Le livreur

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Le téléphone de Camille vibra.

Ah ! Une commande ! se dit-il en le saisissant.

Il cliqua sur la notification.

«Dupuis Lisa, 82 rue Victor Hugo» lut le jeune homme.

Il fit un léger signe de tête aux deux garçons travaillant avec lui avant de se diriger au pas de course vers les cuisines.

-Lisa Dupuis, demanda-il en arrivant au comptoir

-Tiens, te perds pas en route mec ! lui lança Rose en lui passant un sac en papier d'où sortaient des effluves appétissants

Ignorant la boutade de son amie, Camille fit demi tour, mis le sac dans le panier à l'avant de son vélo avant d'enfourcher le véhicule. Cela faisait maintenant trois ans que le jeune homme travaillait comme livreur chez le fast-food du coin. Il avait été embauché alors qu'il cherchait un petit boulot pour se faire de l'argent de poche grâce à Rose, sa meilleure amie, qui y travaillait déjà. Il s'était peu à peu habitué à l'ambiance du restaurant et appréciait même ses heures de travail. Les noms de rues défilaient devant les yeux de Camille, il tourna enfin à celle qu'il voulait. Cherchant le numéro, ses yeux parcoururent la rue. Il se dirigea vers le 82 et sonna à l'interphone. Une voix féminine lui répondit :

-Oui ?

-C'est le livreur, lança-t-il

-Entrez, c'est au troisième, porte de droite, conclut la voix avant de couper la communication

La porte émit un petit signal sonore, indiquant qu'elle était à présent ouverte. Le jeune homme entra et, l'immeuble n'ayant pas d'ascenseur, monta les trois étages à pieds. Devant la porte, il s'arrêta pour reprendre son souffle puis sonna. Une fille d'environ son âge lui ouvrit. La peau très pâle, les cheveux noirs de jais, longs jusqu'aux épaules, la silhouette fine et les yeux d'un bleu très clair ; on aurait dis un fantôme et sa tenue renforçait cette impression. Elle était vêtue d'un chemisier blanc ainsi que d'une jupe noire et d'un collant assorti. Tout chez elle exprimait la délicatesse et la douceur mais aussi la fragilité. Camille avait l'impression que s'il la touchait, il aurait pu la briser.

-Vous êtes bien mademoiselle Dupuis ? dit-il, reprenant soudainement ses esprits

-Oui c'est bien moi, lui répondit la jeune femme d'une voix timide

-Voici votre commande : une salade et un burger cheddar, c'est bien ça ?

-C'est bien ça !

-Alors ça vous fera 14,5 euros, s'il vous plait

-Oui, oui, bien sûr ! Excusez-moi... lâcha Lisa, un peu trop rapidement avant de disparaître de l'encadrement de la porte

Camille en profita pour jeter un œil à l'intérieur de l'appartement : le tout était très sobre. Les murs blancs, un miroir accroché dans l'entrée au dessus d'un meuble qui faisait office de fourre-tout. Au fond de la pièce, dans le salon, une grande bibliothèque recouverte de livres en tout genre, un canapé et en face une télévision. La jeune femme revint, quelques billets dans la main. Elle lui donna l'argent, le remercia et lui souhaita une bonne journée avec un doux sourire aux lèvres. Une fois dehors, Camille regarda vers les fenêtres de l'immeuble qu'il venait de quitter. Il cru voir un rideau se fermer brutalement mais, n'ayant pas vu qui que ce soit, haussa les épaules et parti en pensant à celle qu'il venait de rencontrer.

Le lendemain, le garçon pensait toujours à Lisa. Aucune fille ne l'avait déjà intrigué ainsi. Elle avait le regard si tendre qu'on aurait dit qu'il caressait tout ce qu'elle regardait. Camille se trouvait une insatiable envie de la revoir. Mais la priorité c'était son travail ! Alors le jeune homme prit les commandes qu'on lui indiqua, tout en espérant recevoir celle qu'il voulait vraiment accomplir. Aux alentours de 13h, son souhait fut exaucé : « Dupuis Lisa, 82 rue Victor Hugo » afficha de nouveau son téléphone. Le garçon sauta sur ses pieds, récupéra le sac que lui tendit Rose et fila aussitôt. Sur le trajet, il tremblait d'impatience, et pédala bien plus vite que d'habitude. En arrivant, une dame qui sortait lui ouvrit et il monta les escaliers quatre à quatre. Il n'en prit conscience seulement en arrivant tout essoufflé sur le palier du troisième. Il attendit une minute que sa respiration se calme, puis, appuya sur la sonnette. Camille retint son souffle. Les secondes passèrent et personne ne vint ouvrir. Il attendit un peu mais, n'entendant personne derrière la porte, refis la même chose. Cette fois, il entendit un bruit de clef derrière la porte et cette dernière s'ouvrit enfin. Lisa apparut. Il vit dans ses yeux qu'elle l'avait reconnu et une douce chaleur se répandit dans son cœur. Elle lui sourit et la chaleur se propagea dans ses joues.

Le livreurWhere stories live. Discover now