Près du but (Prologue)

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L'un est vieux et marche à pas lents. L'autre le soutient et doit approcher la barre de la quarataine. Deux hommes. C'est la nuit et les lampadaires laissent échapper un filet de lumière faible, ils n'éclairent qu'un petit périmètre de cercle autour d'eux. Cela doit bien faire une heure qu'ils marchent à travers la ville, battant le pavé le plus rapidement possible, s'essoufflant à accélérer le pas. Le vieil homme peine à respirer, et son souffle rauque est coupé par moments lorsqu'il avale sa salive. Aucun son ne sort du corps de l'autre. Un gémissement de temps en temps, sous la difficulté de l'effort pour porter le vieillard, peut-être, mais on comprend vite que la tension et la concentration l'empêchent d'articuler un mot. Le court cortège traverse donc la ville, fuyant on-ne-sait quelle ombre, se cachent d'on-ne-sait quelle force mystérieuse. Soudain, un arrêt. Une plainte de douleur. Un hurlement sortant de la gorge du plus jeune. Des expirations de plus en plus bruyantes. Mais au bout de la ruelle, un mur clos, gigantesque et imposant. La masse des deux hommes s'en rapproche en boitant, faisant un dernier effort, donnant une dernière expiration. Puis, ils s'arrêtent au pied des briques empilées et reprennent leur souffle. Quelques mots incompréhensibles, baragouinés dans une langue venant de plus loin que les limites de la ville. 

L'ombre menaçante que craignaient les fuyards arriva trop tard pour les encercler, mais assez tôt pour les voir disparaître dans une brume blanche, trop épaisse pour laisser apparaître leurs visages une dernière fois. 

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