T.A. n°1 : Peut-on refuser la vie ?

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NDA : Un T.A. est un texte argumentatif ^^. Ce T.A. a été réalisé dans le cadre du concours de Juste-Espoir.

                     "Il y a deux réponses à ta question, comme à toutes les questions : celle du poète et celle du savant", écrit Pierre Bottero dans sa trilogie du Pacte des Marchombres. S'il est  pour certains difficile de voir ce qui les entoure sous un angle autre que scientifique, d'autres au contraire manquent de réalisme et ont tendance à considérer le monde de manière complètement irréaliste ou imagée. Ainsi, tout me porte à croire que, pour répondre de façon complète à une question, il faut s'astreindre à la considérer et comme un savant, et comme un poète.
                     Sans doute les deux points de vue s'accordent-ils pour reconnaître à la vie un caractère mystérieux ; son émergence demeurant à ce jour inexpliquée, elle est ainsi communément présentée par certains comme le fruit d'une série de hasards, par d'autres comme un miracle ou comme un don que chacun devrait recevoir, conscient que "la vie n'a pas de prix".
                    Cependant, parce qu'aucun être vivant ne l'est de par une décision propre, la question se pose de savoir si l'on peut refuser la vie, ce qui pourrait se traduire non seulement par un refus de continuer à vivre mais également par une façon de se résigner à subir sa vie. 


                   Scientifiquement parlant, on qualifie une espèce de vivante si elle se nourrit et se reproduit. Au sens poétique du terme, vivre est une chose bien plus complexe, ne dépendant pas que des fonctions vitales. Pour le savant, la vie est l'ensemble des phénomènes et des fonctions essentielles se manifestant de la naissance à la mort et caractérisant les êtres vivants. Dans la communauté scientifique, les opinions divergeraient quant à la question "peut-on refuser la vie". En effet, certains partiront du postulat que c'est impossible puisque, tant que les fonctions vitales sont actives, on est vivant et que, si l'on en vient à se tuer, on est mort, ce qui n'est pas un refus de la vie : la notion de refus implique un facteur décisionnel qui ne peut exister que si les fonctions cognitives sont actives et que, par conséquent, on est en vie. Ainsi, soit on est vivant et la vie est acceptée, de gré ou de force ; soit on est mort et à cet instant, on ne peut plus rien refuser. La vie, tant qu'elle existe, est acceptée et n'est refusée que quand elle n'existe plus : ce qui est impossible.
                  Néanmoins, il est également possible d'être persuadé du contraire tout en étant logique, rationnel : à partir de l'instant où on refuse la vie, par définition, c'est qu'on accepte la mort. Certes, ce point de vue se base sur une étude langagière des antonymes mais il est indéniable que dans pareille situation, l'étude de la langue est un passage obligatoire. De plus, on peut considérer le suicide comme la preuve manifeste du refus de vivre ; certes, une fois décédé, il n'a plus de refus qui soit mais le fait pour un individu de mourir de sa propre main n'est-il pas le témoignage du "refus de la vie", qui s'est traduit par un passage à l'acte ?

                    Pour le poète, la vie est synonyme d'expérimentation, de décision, bref, vivre ne dépend pas uniquement de nos fonctions biologiques. Ainsi, on peut considérer qu'il est courant de "refuser la vie", et ce en maintes occasions. En effet, refuser de vivre la vie que l'on souhaite pour uniquement survivre peut être considéré comme un refus de la vie. Par exemple, une personne qui fera un travail qu'elle déteste ne cherchera jamais à expérimenter, s'enfermera dans une routine qui ne lui plaît pas, et ce pour se conformer aux normes, on pourrait considérer que c'est "refuser la vie".
                    D'un autre côté, vivre sans profiter de sa vie, c'est également la subir. Ainsi, la résignation étant une forme d'acceptation, on peut considérer que subir sa vie, c'est l'accepter et non la refuser : on accepte le fait que l'on doive vivre mais sans se donner la peine de rendre son existence meilleure. Les deux arguments se tiennent, selon l'utilisation qu'on fait du verbe accepter.


                      Que ce soit le savant ou le poète, aucun ne vous donnera de réponse arrêtée quant à la question "peut-on refuser la vie", tout simplement parce que l'énonciation même de cette interrogation comprend une multitude de variables. En effet, il faut s'attarder sur le sens du mot refuser : implique-t-il une décision immédiate ou également passée, est-il un simple contraire d'accepter et, partant de ce postulat, accepter est-il synonyme de se résigner ? "Se résigner" qui peut ou non être synonyme de refuser, selon la vision qu'on a de la vie. Bref, la question seule permet différentes interprétations qui elles-mêmes comptent plusieurs réponses contradictoires.
                   À mon sens, quand on ne fait plus que survivre, qu'on ne s'accorde pas de bonheur et que cela n'est pas motivé par un motif impérieux ou une obligation externe (ex. si on ne s'autorise plus rien pour suffisamment économiser afin d'assurer l'avenir d'un proche, c'est un motif impérieux et, par ailleurs, faire plaisir procure du bonheur), c'est un refus de la vie.
                    Cependant, choisir de mourir n'est à mon sens pas un refus de la vie : la mort fait partie intégrante de la vie et accepter celle-ci, voire la provoquer, ce n'est qu'un choix parmi tant d'autres. Je n'encourage bien entendu pas à accepter ou provoquer la mort sans se battre, mais cesser de lutter n'est pas un refus pour autant : on pourrait même penser, quoique ce soit un point de vue extrême, que se forcer à vivre et à ne pas mourir alors qu'on en a envie est un refus de la vie. 
                   Ainsi, je pense que refuser de continuer à vivre, biologiquement parlant, n'est pas un "refus de la vie", mais que nier et/ou annihiler sa vie intellectuellement parlant, et ce de manière volontaire, l'est. Rendant hommage à ce grand nom de l'écriture qu'était et qu'est toujours Pierre Bottero, donnons deux réponses à cette question, comme on devrait le faire avec toutes les questions : la réponse du savant et celle du poète.


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