𝘾̧𝙖 𝙣𝙚 𝙘𝙤𝙢𝙥𝙩𝙚 𝙥𝙖𝙨 𝙫𝙧𝙖𝙞𝙢𝙚𝙣𝙩, 𝙨𝙞?

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𝟸 𝔞𝔬𝔲̂𝔱 𝟸𝟶𝟸𝟷


/!\ Trigger warning /!\


Ça ne compte pas vraiment, si ?

Au début, c'était juste une légère pression contre ma paume. Quand j'étais stressée, ou un peu anxieuse. Cela arrivait rarement, et la trace de mes ongles ne restait jamais bien longtemps. Que quelques minutes tout au plus, et puis, elles disparaissaient.

Ensuite, ces petites marques en forme de lune ont commencé à apparaitre de plus en plus souvent dans ma paume. La plupart du temps, je ne remarquais même pas que je me les infligeais. C'était involontaire, seulement quand quelque chose m'angoissait un peu trop. Et puis, elles se faisaient un peu plus profondes dans ma chair, la marquant un peu plus qu'avant. Mais comme à chaque fois, durant l'heure suivante, elles n'étaient déjà plus là.

Et puis, au fil du temps, c'est devenu une habitude. Quand je sentais la panique ou l'angoisse me submerger, planter mes ongles dans ma peau m'aidait à me calmer.

La petite douleur dans mes mains m'aidait à reprendre le contrôle de mes larmes, de mon corps. Je m'en suis rendue compte un jour en particulier, lors d'une crise de panique. La première d'une longue série. Ce moment est très flou dans ma tête. Comme à chaque fois lors un moment de ce genre. Je ne me souviens pas très bien de ce qui m'a traversé l'esprit. Tout ce que je sais, c'est que la douleur psychologique à ce moment-là était insoutenable. Vraiment insoutenable. Et puis, mes ongles se sont appuyés d'eux même contre ma peau, et je me suis concentrée sur ça pour sortir de ce brouillard. J'ai trouvé refuge dans ce petit picotement. Ça m'a apaisé, apaisé comme je ne l'ai jamais été depuis un bon moment. J'ai trouvé cela agréable. Horriblement agréable. Ça m'a plu, vraiment plu.

Alors j'ai recommencé.  Plus souvent, au moins une fois par jour. Plus fort, afin de garder plus longtemps ce qui me permettait de rester consciente, maitre de moi. Les marques se sont répandues sur mes doigts, puis sur le dessus de mes mains. Parfois, j'en retrouvais même contre mes poignets. Et puis, elles étaient plus profondes, surtout. Je ne saignais pas, mais le lendemain, elles étaient toujours visibles. Par centaine sur ma chair rougie.

C'est étrange, mais j'en était venu à un point ou j'avais vraiment cette envie. Envie de me faire, en quelques sortes, du mal. Enfin, pour moi, ça ne me comptait pas vraiment puisque je ne saignais pas. C'était juste des petites marques faites avec mes ongles sur ma peau. Rien de grave à mes yeux. Rien de bien méchant. Elles traduisaient juste une envie passagère. Celle de me punir de ressentir de la tristesse, de punir mon envie de pleurer, ou encore de me punir de ne pas avoir réussi.  J'étais profondément déçue de moi, et ces picotements m'aidaient à accepter plus facilement mes échecs. Ça arrive à tout le monde d'être fâché contre sois, alors en quoi étais-je différente ? en quoi devrais-je m'alarmer, dans ces cas-là ?

Je ne sais pas exactement à quel moment j'ai réalisé que cette histoire partait peut-être un peu loin, mais quand ce fut le cas, c'était un peu trop tard. La lame avait déjà fait son chemin dans ma chair. Plusieurs fois. Et je n'avais pas envie d'arrêter, ni maintenant, ni jamais.

Mais je ne veux pas mourir. Juste ne plus ressentir ce brouillard qui envahit mon esprit. Alors, ça ne compte pas vraiment, si ?

A l'encre de mes larmesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant