*~Prologue|ruines squelettiques~*

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PROLOGUE

Il scrute les ruines désertes depuis l'entrée de la gare désaffectée. Ses cheveux de vieillard ébouriffés, illuminés par le jour.
Sa barbe grisonnante, rêche comme le foin, effleure ses clavicules.

Le soleil, bas dans le ciel, est toujours aussi brûlant. A croire que le sort s'acharne sur les habitants de la terre.

Maisons éventrées, vitres explosées, et l'odeur des cadavres, âcre, omniprésente. Il ne s'y habituera jamais.

A la seule pensée de tout ces corps en putréfaction, son cœur se soulève. Il refrène l'envie d'expulser la bile montant dans sa gorge.

Certes, il en a vu, des cadavres. Sûrement des centaines. Et il doit avouer qu'en apercevoir ne lui fait plus autant d'effet que les premières fois. Mais jamais il ne peux oublier leur visages de souffrance, leur dépouilles qui n'ont presque plus forme humaine.

Ne pas les voir est pire. Car il les imagine.

Ces carcasses redevenant terre.

Malgré ce que ses confrères devaient penser de lui, il est humain. Et même si ce qu'il fait ajoute parfois de la hauteur aux tas de cadavres, il sait que c'est la seule solution.

Ce doit être la bonne solution.

"Papy, c'est mal. Nous devrions arrêter et laisser le destin choisir de notre sort... C'est sûrement ce que le bon Dieu veut pour nous."

C'est ce qu'avait un jour dit ce gringalet de Louis, alors âgé de seulement dix huit ans.

Matthew s'était alors retenu de s'egosiller d'un rire plein d'amertume.
La manie qu'ils avaient tous à juxtaposer les mots bon et Dieu avait disparue presque abruptement après les incidents, puis complètement avec le temps.

La situation lui faisait penser que, cette quelconque entité supérieure ne prenait plus le temps de veiller sur l'enfant auquel il a donné naissance en voyant qu'il avait si mal tourné.
Ils savaient tous qu'ils avaient été abandonnés.
Le père laisse les enfants pour aller chercher cette fameuse baguette, et ne reviens pas. L'unique consolation qu'il pouvait leur rester, était de se dire qu'il fut un temps où ils n'étaient pas seuls.

Ce gamin n'était absolument pas prêt au monde dans lequel il avait déjà mis un pied, puisque l'autre se trouvait encore dans la part idyllique de sa vie, peuplée de lycée, de chocolat, de technologies et de filles dénudées

Il lui avait répondu que Dieu ne leur aurait sûrement pas donné l'intelligence de créer de telles prouesses scientifiques s'il avait l'intention de tout faire à leur place.
Il n'avait pas perdu une occasion sermonner son petit-fil pour ne pas l'avoir simplement appelé Matthew. C'était son nom après tout ?

Avant, on pouvait l'appeler Papy.
Ce qu'il était à présent n'avait plus de lien avec sa place dans le cocon familial, ou son statut dans le coeur d'un jeune homme. Il était un sauveur de l'humanité, rien d'autre.

À sa manière, s'était sa religion.

Le garçon avait simplement acquiescé.

Le jeune homme était mort quelques semaines après. Cela n'était pas surprenant. Tout le monde mourrait.

Les choses se passent ainsi. Plus de petit-fils, mais encore quatre disciples à ses côtés. Ed, Lewis, Gordy, Adam, et l'asocial de fils que se coltine Matthew.

C'est tout ce qui compte à présent.

Le vieil homme se retourne alors pour retourner à sa tâche, et s'engouffre dans les courants d'air chaud qui traversent la gare.

MasksWhere stories live. Discover now