Chapitre 3

21 1 3
                                    

Hestia

Étant donné qu'Amberly n'avait pas voulu de moi comme danseuse dans son équipe de cheerleaders, je m'étais inscrite au studio de danse Soreal de Houston. Ce qui était chouette c'est que j'avais à chaque fois des cours de danses différents et j'apprenais vraiment beaucoup. Aujourd'hui il y avait une représentation devant le public afin de financer une autre école de danse accessible au plus nécessiteux et c'était moi la danseuse principale.

Je m'élançai vers mon partenaire. Il m'attrapa par les hanches et je volai alors dans les airs tel un papillon. Libre. Après avoir été déposée sur le plancher de la scène, j'enchainai une série de mouvements fluides et compliqués : un ball change, un butterfly, un cambré, ...

Aucune pensée ne venait obstruer mon esprit. Je dansais simplement bercée par la douce mélopée, c'est elle qui me portait. Les danseurs m'entourant étaient devenus de pâles ombres, le public, lui, semblait invisible. Je n'étais plus Hestia mais Hermia, l'un des personnages d'une œuvre de Shakespeare : " Le songe d'une nuit d'été ". Tout en m'approchant timidement de mon cavalier qui incarnait Lysandre, le bien-aimé d'Hermia, j'élevai ma main droite afin de lui caresser le visage. Puis, je me retournai et exécutai divers sauts : de biche et de chat. Ensuite, je revins sensuellement vers mon partenaire et nous commençâmes à valser tels les deux amants transis d'amour que nous incarnions.

La représentation se termina avec la traditionnelle révérence des danseurs aux spectateurs qui applaudissaient avec plein de liesse. Il est vrai qu'il était étrange pour la fille d'Hadès de pratiquer une activité aussi humaine. Néanmoins, la danse était un art qui permettait de canaliser mes pouvoirs, de m'exprimer mais surtout de raconter une histoire. J'adorais faire cela. Quand je dansais, je pouvais être moi-même. Je n'étais plus la lycéenne de dix-sept ans qui essayait de se fondre parmi les humains malgré ses différences. Car oui, j'étais différente. Être la fille du seigneur des morts et d'une pléiade n'était pas courant. D'ailleurs, Hadès n'était pas censé avoir d'enfant. Zeus le lui avait formellement interdit, pour une raison qui m'était encore étrangère. Mais il m'avait moi, et j'étais son secret...

***

Je venais de sortir de ma loge, lorsque je percutai un homme qui se tenait devant la porte : mon père.

— Papa tu es revenu ! Je suis tellement contente que tu sois là ! m'écriai-je en me jetant dans ses bras.

Il me sourit avec affection et me serra fort contre son torse puissant. Hum, il sentait vraiment bon, une odeur de fumée et de cuir.

— Pour rien au monde je n'aurais raté la représentation de ma talentueuse petite princesse !

Il me souleva du sol pour que je sois à sa hauteur afin d'embrasser tendrement mon front et mon nez. Oui, j'avoue que c'était bizarre mais selon lui j'avais le plus beau nez du monde.

— Tu m'as tellement manqué.

Maintenant qu'il était là, impossible de le lâcher. J'étais heureuse d'être enfin dans ses bras après tout ce temps passé sans lui. Lorsque Perséphone était aux enfers, je ne le voyais quasi jamais et cela me faisait beaucoup de peine, je n'avais que mon père, ma mère étant morte en me donnant naissance.

— Toi aussi ma chérie, toi aussi tu m'as manqué !

Cela me pesait un peu sur le cœur de ne pas avoir mes parents à mes côtés tous les jours, mais c'était comme ça et je ne pouvais pas changer cela.

Justement en parlant du loup, on en voie la queue. Mais non, il ne s'agissait pas d'Artémis, mais de mon adorable petit chenapan.

— Hestia, Hestiaaaaaaaaaaaaaaaa, cria un Zéphyr à bout de souffle, tu étais trop trop belle sur la scène.

Ses magnifiques yeux bleus exprimaient toute l'admiration qu'il me portait, ça me touchait énormément.

— Merci mon ange, tu es trop chou, et je lui plantais un bisou sur la joue.

Il se serra fort contre moi. Nous étions très fusionnels. C'est moi qui la plupart du temps m'occupait de lui. Plus que sa mère d'ailleurs, elle aimait batifoler ici là. N'oublions pas que c'était une nymphe. Zéphyr releva les yeux vers moi et s'exclama :

— Surtout quand ton partenaire t'a soulevé dans les airs on aurait dit que tu volais comme les oiseaux.

Il commença à sautiller partout pour essayer d'imiter un oiseau. Un mot : adorable. Je dois dire que je m'étais énormément entraînée pour exécuter cette figure à la perfection. Le prix de mes efforts avait payé puisque j'avais réussi à l'impressionner. Décerto arriva à ce moment-là.

— Zéphyr tu ne m'écoutes jamais, je t'avais dit de m'attendre ! cria-t-elle fâchée.

— Désolé maman, mais j'avais vu Hestia et j'ai cru...

— Tututut pas d'excuses petit chenapan, la prochaine fois tu seras puni. Je me suis imaginée que tu t'étais fait enlever par un centaure mangeur d'enfants. Ne me fait plus une telle frayeur, mon cœur ne le supporterait pas, dit-elle d'un ton mélodramatique. Je ne pus m'empêcher de sourire face à la scène à laquelle j'assistais. Décerto exagérait parfois. En fait non, souvent.

—Quant à toi, me menaça-t-elle de son index. Tu étais absolument éblouissante, on aurait vraiment dit que tu étais éprise de cet humain, je ne sais plus son nom. Bref, c'était magnifique ma chérie.

Elle me serra fort dans ses bras. Vous avez compris, qu'elle méprisait quelque peu les humains. Selon elle, ils étaient stupides, mais ça ne l'empêchait pas d'avoir des relations avec de beaux spécimens...

— Merci Décerto, ça me touche vraiment ce que tu me dis, d'autant plus que tu ne voulais pas trop que je pratique un sport aussi humain que la danse...

— Oui je sais mais il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, me répondit-elle l'air mutin. Au fait, tu reviens avec nous ou tu comptes fêter ça avec tes amis ? Elle ne put s'empêcher de grimacer.

— Non je ne reviens pas avec vous et non je ne vais pas fêter ça, mais plutôt profiter du peu de temps qu'il me reste avec mon père.

Ce dernier qui était resté en retrait, s'avança :

— Décerto, c'est toujours un plaisir de te voir ! dit-il gravement en s'inclinant.

— Mon seigneur, je suis navrée, je ne vous avais pas vu. Elle attrapa la main de Zéphyr, l'air anxieuse.

Nous n'allons pas vous embêter plus que cela, ravie de vous avoir revu. Hestia ma chérie, on se voit tout à l'heure à la maison.

Elle m'embrassa et s'en alla en tirant Zéphyr par la main. On aurait dit qu'elle avait vu un fantôme ; je dois dire que mon père était assez intimidant.

— Papa franchement, tu aurais pu être plus gentil, je sais pas moi, tu lui as fait peur.

— Ma petite déesse, j'ai beau faire des efforts, ils sont à chaque fois intimidés par le dieu des morts. Il sourit et me fit un clin d'œil complice. Viens, partons avant qu'une horde d'humains ne t'accapare pour te quémander une signature. Il soupira dépité. Vraiment je ne comprends pas cette lubie.

Je ne pus me contenir plus longtemps et éclatais de rire. C'était difficile pour lui, qui vivait la quasi-totalité de l'année sous terre, à s'adapter à l'évolution du monde humain. Avec l'avancement technologique qui ne faisait que croître d'année en année, il se sentait perdu à chaque fois qu'il me rendait visite. Cela m'amusait beaucoup de lui expliquer tous ces nouveaux termes, il avait de telles réactions.

— Papa, on dit un autographe, lui fis-je remarquer tout en lui posant un baiser sur la joue.

— C'est la même chose, tu griffonnes ton nom donc il s'agit d'une signature.

— Oui, papa lui dis-je en rigolant. Viens partons, je veux profiter de ta présence avant que tu ne t'en ailles. Tu vas rester hein ? demandais-je craintivement.

— Oui je reste, mon éblouissante petite danseuse.

Sur ces derniers mots pleins de tendresse, il me prit par la main, et nous nous dirigeâmes vers la sortie.


Pas oublier la nbp 

L'héritière du TartareWhere stories live. Discover now