Chapitre 1 - Noah

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Cela fait un bon moment que je reste là à fixer droit devant moi sans être en mesure de répondre à ce qu'on me demande et encore moins à mon univers. Je cligne des yeux, désespéré de n'avoir pas effacé de mes paupières les mauvais souvenirs, les chocs qui ont peu à peu mis ma vie en l'air.

— Au revoir, p'pa...

Je me retourne. J'esquisse un mince sourire en quittant mon observatoire et en tâchant de ne pas montrer mes failles qui ont pris pourtant désormais la largeur de gouffre qui m'ont déjà avalé. J'ouvre les bras pour que mon jeune fils, Baldwin, puisse s'y réfugier. Il le fait tout de suite et je hume à pleins poumons l'odeur douce de ses cheveux tout en embrassant le sommet de sa tête. Très vite, je perçois la présence de sa grande sœur à proximité. Charlie est effectivement là, mais elle se tient bien à l'écart. Audrey, malgré ses deux ans, affiche le même air que son ainée. Toutes deux me fixent de leurs grands yeux clairs et paraissent m'interroger afin de savoir pourquoi j'ai laissé mon couple et ma famille partir à vau-l'eau.

— Venez, intimé-je à Charlie, la voix tremblante d'émotion. Nous devons nous dire au revoir comme il faut...

Charlie soupire son mécontentement et par bravade, reste là où elle se trouve plusieurs secondes avant de consentir à venir m'embrasser, moi, son incapable de père. Les gazouillements d'Audrey apportent le point final à l'écroulement de mes remparts alors que j'étouffe tout au fond de mon être un besoin de les retenir tous auprès de moi.

Un coup de klaxon nous sépare. Sans en parler, nous savons qui est en train de s'impatienter en bas de notre ancien chez nous, vendu désormais et dans lequel je ne peux plus rester.

— Votre mère vous attend, prononcé-je dans un souffle. Il faut y aller.

Le regard de Charlie balaie une dernière fois les murs de son enfance tandis que Baldwin resserre ses bras autour de ma taille. Mon fils est celui qui a le plus de mal à se faire à cette vie, écartelé entre ses parents fraîchement divorcés.

— Je ne veux pas te laisser tout seul, p'pa ! sanglote-il contre moi.

Je me penche pour mieux lui faire face. Même si je ne me sens pas totalement remis de mes anciennes épreuves, le départ de Franny et notre divorce m'a forcé à entreprendre une thérapie dont je commence à percevoir les effets. Si avant j'avais du mal à expliquer aux enfants ce qui se passait, depuis peu, j'affronte les problèmes en y mettant les mots :

— Je ne vais pas être tout seul, Baldwin. Tu sais bien que tes oncles ne vont pas tarder et puis, nous allons bientôt nous revoir...

— Pas sûr, intervient Charlie avec défiance. Tu connais maman et elle a dit que jamais elle ne te laissera nous prendre si, comme tu l'as prévu, tu vas vivre chez Will et Ranza.

Je soupire. Je dois me rendre à l'évidence : ma fille a complètement raison. Franny, en apprenant que mon petit frère et sa compagne m'offraient de loger chez eux, a d'office refusé de me présenter nos enfants. Selon elle, l'influence de mon mal élevé de frangin et de sa tatouée de petite amie ne sont pas un exemple pour eux. Je pourrais l'attaquer pour non-représentation d'enfants, mais je m'y refuse. Malgré la tension grandissante qui existe entre nous, je ne veux pas que notre progéniture devienne le fruit de notre bataille. Et puis, je connais bien Franny. Si elle réagit comme elle le fait actuellement, c'est uniquement parce que mes états d'âme l'ont poussée à bout. Désormais, elle se venge en m'imposant ses volontés ce qui fait que les échanges entre nous sont toujours très tendus.

— Eh bien ! Je vous attends, moi !

Je savais bien que Franny n'attendrait pas indéfiniment qu'on finisse de se dire au revoir. Comme si la maison lui appartenait encore, la voilà plantée là, dans l'encadrement de la porte donnant sur la cuisine.

COPS and love-Saison 2 Noah Hunter, le bon flicOù les histoires vivent. Découvrez maintenant