𝐄𝐂𝐂𝐇𝐘𝐌𝐎𝐒𝐄𝐒 ⸻ [ ᵐᵃⁿʲⁱʳᵒ ˣ ᵒᶜ ]

²⁰ | 𝕚𝕟𝕥𝕖𝕣𝕗𝕖𝕣𝕖𝕟𝕔𝕖 |

Attentivement, il la regarde, attendant qu'elle se décide de se lancer et de lui raconter. Un long silence s'installe entre eux, ils peuvent entendre les klaxons de voitures dehors. C'est un silence lourd, pesant pour les deux jeunes adultes. L'esprit d'Emica est tiraillé, doit-elle se libérer de ce poids qui pèse sur son coeur et son esprit ou doit-elle le garder pour elle ? Après tout, elle ne le connaît pas vraiment.

Mais Chifuyu lui inspire confiance, bien qu'ils ne se soient pas beaucoup vu ni beaucoup parlé, ça a l'air d'être quelqu'un de bien et d'avoir des valeurs. Mais malheureusement, au cours de ses trois ans, Emica a appris à ses dépens qu'il fallait se méfier de tout le monde. Surtout de ceux qui comme lui ont une gueule d'ange, semblent inoffensifs et à qui l'on pourrait donner le bon Dieu sans confession.

Ce sont généralement les pires.

Quelques longs instants, elle réfléchit, soupirant comme pour signifier qu'elle avait prise sa décision. Et puis de toute façon, Ella doit l'appeler dans trois jours, et elle n'a toujours rien trouvé. Elle a besoin d'aide, elle s'en rend bien compte maintenant. Seule, elle n'y arrivera pas.

« — D'accord, mais j'ai besoin que tu me promette de ne rien dire à personne, dit-elle l'air sérieux.

— T'as ma parole.

— Pas même Manjiro.

— Il n'est pas au courant ? »

La jeune femme secoue négativement la tête.

« — C'est promis.

— Y a quatre jours, j'ai reçu un appel d'une de mes amies de la maison close où j'étais durant trois ans, commence la jeune femme. Elle ne m'a rien expliqué, mais j'ai senti à sa voix que des choses terribles se sont passées depuis que je suis partie.

— Par horrible tu veux dire ?

— Je ne sais pas, elle n'a pas eu le temps de m'expliquer, mais Cobra est capable de beaucoup de choses tu sais. »

C'est dur pour elle de parler, c'est la première fois qu'elle conte son vécu dans cette maison, dans ce trafic. Cela lui fait bizarre et noue son estomac d'appréhension.

« — Tu sais, Manjiro m'a aidé à sortir de là parce que je me suis fait battre. Il a découvert les ecchymoses que j'essayais de cacher et m'a dit que ça n'arriverait plus jamais.

— Sérieux ? Demande t-il surpris.

— Il ne te l'avait jamais dit ?

— Non, pas même à Kisaki. On se demandait tous pourquoi est-ce qu'il t'avait aidé et pour être franc on pensait que tu lui faisais du chantage. »

Nerveusement, la jeune femme souffle du nez. Bien qu'elle soit offusquée par cette pensée, elle la comprend néanmoins. Si Manjiro n'a rien dit, pas étonnant qu'ils se fassent des conclusions tout seuls.

« — Pas vraiment non, une fille a fait une tentative de suicide, avec mes amies on s'est occupées d'elle et on a réussi à cacher tout ça. Plus tard on a appris qu'elle se faisait battre par un de ses clients réguliers, alors on a dû trouver un moyen pour qu'elle ne le revoit plus. Ce qui a eu pour conséquence que j'enfreigne quelque règles. »

Attentivement, il l'écoute, sans l'interrompre. Sans poser de quelconques questions. Son visage ne change pas, il ne sourcille pas d'un centimètre.

« — Tu sais, la vie la bas est différente. Personne n'en parle et aucune de nous n'ose s'en plaindre. Parce qu'il a des yeux partout et parce qu'on sait toutes que notre parole ne vaudra jamais rien. Kim n'est pas la seule à vouloir mettre fin à ses jours, en trois ans, il y en a eu plusieurs dizaines, qui ont chacune leur tour eu un trop-plein et qui de manière différente on réussi à se libérer à leur façon.