L'ultime Instant

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Un dernier cris retentit.

Je me relevai en m'agrippant à ma lance tant j'étais faible.                                                                               La terre, autrefois cultivée par les habitants, était aujourd'hui griffée de crevasses suite aux combats.                                                                                                                                                                        Celles qui formaient mon armée quelques heures plus tôt, n'étaient plus : leurs corps reposaient en un tas difforme au milieu du champ de bataille.                                                                                              Je serrai les poings, outrée par le manque de respect de nos ennemis pour les victimes.

La terre était rouge, imbibée du sang qui avait coulé par litres pendant une longue semaine... Pour sûr, elle était devenue parfaitement stérile

Le peuple du royaume d'Astrion, mon peuple, subissait depuis des mois une famine destructrice.

Nos plantations étaient régulièrement ravagées par les sbires du royaume d'Ambre : la plupart de leurs hommes étaient d'anciens pirates, des personnages rustres et cruels, accompagnés de gros oiseaux ressemblant à des corbeaux, qu'ils lâchaient sur nos cultures. Encore un village que nous allions devoir évacuer...

D'un coup violent, je repoussai le bras d'un soldat mort, dont la poigne gelée agrippait ma cuisse. La bataille avait été tournée à l'horreur par la sauvagerie de nos adversaires qui avaient redoublé d'efforts à la mort de leur commandant. Mes soldates avaient été décapitées une à une, réduisant à chaque coup nos chances de victoire.

Nous avions été battues... Malgré tout, nous avions rempli une partie de la mission : retarder l'arrivée de leur armée dans la capitale.

Je tentai tant bien que mal de sortir du champ, esquivant les barrières, et sautant aisément au-dessus des canons. Lorsque j'arrivai à la lisière de la forêt, je sus que j'avais été trop imprudente. Une balle dont je perçus le sifflement frôla mon oreille avant de brûler ma joue, et vint se loger dans le tronc d'arbre qui me faisait face. Je ne me retournai pas, luttant pour retenir des gémissements de douleur.

Les branches égratignaient mes chevilles déjà couvertes d'hématomes, ne ralentissant pas ma course pour autant. Je courais, tournant à droite ou a gauche au hasard sans trop savoir pourquoi, dans l'espoir de les semer.

J'appelais Aza plusieurs fois, mais la panthère noire qui me servait de fétiche ne répondait pas. Après lui avoir confié un minuscule bout de mon âme, l'animal avait fui, emportant avec lui mon seul espoir de survie. La mort de nos commandantes était censée être impossible, nous ne l'avions même pas envisagée. Notre reine nous avait fait cadeau de ces fétiches, assurant une direction précise, sans faille, et surtout constante à ses armées. Du moins jusqu'à aujourd'hui.

Les fétiches furent créés par des scientifiques qui transformaient des animaux sauvages en bêtes de guerre liées par le sang et l'esprit à leur maître. Une émeraude, symbole de notre pays, fût incrustée grossièrement et sans aucun artifice sur leur front à leur naissance. Cette pierre les protégeait de toute agression pouvant s'avérer fatale.

J'espérais que cette protection faisait toujours effet, et je me surpris à me demander ce qu'étaient devenus les fétiches de mes défuntes soldates...

Je secouai la tête, je devais me concentrer, pour l'instant, seule ma survie comptait. Je me rendis compte que les tirs avaient cessé. Pourtant le bruit sourd de la course des guerriers d'ambre résonnait dans la forêt silencieuse, et me poussait à avancer. Je tapotais nerveusement la pierre d'émeraude fixée à mon poignet : semblable à celle d'Aza, elle me permettait de l'appeler.

L'ultime instantWhere stories live. Discover now