•Chapitre 14•

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J'étais assise seule à table, stressée comme jamais. J'avais peur qu'ils ne décident de me tuer. Bubba et Chop me protégeraient, pas de doute là-dessus, mais la famille Sawyer ne faisait pas de sentiment. Ça, je l'avais appris en 'vivant' ici. Ils n'aimaient pas les étrangers, et disaient qu'on ne pouvait pas leur faire confiance. Alors c'est tous en viande qu'ils finissaient, les pauvres... Je refusais de connaître le même sort qu'eux, il fallait que je me batte pour survivre!

Alors que j'essayais de positiver, ils entrèrent tous dans la salle à manger avec le plus grand silence, et prirent place. Tout aller se jouer maintenant. Le sort de ma vie allait dépendre de ce que j'allais dire et faire.
Loretta entra à son tour et déposa la casserole au centre de la table. Aujourd'hui, c'était Carbonade. C'est alors que mon attention se posa sur la viande... Kareen. Les larmes me montaient aux yeux, comment est-ce que Bubba avait-il osé la cuisiner alors qu'il savait qu'elle comptait pour moi?! C'était la seule personne qui avait le même objectif que moi: sortir de cet enfer. Maintenant j'étais seule...
Loretta me dévisagea un instant avant de se mettre à parler.

"Écoutes Laurie, c'que t'as fait aujourd'hui est impardonnable. On t'faisait confiance nous, et voilà qu't'essayes de t'barrer avec l'autre connasse. Donc j'te propose quelqu'chose. J'vais pas passer par quatre chemins, ta p'tite copine casse-couilles est la prochaine à passer à la casserole. On t'laissera en vie qu'à une seule condition: qu'tu la tues de tes propres mains."

Tuer... Kareen? C'était me demander l'impossible. Je l'avais vue de mes propres yeux, je pouvais pas me permettre de lui faire ça. En tout cas  ça me rassurait de savoir qu'elle n'était pas encore morte, et que la viande dans le plat n'était pas la sienne. Je baissais la tête et regarda par terre. Bubba, qui était assis à côté de moi, posa sa main sur mon genou et le caressa. Je savais ce qu'il était en train d'essayer de me dire, il voulait que je le fasse.

Ils me tirèrent jusqu'à la grange où se trouvait Kareen, attachée sur le même établi où j'avais vu Bubba découper un homme. Elle était couverte de sang et pleurait à torrent. Je n'avais qu'une envie: c'était de la libérer pour qu'elle puisse partir à tout jamais. Nubbins s'approcha de moi et me tendit un couteau de boucher.

"C-c'est simple, t-tu verras. T'as qu'à p-planter le couteau dans s-son cœur, et hop, c'est f-fini."

"Nubbins! Lui dis rien! Y faut qu'elle se débrouille par elle même." Loretta lui cria dessus.

Je m'approchai doucement, couteau en mains. La peur, le stress et le doute me rongeaient de l'intérieur. Est-ce que je prenais la bonne décision? De toute façon, elle allait mourir dans tous les cas, alors que ce soit moi ou eux, ça n'a plus d'importance... Mais ça voulait aussi dire que j'allais devenir une meurtrière... Est-ce que la vie en valait la peine? Est-ce que vivre dans la peur et l'horreur valait la peine? J'approchai dangereusement le couteau de sa poitrine et le positionna juste au dessus de l'endroit où je pouvais sentir son cœur battre à mille à l'heure. Elle me regarda, les yeux rouges à force de pleurer.

"J-je t-t'en p-pris, a-aide m-moi..."

Mes mains tremblaient, et je n'arrivais plus à réguler ma respiration. Je ne pouvais plus supporter cette situation. Alors que j'allais abandonner, les Sawyer se mirent à crier.

"ALLEZ, TUES-LA, TUES-LA, TUES-LA!"

Bubba se rapprocha, attrapa ma main et appuya, dirigeant le couteau plus bas vers son cœur. Je lui chuchotai:

"Je veux pas le faire Bubba..."

En entendant ça, il resserra son emprise sur mon poignet. Le couteau était désormais contre sa poitrine, si je baissais encore un peu, la lame allait transpercer sa peau. Kareen hurlait et déchirait mes tympans, ça me brisait le cœur. J'essayais de résister à la force de Bubba, mais il était bien plus fort que moi. Je me débattais comme je le pouvais, en lui donnant des coups, en criant et en le frappant, mais ça ne semblait pas marcher. Il attrapa ma nuque et serra légèrement, comme s'il essayait de ne pas me blesser.

"Laisse moi, je t'en conjure, je ferais tout ce que vous voudrez, mais pas ça..."

Il me regarda avec ce regard que j'aimais tant, celui qui était à la fois intense, mais aussi rempli d'amour et de tendresse. Il hésitait, je pouvais lire le doute dans ses yeux. Au moment où il allait lâchait mon cou pour se relever, Shérif Hoyt lui cria dessus.

"Qu'est-ce' t'attends fiston? Vas-y, aide la à la tuer. Attend-tends-tends... nom de dieu, me dis pas qu'tu t'déglonfles parce que t'as peur pour ta p'tite amoureuse, hein? Pas d'ça ici Bubba, tu connais les règles! C'est ou l'sexe, ou la tronçonneuse, mais pas les deux! Allez mon grand, on compte sur toi."

Suite à ça, Bubba attrapa mon poignet une seconde fois et serra encore plus fort que la fois précédente. Il redirigea dangereusement la lame vers le cœur de Kareen

Alors que du sang commençait à couler de la plaie, je fermai les yeux, effrayée de la voir mourir par ma faute. Je pouvais entendre ses cris augmenter et son corps convulser. Son sang giclait sur moi, et donnait à ma bouche un goût pâteux et métallique. Sa main froide qu'elle avait réussi à détacher, serrait mon bras si fort que je pouvais sentir ses ongles rentraient dans ma peau. Je sentais les battements de coeur de Bubba augmentaient, comme s'il y prenait du plaisir, ça me répugnait.

Après quelques instants d'agonie la plus totale et de souffrance, plus rien, plus aucun bruit. Je pouvais sentir Bubba lâcher mon poignet et s'éloigner, me laissant là, pétrifiée par ce que je venais de faire, les mains tremblantes, le cœur tambourinant, les larmes ruisselant sur mes joues et le souffle court.

Je n'osais pas bouger, ni ouvrir les yeux. Plusieurs longues minutes passèrent sans que je ne réagisse. Quand j'eu assez de courage et que ma crise d'angoisse s'atténua, j'entrouvris lentement les yeux. Ce que je vis me donna la nausée au plus au point.

Alors que je me vidais sur le côté, le corps de Kareen gisait, raide mort sur la table, trempé jusqu'à l'os d'un horrible et nauséabond liquide rouge. J'étais focalisée sur la plaie que j'avais formée, je n'arrivais pas à voir autre chose. Alors que je me vidais encore, ma vision se brouilla, et la dernière chose que j'entendis fut le bruit de mon corps sur le sol.

Après, le néant...

Remember MeWhere stories live. Discover now