Chapitre II (8) - Il est midi, qui l'a dit ? C'est la souris !

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- Calme, Nhan, ne force pas, souffle la voix de Seung-Il alors que, revenant à moi, je tente de me lever.

Je suis allongée dans mon lit, les mains et les bras bandés, je sens des pansements sur mon visage. Je me redresse un peu, m'appuyant contre la tête de lit. Aïe. Je sens des plaies s'ouvrir, et tirer sur ma peau. Mes mains sont entourées de bandes et de pansements. La douleur se répand dans mes nerfs alors

- Tu t'es coupée de partout en renversant la verrerie du labo, et... Ben... Là où c'est pas des coupures t'as des plaques rouges à cause des produits chimiques. T'as rien que des coupures au visage, si ça te rassure.
- Ça me rassure pas.

Je baisse les yeux, le film de mes souvenirs me revient en tête, dans les moindres détails. Mendel s'étalant, le visage couvert d'ecchymoses, sur un carrelage froid, blanc, clinique. Jiraïr écrasé sur le sol en contrebas au milieu d'une tache de sang. L'air effaré d'Arsinoé. Le putain de sourire de Monokuma.

Mon coeur se serre, mais je suis trop fatiguée pour ressentir quoi que ce soit. Je me sens... vide. Fatiguée. Deux morts. Je suis si fatiguée déjà. Presque résignée à ma mort prochaine. Je n'en voudrais même pas au meurtrier.

Car tu le mérites.
Car je le mérite.

Je ferme les yeux.

- Monokuma a dit quoi ? murmuré-je.
- J'ai les dossiers, si tu veux. T'as été dans les choux peut-être pendant deux ou trois heures...

Arsinoé terrorisée.

Eugénie qui dort

Akissi et LaToya.

Jiraïr qui tourne.

Le soleil.

Akimune.

Les sodas.

Mendel.

Le verre.

Le verre...

- Nhan ?
- Je... Pardon, j'ai eu une absence. Je... Je veux bien le dossier.
- Enfin « dossier » c'est un bien grand mot pour cette pochette cartonnée. Au moins c'est tapé à l'ordi, je suppose ? C'est déjà plus lisible...

Il me tend donc la chemise en carton vert, avec mon nom écrit dessus. Nhan. En une mauvaise graphie. La signature de Monokuma atteste de son authenticité. Je tire sur les élastiques, laissant échapper un feulement d'inconfort, et découvre les feuilles avec peine.

 Je tire sur les élastiques, laissant échapper un feulement d'inconfort, et découvre les feuilles avec peine

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Ça me donne la nausée. Les images rémanentes tournant avec leur effroyable précision dans mon esprit me donnent la nausée.

- Tu... peux me passer mon carnet ?

Seung-Il ne discute pas, et me le tend avec mon critérium. Je l'attrape, et commence à griffonner, comme pour tenter de m'exorciser. C'est peine perdue. Perdue, perdue, perdue. Mon cerveau n'oublie jamais rien. Et je ne veux pas oublier, au fond. La peur a laissé place à la colère. La colère devant ces horreurs que nous devons vivre. La mort de Lutz, finalement, je ne vais pas la pleurer. Stefan, c'était de l'injustice, mais je ne le connaissais pas. Certes, le pathos d'Eugénie m'a... touchée ? Ouais, on va dire ça. Mais finalement, ce n'est qu'un figurant, qu'une ombre dans ma perspective du monde. Jiraïr et Mendel... Faisaient partie du paysage. De mon paysage. De mon univers. Ils étaient là, ils étaient dans mon champ de vision, et maintenant ils sont dans mes souvenirs. Et j'ai de l'affection pour Jiraïr. J'avais. Le passé rend tout plus amer. Ça fout un sale goût dans la bouche. Un goût de fer. C'est injuste. Ils ne méritaient pas cela. C'est injuste, c'est injuste, c'est injuste.

Danganronpa : À l'ombre de nos mortsWhere stories live. Discover now