Chapitre 1 : Parce qu'il y a un début à tout

260 21 36
                                    

Harry Potter s'ennuyait. Pour la première fois de sa vie, il n'avait pas d'ennemis à combattre, de duels à mener, d'équipes à coordonner, de cours à donner, de paperasse à remplir, et il s'ennuyait, assis à son bureau, en regardant les fenêtres enchantées du ministère de la Magie dévoiler un timide soleil derrière quelques nuages, comme c'était souvent le cas depuis que le responsable de la Maintenance  du ministère de la Magie avait rencontré une sorcière. Harry n'avait pas hâte de voir arriver leur première dispute : il verrait sans doute la pluie s'abattre sur les vitres pendant une semaine.  

Le ministère de la Magie était situé à Londres. Ou plutôt, sous Londres. On y accédait, pour les visiteurs, en entrant dans une cabine téléphonique capable de s'enfoncer dans le sol. Les sorciers qui y travaillaient s'y rendaient par Cheminette, cet étrange moyen de locomotion qui permettait de passer d'une cheminée à une autre, ou par transplanage, dont l'art subtil résidait dans le fait de se téléporter d'un endroit à un autre.

Harry Potter était employé au niveau deux du ministère de la Magie. Il était Commandant en chef des Aurors. Un titre différent de tous les autres qu'il avait accumulés au cours de sa courte existence : celui-là, il l'avait obtenu après plusieurs années de travail acharné. 

Il connaissait dix-sept sorts différents qui engendraient la mort d'un  individu par asphyxie. Il pouvait désarmer un adversaire en utilisant vingt enchaînements de krav-maga différents. Pas qu'il s'en réjouisse. Mais cela lui avait sauvé la vie plusieurs fois, par le passé.

Maintenant qu'il était monté en grade, il ne descendait sur le terrain que pour les missions les plus importantes, les plus dangereuses. Son travail quotidien, maintenant, se résumait à de la bureaucratie :  convaincre le ministre de la Magie, Jeremy Witt, d'augmenter les ressources allouées aux Aurors. Valider les protocoles d'enquêtes proposés par les Aurors chargés de la planification des missions. Présenter les résultats devant le Magenmagot, chargé de  juger les coupables.

Il pouvait toujours descendre au département des Mystères chercher le vieux rapport dont une de ses équipes avait besoin, mais il était atteint d'une certaine paresse ce matin-là, et il profitait de l'accalmie dont faisait preuve le bureau des Aurors.

Qui plus est, cet étrange silence lui paraissait de mauvais augure. C'était un silence inhabituel, désagréable. Il n'entendait ni ses stagiaires se faire réprimander par ses Aurors, ni la bouilloire crachoter, ni les papiers se froisser. Pourtant, très peu étaient actuellement sur le terrain : ce mois-ci avait été plutôt calme, sans meurtre ni enquête trop complexe.

Harry soupira.

C'était une mauvaise journée, en somme. Et il avait l'impression que cela n'allait pas s'arranger. Il était Harry Potter, l'aimant qui attirait les dangers à plusieurs kilomètres à la ronde.

Pour couronner le tout, certaines de ses pensées les plus dérangeantes venaient le tourmenter.

Voldemort, sombre sorcier qui avait tenté de le tuer plusieurs fois tout au long de  sa vie à cause d'une obscure prophétie, avait entraîné le monde magique dans une guerre sanglante et meurtrière en recherchant l'immortalité. Il avait pourtant fini par mourir après une bataille épique à Poudlard, l'école de sorcellerie d'Angleterre. 

Harry s'était réconcilié avec Ginny, la sœur de son meilleur ami, Ron, qu'il avait quitté avant que la situation créee par le retour de Voldemort ne s'envenime pour la protéger. Elle l'avait laissé se dépatouiller misérablement pendant cinq bonnes minutes avant d'avouer qu'elle était ravie à l'idée de se remettre avec lui.

Il avait alors mené sa formation d'Auror avec brio, s'était battu contre quelques préjugés - non, les Aurors n'étaient pas l'équivalent des policiers, ni des agents secrets. Ils se situaient quelque part entre les deux. Ron, son meilleur ami, l'avait accompagné les premières années, mais avait délaissé le métier pour s'occuper de son aîné, George, qui peinait à se remettre de la perte de son jumeau, décédé pendant la bataille de Poudlard. La carrière d'Harry au bureau des Aurors avait été brève mais fulgurante. Lorsque Nico Harding* avait été promu directeur de la Justice Magique, qui coordonnait les différentes institutions chargées de faire respecter les lois, Harry avait été naturellement désigné comme successeur (contre son gré), à seulement trente ans. Cette décision du ministère avait partagé les sorciers. Certains disaient qu'avec lui à la tête des Aurors, le monde ne risquait rien, d'autres arguaient que son manque d'expérience en précipiterait la fin. Une décision avait alors été prise : Austin Hubbard*, le second de Nico, lui avait appris les ficelles du métier pendant quelques mois.

Destiné à être Auror-en-Chef, la nomination d'Harry l'avait outré, comme la plupart de ses collègues. Les deux hommes avaient fini par trouver un compromis après de nombreuses discussions.

C'était un homme juste et sérieux, et son expérience complétait à merveille l'instinct qu'usait Harry pour résoudre une enquête difficile. Ils avaient formé un duo redoutable, et Austin avait gardé sa place d'adjoint, cette fois auprès d'Harry.

Excellent duelliste, son visage, qu'on pouvait deviner charmant autrefois, était maintenant déformé depuis qu'un chaudron avait explosé non loin de lui, formant des cloques qui, combinées aux potions que les médecins lui avaient prescrit à l'hôpital pour le garder en vie, ne s'étaient jamais vraiment effacées, de même que les cicatrices que ce cuisant souvenir lui avaient laissé.

La guerre avait vu naître d'autres étonnantes promotions au sein du ministère de la Magie, notamment pour les sorciers qui s'étaient illustrés sur le champ de bataille : on y avait proposé à Fleur Delacour (une magnifique Vélane mariée à Bill Weasley) un emploi au service des portoloins (elle s'était dépêchée de vider le minuscule local qui lui servait de bureau à Gringotts), Arthur Weasley avait pris la tête du Département des Accidents et Catastrophes magiques ; quant à Susan Bones, nièce de la renommée Amélia Bones, elle avait amorcé une fulgurante carrière à la Coopération magique Internationale, dont elle était maintenant sous-directrice.

Il avait lui-même sous ses ordres certains de ses anciens camarades de classe, tels que Dean Thomas, Seamus Finnigan, ou encore Angelina Johnson, devenue Weasley après son mariage avec George.

Libéré des Sangs-purs extrémistes, le Ministère de la magie avait également offert un poste à Seamus Finnigan ou encore Dean Thomas, et, soudainement rajeuni, et il y flottait dans les couloirs un air de renouveau et un vent de liberté.

En parallèle de son travail, Harry élevait comme il le pouvait ses trois enfants, rendait régulièrement visite aux Weasley, et demandait conseil à Hermione, sa très intelligente meilleure amie, trois jours par semaine.

Il fut tiré de ses souvenirs par l'arrivée d'un patronus en forme de canard. C'était celui d'une de ses meilleures recrues, une jeune femme au tempérament dur qui s'appelait Claire*. Elle avait été transférée de la Brigade Magique (le véritable homonyme de la police) où elle était reconnue pour son calme et son talent en potions, aux Aurors pour son potentiel. Au début calme et serviable, celui qui avait dû la former s'était retrouvé transformé en un magnifique hérisson après lui avoir demandé si elle n'était pas autiste de par son caractère opposé à celui des autres apprentis. Elle s'était alors faite sa place au sein du groupe des Aurors à coups de blagues mordantes et de regards froids, bien que seul Harry connaisse la raison exacte de ce revirement.

Bien qu'elle ne soit pas trop mauvaise en combat, lorsqu'il y avait une intervention, elle restait souvent en seconde ligne, son équipe profitant de son Optimal en botanique et de son Effort Exceptionnel en potions pour rafistoler les blessés à la fin d'une confrontation.

Son patronus était de mauvais augure.

*personnages entièrement inventés

Magie en grèveWhere stories live. Discover now