Chapitre 48

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La douleur est presque partie, sans doute parce que la mort commence à se frayer un chemin dans mes chairs martyrisées par le feu de Vulcain.

J'ai hurlé...

J'ai supplié ce monstre pour que cesse l'horrible torture.

J'étais prête à lui lécher les pieds s'il le fallait.

En vain !

Peu à peu je suis devenue muette, tétanisée par la souffrance, dans l'attente d'une fin cruelle et inévitable.

Ma magie est comme paralysée par mon désespoir, ma grande faiblesse. J'ai pourtant essayé d'appeler le chant, mais il ne se passe rien. On dirait que l'univers lui aussi est résigné à mon anéantissement.

J'observe d'un œil vague mon bourreau, chaque mouvement s'avère difficile tant je suis une plaie vivante.

Vivante ? Plus pour très longtemps, hélas.

Ereshkigal m'a condamnée à mort et j'ai compris qu'un exécuteur était spécialement dépêché pour ça. Le bourreau, quant à lui, effectue nerveusement des va-et-vient, se livrant à un monologue.

C'est assez surprenant qu'il s'exprime en anglais...

Les contacts que les êtres obscurs ont avec la Terre ou d'autres planètes sont-ils fréquents ?

Ces créatures sont-elles si anciennes qu'elles ont fini par connaître tous les langages de l'univers ?

Et l'anglais aurait leur préférence.

C'est bizarre ! Ce genre de détail insignifiant me préoccupe quand mes derniers instants s'annoncent à grands pas. J'essaye de me concentrer sur les paroles du démon, une manière de taire la peur qui me dévore lentement et menace de me submerger.

— Quel bordel, marmonne-t-il pour lui-même. Kobal ne va pas tarder à se pointer...

Et quand on parle du loup.

Une forte odeur fleurie investit le cachot lorsqu'un être obscur fait irruption. La vue du fameux Kobal me ramène durement dans la réalité et son horreur.

Il est très différent du bourreau. Grand et mince, des traits presque féminins dont la finesse est accentuée par un savant maquillage. Il y a aussi ce parfum qu'il dégage, un mélange d'effluves enivrants...

— Nous y voilà ! dit-il d'un ton suave, s'approchant de moi en quelques enjambées.

Le chant demeure inaudible.

La terreur qui me secoue de la tête aux pieds, augmentée de mon pitoyable état physique réduisent sans doute à néant ma magie. Instinctivement, je tente de ramper loin de l'exécuteur, mais il me saisit brutalement par les cheveux.

Pendant quelques secondes, il me traîne sans ménagements sur le sol glacé, indifférent à mes hurlements. Ma peau affreusement blessée me brûle et je crois avoir entendu craquer les os de mon dos. La botte de l'exécuteur s'est lourdement posée sur ma carotide et pèse de tout son poids.

Je commence à suffoquer...

— Garde bien les yeux ouverts, ricane-t-il. Ils sont d'un bleu ravissant, deux diamants qui illumineront ta tête desséchée, défigurée, crasseuse. Sa Majesté va adorer...

Je cherche désespérément de l'air et mes bras battent dans le vide puis retombent au sol dans un dernier sursaut défensif.

— Très bien, grogne l'exécuteur. Tes souffrances sont presque terminées...

Dans un voile blanc, la jolie bouille imaginaire de mon Samson se superpose avec le visage fardé de Kobal arborant un grand rictus cruel au fur et à mesure que ma vie s'enfuit.

Samson... je ne sais même pas à quoi ressemble mon fils.

Je ne l'ai pas tenu une seule fois dans mes bras.

Une toute petite fois...

Soudain, la pression se fait plus légère sans raison apparente. Mais j'entrevois du sang qui s'écoule inexplicablement au coin de la bouche du démon. Il laisse échapper un hoquet de stupeur, puis me libère complètement de sa botte tout en se retournant très vite afin de faire face au bourreau.

Celui-ci vient de lui planter un poignard dans le dos !

Kobal pousse un feulement de rage et se jette violemment sur son agresseur, le combat entre les deux démons est impitoyable.

Malgré sa blessure, l'exécuteur semble avoir le dessus.

Je suppose que mon bourreau a attaqué Kobal par jalousie, compte tenu que cette garce d'Ereshkigal l'a évincé de la toute dernière phase de mon massacre.

Ces êtres obscurs sont vraiment des débiles !

Quelle que soit l'issue de la bataille, le vainqueur s'empressera de m'achever. Je fournis des efforts surhumains pour me glisser dans la pénombre, à l'abri des belligérants.

Un grand bruit résonne alors dans le cachot... la porte vient d'être enfoncée.

Je reconnais la démone qui m'a arraché mon enfant.

Une violente nausée me tord l'estomac devant cette répugnante créature.

Deux individus se profilent derrière elle...

D'abord le démon qui m'a balancée comme un sac sur l'une des tables du bloc médical, et puis une seconde silhouette.

Nergal ???

La nausée devient insurmontable. 

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