~ PDV Malia ~ partie 2

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Une fois raccrochée, mon sourire ne disparaît pas de mon visage, ce que remarque aussitôt mon oncle quand il s'approche de moi. Il grimpe rapidement les trois marches qui mènent à la terrasse et vient s'asseoir à mes côtés. Le regard vissé face à lui, afin d'admirer la beauté du domaine et son calme à cette heure-ci.

On reste ainsi, sans qu'aucun mot ne soit prononcé pendant un petit moment, comme on aime le faire après une longue journée. Un petit rituel entre nous depuis quelques années maintenant et dont on ne déroge que peu de fois. Principalement lorsque je dois travailler. Pensée qui me rappelle que cela va être de nouveau le cas à partir de demain et qu'il faut donc que je l'avertisse.

— Annie te passe le bonjour, tonton ! lui dis-je pour engager la conversation.

— Il me semblait bien, vu le sourire qui trônait sur tes lèvres, que ça ne pouvait être que cette dernière, me dit-il alors avec amusement.

— Je ne sais pas trop comment le prendre là ! m'empressé-je de lui répondre faussement blessée par sa réplique.

Il ne lui en faut pas plus pour partir en fou-rire, habitué à ma répartie. Il se doute bien que je ne vais pas avouer si facilement qu'il a raison. Marc me connaît tellement que cela ne le surprend plus, il en est amusé à force. Même si parfois, je ne manque pas son regard désespéré face à moi.

Seulement, je ne peux m'en empêcher, je suis ainsi et il le sait. Lorsqu'il parvient à se calmer, il tourne son attention sur moi, ce qui attire mon regard. Quand il s'en rend compte, il s'empresse de prendre la parole, mais cette fois-ci avec sérieux.

— Je suppose qu'elle ne t'appelait pas pour prendre simplement des nouvelles, vu l'heure...

— Non, effectivement... Mes services de kiné semblent être requis apparemment ! Le directeur me veut sur le cas d'un nouveau patient et cela ne doit pas être n'importe qui vu cette requête, lui révélé-je aussitôt la situation.

Il acquiesce alors à ma réponse. Il sait également que lorsque je suis demandé, ce n'est jamais pour des cas simples. Bien au contraire. Quand ils ont découvert lors de mon premier cas dans ce centre à quel point je pouvais me montrer entêtée et surtout que les mots « non » et « je n'y arriverais pas » ne font pas partie de mon vocabulaire.

Pour cause mon patient avait perdu tout espoir de retrouver l'usage de sa jambe gauche. Il était persuadé de rester paralysé à vie et ne voulait pas travailler. De quoi me motiver encore plus à ne pas lui rendre la tâche facile et il s'en est vite rendu compte. Autant dire que je ne l'ai pas laissé se morfondre et que je me suis énervée après lui à de nombreuses reprises.

Plus d'une fois l'envie d'abandonner m'avait prise, mais il était hors de question que je ne lâche et cela a payé. Je ne pouvais pas me résoudre à ce qu'il ne puisse plus se servir de sa jambe correctement.

A l'heure d'aujourd'hui, il a pleinement repris sa vie en main et remarche sans séquelle de son accident. Une grande fierté pour moi, d'ailleurs. Il revient de temps en temps nous voir, afin de nous montrer qu'il continue les exercices que je lui ai appris. Mais aussi pour me remercier de ne jamais l'avoir abandonné. De ne jamais avoir baisser les bras, alors que selon lui il l'aurait bien mérité pour m'avoir si souvent maltraité. Sauf que ce n'était pas une option pour moi. Il n'est pas rare de voir certains de nos patients revenir nous voir et en faire de même.

Depuis, ce jour, on me confie seulement les patients les plus butés et qui nécessites d'avoir du répondant face à eux. Une personne qui n'hésite pas à leur rentrer dedans et c'est quelque chose que je fais sans problème. Fort m'est de constater qu'il est assez rare que l'on me donne des patients faciles.

Parfois, j'ai le droit de m'occuper d'enfants aussi et là, ce sont des moments autant durs que superbes. Leur innocence est tellement apaisante que j'aime passer du temps auprès d'eux. Encore plus dans ce genre de situation. Mais c'est aussi à double tranchant, car les voir souffrir n'est pas ce que j'aime, loin de là même.

Il n'en reste pas moins que ma détermination, avec eux, est encore plus grande. Leur jeunesse ne doit pas être entaché ainsi, ou du moins, le moins possible et c'est ce que je me donne comme motivation à chaque fois. Je n'ai failli qu'une seule fois selon moi, car pour mes collègues et les parents de cette petite fille, il en est tout autre. Pour eux j'ai réussi à faire des miracles, là où les médecins avaient annoncés qu'elle ne pourrait jamais exercer de nouveau le patinage artistique.

Il s'avère qu'effectivement, cette jeune demoiselle de dix ans vient de gagner le première place du concours national. Elle est devenue la fierté de tous. Je me réjouis pour elle aussi, mais le fait qu'elle n'est pas récupérer les cent pour cent de mobilité de son bras me laisse un goût amer.

Ce que nombreux de mes collègues ne comprennent pas. Puisque, selon eux qu'elle est retrouvée l'usage de son membre à plus de quatre-vingt-dix pour cent, est un miracle. Seulement pas pour moi.

C'est donc sur cette pensée et en apercevant le ciel se noircir de plus en plus, que je décide qu'il est l'heure pour nous de rentrer. Pour moi de préparer mes affaires. Je prévois toujours un sac avec quelques affaires de rechanges, au cas où. La région où nous vivons en cette saison est particulièrement rude et la neige est très présente. Parfois un peu trop et nous coupe de tout. Non que cela me gène lorsque je suis ici, mais cela peut vite devenir un souci quand je suis en extérieur.

Je n'aime pas ne pas pouvoir rentrer et vérifier que tout se passe bien chez nous. Même si j'ai entièrement confiance en mon oncle pour tenir les rennes en mon absence, sauf que mon côté perfectionniste n'est jamais bien loin. Ce qui fait bien souvent rire celui-ci et ne se prive pas de me rappeler qu'il sait se débrouiller seul et ce, déjà avant ma naissance.

Une fois à l'intérieur, Marc me précise qu'il va nous concocter un petit repas rapide, car il est hors de question que je parte le ventre vide. Il me connaît assez pour savoir que lorsque je suis sur un cas, j'en oublie tout ce qui m'entoure et parfois même de m'occuper de moi. Un peu trop perfectionniste dans l'âme et je ne n'arrive pas, depuis toutes ses années, à me défaire de ce point. Au grand damne de mon entourage, d'ailleurs.

J'acquiesce donc à ce dernier et me dirige vers ma chambre. J'attrape mon sac de voyage habituel et y fourre trois tenues, avant de filer prendre une bonne douche bien chaude. Ce, afin de me réchauffer après cette journée dans le froid.

Ce n'est qu'une heure plus trad que je pars rejoindre mon oncle. Les yeux fermés je pourrais y aller, tant il me suffit de suivre la bonne odeur qui embaume la maison. Lorsque j'arrive en cuisine, la table est prête et j'aperçois enfin ce qui cause cette senteur ; des lasagnes maison. Le plat favori de Marc et je ne cache pas apprécier aussi. Il a un don pour la cuisine que je n'ai pas, même si je me débrouille malgré tout dans ce domaine.

Le repas se passe dans la bonne humeur, comme à chaque fois. On parle de l'organisation du planning et par chance, il n'est pas trop rempli donc il pourra parfaitement s'en sortir pour les ballades de prévues. Ce qui me rassure, car je ne veux pas qu'il se tue à la tâche non plus. Je l'aide ensuite à tout débarrasser et fait la vaisselle avec son aide, malgré mes protestations étant donné qu'il a fait à manger. Mais, comme souvent, je n'ai pas gain de cause, loin de là même. Cet homme est une bénédiction et je me demande encore il est possible qu'il n'ait pas trouvé de femme.

Je me garde bien de lui poser la question ou je risque de me prendre un bon coup de pied au cul pour l'embêter avec ça de nouveau. Oui, car j'adore le taquiner sur ce point, bien qu'une part de moi pense vraiment cela.

Dès que tout est en ordre, on finit par chacun partir se coucher, afin que l'on soit en forme demain matin. Je lui offre un câlin comme chaque fois avant mon départ. Même si celui-ci n'est que temporaire, sauf que c'est notre petit rituel et je ne compte pas en déroger ce soir.

C'est donc sur cette note que l'on part dormir, non sans encore quelques dernières recommandations de nous deux. 

Cœur de feu en LaponieWhere stories live. Discover now