elle reprit, ses yeux toujours rivés vers le lointain.

« Tu cherches absolument un point particulier comme la Lune, la ligne d'horizon ou un éventuel bateau, alors tu manques l'essentiel. » Elle se tut un instant, puit poursuivit. « Ne le vois-tu pas? Immense est l'espace autour de nous, et en fixant des délimitations à chaque objet on oublie trop souvent que nous formons un Tout, éternel. Toi, moi, ce grain de sable, tout comme les milliers d'astres que tu contemples. Tout fait partie d'un grand flux que nous ne pouvons voir en ne considérant que les petites unités le constituant. Assise là j'espère me fondre dans cet ensemble.

- Depuis cet apres-midi? s'enquit-il étonné, tant de la mélodie de sa voix que de celle de ses mots.

- Depuis ce matin il me semble.

- Pourquoi?

- Il faut savoir prendre le temps... murmura-t-elle.

- De quoi? poursuivit-il, plus perplexe.

- ...S'asseoir et prendre la mesure de l'étérnité. »

Contemplations.Where stories live. Discover now