UN MONDE A PART (Tome 1 complet)

Chapitre 11: Mélina

Installée dans le fauteuil, je n'en reviens toujours pas. Ce qu'il vient de se passer sort tout droit d'un film d'action - je n'en citerais pas, je ne retiens pas les titres - ou alors je suis en train de rêver. Je me suis déjà posé cette question un peu plus tôt et je ne réitérerais donc pas le pincement au bras, un bleu suffit amplement. Un ours dans une salle à manger, qui a déjà vu ça ? Et je mettrais ma main à couper que ce n'est pas un seul ours, mais bien deux que j'ai aperçu ce soir, la teinte des poils du deuxième étant plus clair que le premier. Le plus hallucinant dans tout ça, c'est que Karl n'a absolument pas eut l'air apeuré, comme si c'est courant pour lui de voir ce genre de situation. Je prends plusieurs gorgées de ma bière et la finis bien trop vite. Je me demande toujours ce qui m'a pris de venir m'enterrer dans ce trou perdu où tout part en bérézina. Une journée seulement que je suis arrivée et je me retrouve avec une coupure à la main à moitié infecté, l'entrevue d'un homme ensanglanté de la tête aux pieds et nu, une rencontre avec deux ours. Et je ne parle même pas de cette personne qu'ils viennent d'appréhender sans que je ne sache pourquoi. C'est à la limite du terrifiant.

Je suis toujours en pleine réflexion quand Karl vient me rejoindre après avoir balayé le verre brisé de la baie vitrée. J'ai maintenant un peu peur de ce qu'il va m'annoncer. Je tentais toujours de comprendre comment Luc pouvait guérir aussi vite avant d'être interrompue par un ours. Dit comme ça, on pourrait m'enfermer dans un hôpital psychiatrique tellement tout ça a l'air absurde. Je n'ai d'ailleurs toujours aucune idée sur la rapidité de guérison du neveu de Karl. Comment pourrais-je en avoir une. Je ne suis ni médecin, ni chercheur. Et je suis certaine qu'aucun praticien spécialisé n'en aurait la moindre foutue idée. Impatiente de connaître la réponse et voyant que Karl ne prend pas la parole, je me lance.

-Nous en étions à Luc avant d'être dérangé par...un ours. Vas-tu enfin m'expliquer les raisons de cette guérison, mais aussi l'homme que tes frères ont appréhendé, les ours...enfin toutes ces choses qui n'ont ni queue ni tête. Ça me rend complétement dingue, Karl, j'ai besoin de comprendre. Alors, s'il te plaît, fais-le.

Je l'observe en attendant sa réponse et je le vois soupirer, pensant d'abord qu'il revienne sur sa décision de me dire la vérité. Ce n'est pas le cas, il termine sa bière comme pour se donner du courage, ce qui a pour effet de faire augmenter mon taux d'anxiété au maximum. Que va-t-il m'annoncer ??

-Ok, je te demande juste de m'écouter sans m'interrompre, commence-t-il. Tout ce que tu as pu voir aujourd'hui, Luc, sa guérison, l'homme et mes frères...

J'allais l'arrêter pour rajouter les ours, mais devant son regard appuyé me disant clairement de me taire, je ne dis rien et il poursuit.

-Tout ce que tu as vu sont en rapport les uns aux autres. Luc s'est bel est bien fait attaquer par un aigle et si, comme tu as pu le constater, il guérit aussi rapidement, c'est parce qu'il dispose de capacités particulières. Je devrais plutôt dire nous, mes frères, Luc, Adrianne en fait partie également et moi, toute ma famille. Quand je t'ai dit que l'ours était mon frère, je ne rigolais pas et je n'étais pas non plus sous l'emprise de l'alcool.

Il s'interrompt un instant, certainement pour me laisser le temps d'assimiler ce qu'il est en train de m'expliquer. Sans me laisser dire le moindre mot, il reprend derechef.

-Nous sommes en effet tous nés avec cette particularité qui nous est normalement interdite de dévoiler aux humains pour X raisons. J'aurais tout le temps de te les énumérer plus tard. Si tu as aperçu plusieurs ours ce soir, c'est que nous possédons la faculté de nous transformer ainsi, pouvant passer de notre forme humaine a notre forme ursine autant de fois que nous le souhaitons. Nous avons aussi la chance d'avoir un métabolisme qui nous permet
de guérir bien plus vite qu'une personne lambda, tel que toi par exemple. La coupure que tu as à la main, chez moi, aurait pris à tout cassé une heure pour se refermer, m'affirme-t-il en indiquant ma main. Pour ce qui est de Luc, s'il était nu quand il est arrivé, c'est parce qu'il était sous sa forme ursine lors de l'attaque.