Cadeau inattendu

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Je claquai la porte de l'appartement derrière ma dernière colocataire et perdit mon immense et faux sourire dès que je fus hors de sa vue. Des trois filles qui partageaient le logement avec moi, elle était la dernière à partir pour passer Noël en famille et j'étais soulagée qu'elle parte enfin.

Sans plus attendre, j'allai décrocher les stupides guirlandes qu'elles avaient tenu à suspendre sur toutes les tringles à rideaux et tous les meubles qui pouvaient les accueillir. Je fourrai tout ça dans le grand carton des horreurs, renommé ainsi par mes soins.

Enfin seule.

Je n'étais plus obligée de subir toutes ces niaiseries de chocolats fait maison, d'anges à paillettes et de clochettes à la con. Heureusement qu'elles n'avaient pas insisté pour installer un sapin, je l'aurais passé par le feu en moins de temps qu'il ne faut pour le dire.

On était déjà le 24 décembre donc plus qu'aujourd'hui et demain et je pourrais oublier toute cette mise en scène dégoulinante de mièvrerie et de bons sentiments écœurants.

J'avais eu bien du mal à m'arranger pour ne pas être obligée d'aller réveillonner avec la famille mais c'était chose faite et actée. J'allais pouvoir rester dans ma chambre toute la soirée à lire un polar intéressant, bien installée sur ma couette bleue, jaune et orange, très « summer vibe », par esprit de contradiction.

Il n'était encore que 15 heures mais je décidai de commencer ma séance lecture dès maintenant. Après tout, je n'avais rien d'autre à faire et plus je serais occupée, moins je penserais à cette horrible journée.

Je ne relevai les yeux que quand la luminosité commença à baisser. Il ne devait pas être loin de 17h. Je regardai l'heure sur mon portable. Il était moins cinq. Je m'étirai et eus le malheur de regarder par ma fenêtre. Je réprimai une grimace avant de me lever et fermer le rideau d'un grand geste rageur. Même le temps voulait être de la fête et il neigeait à gros flocons. J'aimais la neige. Mais elle pourrait avoir le bon goût de tomber après ce stupide jour. C'était comme si tous les éléments autour de moi me disaient : « Célèbre ce jour ! C'est le moment pour montrer aux gens combien tu les apprécies et partager la joie des fêtes avec eux ! ».

Joie mon cul, oui. Qu'on soit d'accord, Noël n'est pas un jour spécial du tout. Que je sache, le monde continue de tourner et les gens de crever. Y'avait même plus de suicides ces jours-là vu que certains étaient même encore plus seuls ! Sans compter ceux qu'on jetait comme des merdes ce même jour.

Bah moi, j'avais choisi d'être seule de mon propre chef et pas envie d'être entourée de gens qui feront semblant de tenir à moi pendant une soirée avant de s'en foutre royalement le lendemain.

Je rejoignis la cuisine avec l'intention de me préparer un thé. Attention, pas une de ces conneries aux épices que mes colocs achetaient à cette période de l'année, non, un thé noir sans sucre, bien amer, bien loin des douceurs de Noël. C'est qu'il ne faisait pas chaud, tout de même.

D'un coup, j'entendis frapper à la porte de l'appartement. J'en fus tellement surprise que je faillis en faire tomber la tasse que je venais de prendre dans le placard. Qui pouvait bien frapper à cette heure, le jour du réveillon de Noël ? Ça ne pouvait pas être un voisin parce que j'avais appris par les ragots que tous les habitants de l'immeuble partaient pour les fêtes. Et puis, c'était une petite ville, ici. Il n'y avait pas grand monde qui restait pendant ces jours, ce qui donnait aux lieux un air de quasi ville fantôme. Ça ne pouvait pas non plus être les pompiers avec leur éternel calendrier, le 24, c'était un peu tard pour en distribuer.

Un peu inquiète, je me dirigeai vers la porte d'entrée. Il n'y avait pas d'œilleton ni de chaîne. Ça ne m'avait jamais perturbée jusque-là mais maintenant que j'étais seule, je me rendais compte du manque de sureté de ce logement. Mais j'étais quand même curieuse. Et puis, il ne se passait jamais rien dans le coin alors... Ce n'était pas le genre d'endroit qui attirait les psychopathes. Et aussi, il fallait qu'il ait l'idée de monter jusqu'au quatrième étage pour frapper directement à ma porte.

Cadeau inattenduWhere stories live. Discover now