Chapitre 2 - Partie 2

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C'était plus fort que moi. J'avais beau me concentrer, faire tout ce que je faisais d'habitude, je n'y arrivais pas. Ça m'avait semblé une bonne idée sur le coup. Non, en fait, j'avais cru à une blague et surtout, je m'étais surestimé. Ou pas. Que devais-je faire ? Je n'arrivais pas à croire que je me perdais seul dans les méandres de ma propre tête.

Je n'avais pas prévu ce facteur. J'avais beau eu prévoir les possibilités à venir, celle-ci était tombée comme une erreur indéchiffrable, quelque chose qui faisait bugger le système et dont il m'était impossible à réparer. Comme si je ne pouvais tout simplement pas y toucher. Ce qui m'énervait. Au plus haut point ! Parce que rien ne m'échappait d'habitude.

Sauf lui.

Ce facteur.

— Tu veux bien arrêter de taper frénétiquement du doigt sur la table, ça me stresse.

— Non, ça ne te stresse pas. Tout au plus ça t'agace mais l'origine de...

— Stop ! Je veux pas un cours sur le pourquoi du comment. Juste, le silence.

Noah se retourna pour me faire dos, de nouveau plongé dans ses cours. Je me remis correctement aussi, dos à lui, face à mes écrans. Le « Studio » était calme ce soir, pourtant, il y avait quelque chose dans l'air qui était dérangeant. Un je ne sais quoi qui me tendait. Je posai mes yeux sur les lignes codées de la console, un stylo à la main, mon cahier ouvert devant mon clavier. J'aurais déjà dû avoir fini ce problème. J'aurais déjà dû me mettre à travailler sur mon jeu mobile. Mais à la place de ça, mon cerveau tournait en boucle sur des choses insignifiantes.

Autant qu'il pouvait être insignifiant.

Sans m'en rendre compte, je commençai à faire tourner mon stylo entre mes doigts. Mes dents trouvèrent l'ongle de mon pouce libre. Je n'y arrivais pas. Je ne trouvais pas la solution. Je ne comprenais pas ce qui avait merdé dans l'équation. Si, au fond, je savais. Je le savais très bien. Mais qu'est-ce que je pouvais y faire ?

Je ratai un tour, et mon stylo tomba sur la table puis par terre. Noah soupira et fit tourner son fauteuil vers moi alors que je me penchai pour ramasser mon bien.

— Bon, tu m'expliques ?

— Quoi ? fis-je le plus naturellement du monde.

J'étais mauvais menteur mais j'essayais quand même.

— Crache le morceau. Je sais que y'a un truc qui va pas. T'arrête pas de t'agiter dans tous les sens. Tu le fais tout le temps quand t'arrive pas à gérer un truc que tu aurais dû contrôler normalement.

— Je ne m'agite pas dans tous les sens.

— Tu t'agites à ta façon, expliqua-t-il en croisant les bras avant de me pointer du doigt. Si tu travaillais vraiment, tu serais comme d'habitude : statique et trop concentré pour te disperser autant.

Je me dispersai, en effet. À qui la faute si je ne parvenais plus à calculer correctement ? Je regardai ma paume de main, encore rouge après avoir frotté comme un malade pour enlever les traces de stylo. On les distinguait encore un peu. Brillante idée que d'écrire en noir sur ma peau alors qu'elle était suffisamment blanche pour qu'on y voit mes veines limite violettes au travers.

— Alors ?

Je reportai mon attention sur mon deuxième ordinateur qui affichait ma boite mail. J'avais soigneusement recopié ce que Nathan avait inscrit sur ma main, mais je n'avais pas encore réussi à lui envoyer ce fameux mail. Face à lui, je m'étais blindé de professionnalisme. Au « Studio », toutes mes pensées que j'avais bridé jusque là étaient revenues me fouetter au visage avec tant de violence que j'avais cru crasher mon cerveau sous cette saturation inattendue. De quoi vriller ma tête et me faire perdre l'essentiel.

Par-Delà les ApparencesWhere stories live. Discover now