Chapitre 20- Rivalité et complexité

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Le silence règne sur le chemin du retour alors que Paul Leveque, le père de Julien et Hélène, conduit la voiture.

Le frère et la sœur sont assis sur les sièges arrière, regardant le paysage défiler, l'air maussade. Julien soupire bruyamment en repensant à ce qui s'est passé une quinzaine de minutes plus tôt. Tout allait bien, pourtant! Lui et ses amis s'amusaient dans l'eau, s'éclaboussaient et rigolaient. Puis ce qui est arrivé a été tellement soudain, d'autant plus que Jeremy a eu l'air en plein forme. Il était juste parti aux toilettes puis, alors qu'il revenait, il s'est effondré. Celeste, qui a tout vu, s'est empressée d'aller chercher son inhalateur. Elle a commencé à culpabiliser car elle est persuadée que tout cela ne serait pas arrivé si elle avait vu que Jeremy n'allait pas bien. Et même si les autres ont tenté de la rassurer qu'elle n'y est pour rien, Julien a le pressentiment que la jeune fille se sent toujours coupable.

A peine rentrés chez eux, Julien et Hélène ont voulu monter dans leur chambre pour rester seuls un moment. Mais juste avant, Julien s'en  va vers son père et le serre dans ses bras. Sa sœur ne tarde pas à le rejoindre, et ils restent enlacés ainsi pendant de longues minutes. Paul leur dit alors:

-Il va s'en sortir, je vous le promets.

Il a prononcé cette phrase avec une telle conviction que Julien se sent obligé de le croire. Du reste, le jeune garçon refuse d'envisager une autre possibilité. Surtout après ce qui est arrivé à leur mère, il y a de cela des années. Un cancer l'a emportée, et elle n'a parlé de sa maladie à personne, et surtout pas à ses enfants de peur de les inquiéter. C'est finalement le jour où elle s'est écroulée au milieu du salon que Julien a compris que quelque chose n'allait pas. Là encore, tout semblait aller bien. Leur mère s'est montrée souriante, rieuse, puis soudainement, leur univers a basculé. Et depuis cette perte, Julien refuse l'idée de perdre un autre membre de sa famille.

Finalement, Paul embrasse ses enfants sur le front avant de les laisser monter dans leur chambre.

***

Julien a passé une bonne demie-heure à parler à Celeste au téléphone. Il a essayé par tous les moyens de la réconforter pour la faire déculpabiliser, mais la jeune fille reste persuadée qu'elle aurait dû faire plus. Mais Julien ne perd pas patience. Il fera en sorte que sa copine se sente mieux, il s'en fait la promesse.

Le jeune garçon est à présent allongé sur son lit, son casque sur les oreilles en train d'écouter de la musique. Il entend alors quelqu'un frapper à la porte de sa chambre.

-Oui?, lance-t-il tandis qu'Hélène entre, et Julien comprend que sa sœur désire rester un peu avec lui.

Elle prend place à côté de lui alors qu'il retire son casque. Pendant quelques minutes, le frère et la sœur ne disent rien, chacun profitant du silence de l'autre. 

-J'ai un peu discuté avec les filles quand on était là-bas, dit Hélène après un moment.

-Piper et Rebbie?

-Oui, elles sont vraiment gentilles.

Julien hoche la tête pour l'encourager à continuer.

-J'ai l'impression qu'elles se ressemblent, dans le sens où elles ont toutes les deux un côté un peu... folledingue.

-C'est vrai, répond Julien en souriant- le premier sourire depuis le malaise de Jeremy.

-Gabrielle est sympa, aussi. Elle m'intrigue beaucoup mais elle est intéressante comme fille.

-Et...Celeste?

Cette sortie à la piscine a permis à Hélène et Celeste de faire connaissance, et Julien espère que sa sœur apprécie sa copine, ou plutôt sa «presque-copine».

Hélène se trouve d'un coup mal à l'aise, comme si quelque chose la dérangeait. Elle a sur son visage une expression que l'on pourrait traduire comme «mouais, bof».

-Bah écoute, comment dire?... enfin, je sais qu'il faut pas juger en fonction des apparences mais je la trouve un peu... superficielle.

Julien ouvre la bouche pour répliquer, mais Hélène est la plus rapide:

-Attends, laisse-moi finir. Je ne la connais pas, mais c'est l'image qu'elle renvoie d'elle-même qui fait que je n'arrive pas à l'apprécier.

-Pourquoi? Parce que tu trouves qu'elle s'habille mieux que toi? Ou que tu penses qu'elle est physiquement plus belle que toi?, répond Julien, décidé à défendre sa petite amie.

-J'ai pas dit ça!, lance la jeune femme, sur la défensive.

-Mais c'est quand même ce que tu penses! Écoute Hélène, je sais que tu es très complexée sur ton physique et que tu as tendance à vouloir comparer ton apparence avec d'autres filles. Je te connais, t'es ma sœur quand même!

-T'as vu de quoi j'ai l'air en même temps? Je suis trop grosse pour la taille que j'ai.

-Non Hélène. Pour moi, tu es tout sauf «grosse»..., dit-il en mimant les guillemets.

-Je suis en surpoids, tu vas pas me dire que ça se voit pas, si?

-... et je suis sûr qu'Alberto pense la même chose que moi.

La jeune femme ne répond rien et se contente de baisser les yeux. Julien reprend:

-Et puis même si t'étais la fille la plus obèse que le monde n'ait jamais connue, il t'aimerait quand même parce qu'il s'en fiche mais alors profondément de ta corpulence. Je sais qu'il t'aime parce que t'es une fille géniale- qui se compare constamment aux autres, certes- mais qui est bourrée de qualités. Maintenant on va s'arrêter là si tu permets, parce que là j'ai clairement l'impression d'être le plus mature de nous deux, ce qui n'est pas du tout le cas.

Elle lui donne un petit coup de coude sur le bras en pouffant de rire.

-T'es vraiment stupide.

Julien doit reconnaître que cela fait longtemps que sa sœur et lui n'ont pas eu un tel moment de complicité. Avec la mort de leur mère, qui a gardé leur famille unie, chacun était plus ou moins resté dans son coin pour pouvoir faire leur deuil, leur père y compris. Et il y a également le fait qu'ils grandissaient, et qu'ils ont eu des centres d'intérêt différents. Et même s'ils entendent bien dans l'ensemble, Julien regrette sincèrement que lui et sa sœur se soient éloignés l'un de l'autre.

-Et t'as pu parler un peu avec Evan, du coup?, reprend-il. C'est la première fois que tu le rencontres.

-Je n'ai pas vraiment parlé avec lui, avoue-t-elle. Mais d'après ce que j'ai vu, il a l'air d'être quelqu'un de calme.

Elle ajuste une mèche de sa chevelure châtain avant d'ajouter:

-Et t'as dû voir comme moi qu'Alberto n'a pas l'air de l'apprécier.

-Ouais, c'est le seul à ne pas l'aimer. Mais c'est dommage, si on veut qu'un groupe d'amis fonctionne bien, il faudrait que tout le monde s'entende bien, non?

-Non, ce n'est pas forcément le cas. Il y a des groupes d'amis dans lesquels des personnes ont du mal à se supporter.

Julien fait la moue, peu convaincu par ce qu'Hélène vient de dire. Pour le jeune garçon, une situation ne peut avoir que deux issues possibles: soit elle finira bien, soit elle finira mal. Il n'existe pas d'entre-deux pour lui, il n'existe pas de «oui mais...». Aussi espère-t-il que les choses s'arrangeront entre Alberto et Evan, comme elles s'arrangeront certainement pour Jeremy qui doit être en ce moment même sur un lit d'hôpital.

Julien prend la main de sa grande sœur dans la sienne, tout en pensant à son cousin. Tiens bon, Jeremy, pense-t-il. Tu t'en es déjà sorti plusieurs fois par le passé. Tu as déjà eu des crises d'asthme quand tu étais petit. Nous comptons sur toi pour revenir en pleine forme.

Ce chapitre était assez spécial puisqu'il ne mentionne presque pas les membres de la famille Roberts et en l'occurrence, on parle de Rebbie mais assez brièvement...

J'espère quand même qu'il vous a plu ^^

A présent, est-ce que notre Jeremy va s'en sortir?

Réponse... très prochainement.

La Famille RobertsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant