Chapitre 6

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Mal.

Aux pattes, au poitrail, à la tête.
Il avait terriblement mal.
Comme si des griffes lui déchiraient le pelage à chaque instant, la douleur se jouait de lui, lui faisant espérer que ses souffrances soient abrégées. La douleur, c'était lui. Elle faisait partie intégrante de son corps.
Le temps n'était plus le même, il était mesuré par l'intensité de cette douleur, elle était la seule chose existante.

Et puis soudain, son supplice changea du tout au tout. La douleur n'était plus physique, plus matérielle mais bien à l'intérieur de lui-même. Son âme se déchirait, elle se froissait pour, petit a petit, se séparer en deux morceaux distincts. L'un resterait ici, l'autre s'envolerait vers un avenir meilleur. Il était le deuxième bout.

Cette deuxième partie.
La plus grosse, la plus imposante. Ce n'était pas son âme qui s'était déchirée, mais bien lui-même qui avait rompu le lien qu'il exerçait avec son corps.

La sensation d'apesanteur disparut soudain, il flottait dans un gaz épais et léger. Il n'y avait ni haut, ni bas. Il était à l'intérieur de son esprit. Et celui-ci lui faisait terriblement mal.

C'est alors, que contre toute attente, la douleur se dissipa. Il ne sentait plus rien. Il ne se sentait même plus lui-même, comme s'il avait disparu. Il ne se sentait plus, et pourtant, il sentit bien la pierre froide et dure sur laquelle il était allongé. Il sentit très bien la patte qui le secouait.

Et soudain, il décida de s'éveiller.

Ses yeux bleus s'ouvrir.

Le monde s'offrît à lui.

Un monde constitué de pierre grise et austère. Et d'un chat roux clair aux taches plus foncée.

Un chat transparent qui n'avait que les yeux de luisants.

— Bienvenue à toi, nouveau camarade.

><~•••~><

Un, deux, trois, dix, vingt, cinquante, cent...
Il n'arrivait à compter tous les chats qui le fixaient. Tous le regardaient avec curiosité, voir admiration.
Perché sur un rocher surplombant la mer de félins qui le scrutaient, il ne savait comment réagir. Le chat roux qui l'avait poussé à s'éveiller était le seul qui se tenait à son côté, le visage fier et heureux.
Comme tous les chats qu'il avait vu pour l'instant, il avait le pelage terne et pâle, presque transparent et invisible, sombre malgré la couleur vive qu'il semblait avoir eu par le passé. Ses yeux brillaient d'un éclat blanc, et ses pupilles noires étaient dilatées au maximum pour capter le peu de lumière présente dans le lieu.

— Ça faisait longtemps qu'un nouveau camarade n'était pas venu s'ajouter à nos rangs, miaula le chat roux.

— C'était toi le dernier, cervelle de souris !, miaula une voix enjouée parmi la foule.

Le félin aux taches brunes sourit et le regarda comme si lui aussi aurait du sourire. Mais lui, il ne sourit pas. Il ne savait plus comment le faire.

— Ne t'inquiète pas, miaula l'autre, c'est normal d'être un peu pâteux au début. Tu te rappelles au moins de comment est-ce que tu t'appelles, non ?

Il répondit machinalement.

— Je suis Azu... Pétale. Coeur de Pétale.

Les Racines du Saule ~3. Le Calme~Where stories live. Discover now