Chapitre 1

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Le son aigu du marteau contre les cloches de mon vieux réveil matin me tira à nouveau de mes rêves. J'entrouvris un œil et fis taire mon réveil. Aveugler par les rayons du soleil passant à travers les stores de la fenêtre de ma chambre, je plongeai mon visage dans mon oreiller. Je restais un moment dans mon lit, mes draps beiges enrouler autour de moi, avant de me lever brusquement. Assise sur mon lit, j'ouvris mes yeux, qui étaient restés fermés jusque-là. Les murs de ma chambre étaient démunis de toutes couleurs, le papier peint qui y figurer s'en étant détaché. Les pièces de mon appartement étaient quasiment vides. Les quelques meubles présents n'étaient que de simples meubles en bois. La seule pièce moderne était la salle de bains que je venais de refaire. Je tournais la tête vers ma table de chevet où trôner mon vieux réveil métallique qui indiquait 7H51. Je me levai et me précipitai dans ma salle de bains. J'en sortis quelques minutes après, laver, habiller et coiffer. J'enfilai une paire de chaussures le plus rapidement possible et saisi mes clés avant de sortir. Arrivé en bas de mon immeuble, je me retrouvai, comme chaque matin, devant l'immense croix de la pharmacie. Je n'ai jamais vraiment compris l'utilité de cette enseigne. Personnellement, je m'en servais pour connaitre l'heure, ce que je fis.       

-         Encore en retard... Je vais devoir prendre un raccourci.

Un frisson parcouru ma colonne vertébrale et je me retrouvai dans cet « autre monde ». Ce n'est pas réellement un autre monde. C'est comme un univers parallèle. Je suis dans la même rue, avec les mêmes passants, mais pas dans le même univers. Dans ce « monde parallèle », ce monde sans couleurs, je suis invisible aux yeux des êtres vivants, mais je suis aussi immatériel. Les passants ne me bousculent pas, il passe à travers moi, effaçant, durant quelques secondes, la partie de mon corps qui a était toucher en une vapeur blanche. Maintenant, il ne me restait plus qu'à avancée sans me soucier du monde qui m'entourait. Je jetai un regard vers tous les passants qui marchaient, coincés dans leur petit monde, sans ce soucié de ma présence ou de celle des autres. Je me mis soudain à courir, réalisant que je divaguais à nouveau. Mes membres devenaient parfois une simple fumée blanche qui reprenait forme peu après. Je traversai les rues les unes après les autres jusqu'au petit café dans lequel je travaillai en t'en que serveuse. Je rentrai dans le café et me dirigeai dans les vestiaires, en passant à travers le mur afin de gagner un maximum de temps. Avoir vécu si longtemps et toujours courir après le temps... Ça en deviendrait presque triste. Je revenu au « monde des vivants » et enfila mon tablier. Je sortis des vestiaires, pile à l'heure pour prendre mon service de 8h. Alors que je prenais place derrière le comptoir, je croisai M. Powell, mon patron. Celui-ci prit la parole.

-         Vous êtes à l'heure Elise.

-         Ça m'arrive monsieur.

-         C'est bizarre, je ne vous ai pas vu rentrer... Me dit-il attendant des explications.

-         Un magicien ne dévoile jamais ses secrets.

-         Je trouverais comment vous faites. Vous n'êtes pas magicienne, vous êtes serveuse !

Il avait prononcé ces mots calmement et pourtant, on pouvait ressentir sa colère.

-         Oui, je suis serveuse et à l'heure en plus de ça.

Il ne répondit pas et retourna dans son bureau claquant la porte derrière lui. Il ne m'a jamais apprécié. Il m'a embauché de la même manière qu'il a choisi les autres. Évidemment, je parle de toutes les autres. Il n'a embauché uniquement que des serveuses, uniquement des femmes. Il m'a accepté en pensant que je céderais à ses avances, ce qui n'est jamais arrivé et ce qui n'arrivera jamais. Ma journée se passa exactement comme toutes les autres : Les clients font leurs commandes, je leur apporte, ils consomment, ils payent, ils partent. Dans ce métier, les formules de politesse n'existent pas. Même si vous tentez un simple « bonjour ! » n'espérez pas de retours. Après quelques heures à répéter les mêmes gestes, je pus enfin retirer mon tablier en prenant soin de glisser mon badge dans la poche de mon manteau. Je me rendis dans les vestiaires et déposai mon tablier dans le casier métallique bleu portant mon nom. Les vestiaires étaient vides, alors j'en profitai pour sortir de ce quotidien numérique et orgueilleux. Mon image, qui se refléter dans le miroir en face de moi, disparut à la même allure que les couleurs de ce monde. Seules les couleurs, devenues ternes, des casiers situés derrière moi se refléter dans l'objet. Mon corps, devenu vapeur et invisible aux yeux des autres, traversait à nouveau le café. Dans la rue, j'entrepris le chemin du retour, les rues, d'habitude si colorées par les panneaux publicitaires dispersés dans la ville, sont, à présent, que des nuances de gris. Je courrais en direction de mon appartement sans me soucier des passants qui traversaient mon corps de brume. Un homme d'une vingtaine d'années devait être pressé puisqu'il courait vers moi sans même lever les yeux des feuilles de papier qu'il tenait dans ses mains. Si c'était mon premier voyage entre deux mondes, j'aurais surement eu peur de lui rentrer dedans, mais je savais à présent que passer à travers les « êtres vivants » ne faisait aucun effet. Je fonçai droit sur lui, confiante, et je réalisai mon erreur après l'avoir percuté de pleins fouets ce qui me fit changer brusquement de monde. Je me retrouvais au sol, sans comprendre.

-         Je suis désolé ! S'excusa le jeune homme. Je suis pressé, je ne vous avez pas vu.

Le jeune homme parlait vite et bougeait constamment les mains.

-         Vous n'étiez pas censé... Chuchotai-je malgré moi alors qu'il m'aider à me relever.

-         Pardon ?

-         Non-rien... Ce n'est pas grave. Excusez-moi, je n'ai pas le temps.

Cette phrase était un pur mensonge, mais j'étais troublée par cette bousculade. Je partis sans adresser un regard de plus au jeune homme aux cheveux châtains. Je rentrai au plus vite chez moi, mais, cette fois-ci, sans changer de monde. Je montai les escaliers, ouvris ma porte et m'engouffrai à l'intérieur de l'appartement. Je refermai ensuite la porte et m'adossai à elle. Des milliers de questions se bousculaient dans ma tête. Je me plaçai devant le miroir de mon entrée et vis encore une fois une tache sombre avalait petit à petit les couleurs qui m'entouraient. Mon reflet n'était plus présent dans le miroir et ma main pouvait passer à travers le mur, pourtant cet homme m'avait bousculé alors que dans ce monde, je suis immatériel, on ne peut pas me toucher, c'est impossible. Je passai le reste de ma soirée à réfléchir, perdu dans mes pensées. A l'heure du coucher, j'étais tous aussi perturbé, ce qui me causa quelques troubles du sommeil.

Figée dans le tempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant