Morsure

65 3 0
                                    

Nous avons donc tous accepté de l'aider et mis au point un plan.
Théo devra se diriger vers les vestiaires des filles pour escalader la fenêtre et se retrouver dehors sur l'échelle qu'un technicien a déposé là par mégarde, selon lui.
Moi, je dois distraire le coach qui est sûrement dans son bureau, afin de l'empêcher de se concentrer sur lui car il sera obligé de passer devant pour atteindre les vestiaires.
Hayden montera la garde, tandis qu'Allison devra nous couvrir en cas de problème et nous attendre sans trop paraître anxieuse, ce qui sera sans doute la tâche la plus difficile.
Je frappe à la porte du bureau du coach tout en essayant d'inventer un truc convaincant.
Celui-ci m'invite à entrer, une tasse de café à la main et dont l'inscription sur le contenant dit : « The coach is the best ».
– Bonjour coach, je voulais m'assurer que le prochain match de crosse est bien prévu le 18 novembre.
– Bien sûr ! C'est comme d'habitude. Enfin seulement s'il n'y a pas d'autres tempêtes comme celle-ci, ajoute-t-il en bougonnant.
– Super ! Merci. Oh ! Je viens de me rappeler que j'ai laissé mon sac de sport dans le vestiaire, je peux aller le chercher ? Demandais-je en adoptant ma voix la plus innocente possible.
Il parait réfléchir quelques instants, puis accepte.
– C'est d'accord mais dépêche-toi ! Et si tu croises Greenberg tu lui bottes le cul de ma part d'accord ?
Il me donne les clefs et retourne à son travail sans plus de cérémonie.
Toute contente d'avoir réussi je marche le plus vite possible pour rejoindre Théo et lui ouvrir la porte.
– Tu as la clef ?
– Oui.
– Génial ! Passe-là moi !
J'obtempère puis Théo tourne la clef dans la serrure.
– Je te fais la courte échelle ? Lui proposais-je.
– Pas la peine, je monte sur le banc.
Il se hisse jusqu'au rebord de la fenêtre et passe sa jambe par-dessus bord.
– Si je meurs, tu pourras dire à Paige que je l'aimais ?
– Dis pas de bêtises et va chercher ton médaillon.
– A vos ordres cheffe !
Je lève les yeux au ciel. Toujours à plaisanter celui-là. Théo fait basculer son autre jambe et disparait de mon champ de vision.
Au bout de quelques secondes à me tourner les pouces, je commence à m'inquiéter pour lui car dehors, la tempête fait rage et la pluie me fouette le visage à travers la fenêtre ouverte.
N'y tenant plus j'escalade à mon tour le mur et en prenant appui sur mes bras, je peux distinguer le terrain de crosse, les gradins...
Théo ne m'avait-il pas dit que son collier était sur un banc dans ces derniers ?
Ne le voyant pas, je prends peur et cours avertir Hayden qui monte la garde.
– Je... je crois que Théo... a un... problème, articulais-je, essoufflée.
Hayden réagit au quart de tour.
Il se précipite vers la fenêtre et passe de l'autre côté avec une extrême facilité comme s'il avait fait ça toute sa vie.
Je grimpe à mon tour sur le rebord pour lui prêter main forte et mon pantalon se déchire comme par hasard à ce moment là au niveau de mon genoux droit.
Dehors, on n'y voit rien.
Le vent souffle sans relâche avec une force herculéenne et mes cheveux dansent follement.
Un filet faillit m'emporter avec lui et je trébuche soudain sur ce qui me semble être une pierre.
Tout à coup, je sens une poigne me tirer brusquement en arrière.
Un grondement rôque me parvient et une douleur terrible au niveau de mon ventre me fait hurler.
Avec ma main, je touche l'endroit où la douleur m'a surprise et un liquide visqueux entre en contact avec ma paume.
Du sang.
Il y a un trou béant sur le côté gauche de mon abdomen.
À la seconde où je prends conscience de ma blessure, la douleur me saisit et toute l'horreur de la situation me gifle de plein fouet.
Au match de crosse, les pupilles rouges flamboyantes, l'agressivité, le hurlement entendu au loin, la légende de la bête du Gévaudan, le grondement, et maintenant une morsure. Le secret d'Hayden. C'était donc ça !
Et dire que je l'avais deviné sans le savoir.
Et maintenant je suis allongée sur l'herbe humide, en plein milieu d'une tempête sans personne pour me prêter secours, terrifiée et gravement blessée.
La chose, ou plutôt la personne qui m'a mordu, me tire en arrière malgré moi et mes tentatives de m'accrocher à l'herbe boueuse.
J'aperçois Hayden qui se tient à cinq mètres de moi.
Je retiens un cri.
Le "Hayden" que je connais a laissé place à présent à une créature monstrueuse aux griffes et aux crocs acérés et aux prunelles d'un bleu de glace.
Ses oreilles sont devenues pointues et des poils envahissent le côté de ses joues.
Il pousse un hurlement terrifiant qui me tétanise.
– LÂCHE-LA ET ELOIGNE-TOI D'ELLE !!! Gronde-t-il d'une voix puissante et terriblement primaire.
– PAS QUESTION !!! J'ai besoin d'elle dans ma meute !! Répond mon agresseur.
– Alors tu ne me laisse pas le choix !
Hayden exécute un salto parfait et atterrit juste devant moi.
Il se jette sur mon agresseur lui griffe le torse, mais celui-ci l'envoie valser à l'autre bout du terrain.
Je ne vois pas grand chose à cause de la tempête, mais je sais qu'il se retourne et s'approche de moi pour me dire ceci :
– Rejoins-moi à la prochaine pleine lune ou tu le regretteras amèrement, crois-moi !
Puis il disparait la seconde d'après, me laissant là sur le sol alors que le vent mugit dans les branches et que la pluie me trempe jusqu'aux os.
Une douleur fulgurante me paralyse soudain et je m'évanouis la seconde d'après.

L'Alpha MauditWhere stories live. Discover now