Chapitre 1 : L'Animorphie

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Si on lui avait posé la question, Chriss aurait sûrement répondu qu'il aurait préféré être partout ailleurs, mais pas ici.

Il faisait une chaleur insupportable, et Chriss avait beau avoir renoncé à sa belle armure de plate pour lui substituer une armure plus légère faite de simples mailles, il ne sentait pas moins la transpiration qui semblait s'échapper par le moindre pore de sa peau. Certains officiels, dont Lyow, un des lieutenants de sa propre milice qui se trouvait être son meilleur ami, mais aussi les prêtres du Culte du Temps et leur garde rapprochée l'avaient regardé de travers lorsqu'il s'était présenté sur le parvis du Temple. Pour les circonstances, on se serait apparemment attendu du chef de la milice qu'il observe d'un peu plus près le protocole, peu importe les conditions météorologiques. Mais voilà Chriss ne s'en préoccupait pas beaucoup, malgré un léger sentiment de gêne qui n'était en rien lié à de la culpabilité mais il craignait de devoir se justifier, ce dont il avait horreur. Car peut-être lui demanderait-on des explications une fois la cérémonie terminée mais sa défense était prête : s'il n'avait pas d'autre choix que d'être présent aujourd'hui, il avait au moins pris la liberté de se vêtir comme bon lui semblait. Ça n'en restait pas moins une tenue militaire après tout.

Il jeta un regard mi-amusé, mi-compatissant envers ses troupes et son lieutenant qui eux s'étaient paré des pieds à la tête de leur armure la plus complète. Le plus drôle, pensa Chriss, c'est qu'à aucun moment il ne leur avait ordonné de porter l'intégralité de leur uniforme. Lui et Lyow se faisaient face, chacun ayant trois miliciens dans le dos. Entre eux, la porte du Temple était pour le moment fermée. Si le début de la cérémonie avait été programmée au matin, ils auraient été actuellement à l'ombre de l'imposant édifice. Haut d'une trentaine de mètres, sa construction remontait à des centaines -peut-être des milliers- d'années auparavant, bien avant la fondation de la cité d'Oriaca. L'architecture, bien qu'imposante et impressionnante, n'en était pas moins insolite : douze tours reliaient les hauts murs dans une forme presque sphérique, aussi sphérique qu'il était possible de l'être pour un édifice de cette taille. Sur les murs figuraient de nombreuses gravures ou sculpture en bas-relief évoquant le Temps. Parmi elles, les courses de l'Oriac et de la Coria étaient particulièrement reconnaissables entre toutes.

A voir l'expression tendu sur le visage de son bras droit et meilleur ami, les lèvres pincées et les yeux qui le fixaient sans ciller, Chriss supposait que celui-ci ruminait des pensées qu'il avait bien du mal à garder pour lui et lui brulaient la langue. Sans doute rêvait-il de le frapper, ou de se venger d'une quelconque autre façon pour ne pas s'être encombré comme lui de sa plus lourde armure, et surtout pour ne pas avoir jugé utile de l'avertir que ce n'était pas nécessaire. Mais pour l'heure il ne pouvait rien dire : une foule, nombreuse mais silencieuse s'étaient assemblée sur l'immense place du Temple qui se trouvait quelques marches en dessous du parvis. Pour l'heure, lui et ses soldats représentait la seule curiosité susceptible d'occuper le regard de cette foule qui s'était décidé à observer le silence le plus complet. Il était si profond que le moindre mot aurait été entendu jusqu'à l'autre bout de l'assemblée et seulement quelques personnes qui toussaient, ou quelques protestations d'enfants qui commençaient à s'impatienter rappelaient à Chriss qu'il disposait encore de l'usage de ses oreilles. Il aurait été très inconfortable pour Lyow de le frapper devant autant de témoin, un acte d'une telle insubordination aurait été sévèrement punie, indépendamment de la volonté de Chriss d'ailleurs, même si lui ne s'en serait pas formalisé. Il le connaissait depuis très longtemps, et pour autant qu'il s'en souvienne, il lui avait toujours donné des coups, que ce soit à l'entrainement, ou pour d'autres raison. Mais aujourd'hui cette foule représentait un bouclier bien pratique. Il réprima un sourire à cette pensée, il ne voulait pas que son ami puisse penser qu'il se moquait intérieurement de lui. Mais c'était de plus en plus difficile car plus le temps passait, plus le front de son camarade et de ses hommes luisait de sueur et se mettait à rougir, et plus ceux-ci devenaient tendus et crispés, et plus la scène lui paraissait comique.

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⏰ Last updated: Aug 22, 2019 ⏰

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Les légendes d'Oriaca Volume 11 : Le commandant de la milice.Where stories live. Discover now