À l'autre bout du monde

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Elle

Par l'ouverture de ma fenêtre, je voyais les steppes étroites s'étaler à perte de vue. Dans cette grande plaine inculte, couverte d'herbes rases, le vent sifflait tendrement, et les gazelles courraient parfois au loin.

Ce matin-là, je ne vis rien par la fenêtre. Pas le moindre petit animal. Tous s'était sauvés, ayant peut être sentit mon propre départ.

Il ne restait plus rien dans la maison. Les derniers cartons étaient entassés dans la grande remorque du 4×4.

L'aventure au bout du monde, qu'ils disaient.

Je fermais les volets, puis descendis dans le séjour. Ma mère, petite personne aux larges pomettes, annalysait les derniers recoins, par peur d'oublier quelque chose. Elle tourna la tête, me vit et s'approcha.

- Kiana, ma chérie. Veux-tu bien rejoindre ton père dehors ? Il est l'heure de partir.

Sa main toucha ma joue et ses lèvres se possèdent sur mon front. Aujourd'hui, dans tous ces changements perturbant, elle n'était qu'affection.

Dehors, mon père serrait avec force les dernières cordes entourant la remorque. Il était temps. Dans une semaine, nous atteindrions la France, où la sœur de mon père nous attendait.

Je bondis dans la voiture et mis mon casque, m'enfermant dans la bulle qui se créait à mesure que la musique augmentait.

Le moteur démarra, le volant tourna. Au loin, il ne restait plus que notre petite maison, foyer traditionnel de cette région.

Dehors, les herbes irrudes tapissaient le sol. J'aperçus un fennec, petit animal libre sur ses quatre minuscules pattes. Ses grandes oreilles se redressèrent, son museau se leva, et j'eus tout juste le temps de plonger mon regard dans ses riquiquis yeux noirs que ce renard de poche était hors de vue.

Et tandis que j'admirais ce paysage que je voyais pour la dernière fois, la longue route commençait pour de bon.

Le ronronnement du moteur finit par me faire m'endormir, serrée entre différents sacs.

Bientôt, les longues steppes ne seraient plus qu'un lointain souvenir...

***

Lui

Les grands champs de blé s'étendaient autour de mon petit village tels des tapis d'or.

J'étais né dans l'Ouest canadien, dans un petit village proche de Saskatoon. Je n'avais jamais quitté ma région jusqu'à aujourd'hui, où j'allais m'envoler pour Paris.

Un bruit sourd m'interpella, celui-ci provenait du hangar. Ma tante en sortit et m'appela d'un geste de la main : il était temps de partir.

Je descendis les escaliers, caressant de mes doigts fins le papier peint que je ne verrai plus. Mes yeux se promenaient sur la rambarde en bois taillé, mes pieds foulaient le sol grinçant.

- Liam Stewart, tu m'as assez fait patienter, il faut y aller. Tu n'oublies rien ?

Je répondis "non" de la tête et montai dans la voiture, m'installant sur une place étroite entre des sacs encombrants.

Je fermai les yeux aussitôt, laissant une larme couler.

On resterait en contact, qu'elle disait.

Je n'en croyais pas un mot. Elle m'oublierait aussi vite que nous nous sommes rencontrés.

Une nouvelle vie commençait sous le crépitement des pneus durci, alors que le vol pour la France était imminent.

Bientôt, les grands champs de blé ne seraient plus qu'un lointain souvenir...

__________

C'est un début d'histoire, du même type que Lucie ou Eva, que j'ai écrit et abandonné il y a longtemps (j'en ai un paquet comme ça).

Oui, Saskatoon existe en Amérique, il y a des vols pour la France dans l'aéroport le plus proche, et non il n'y a pas de grands champs de blé. C'était difficile à trouver sur maps. xD

Oui, Kiana est bien un prénom venant du Kazakhstan, les steppes kazakhe existent comme je les ai décrite et il y a des gazelles et des fennecs. En revanche, le surnom "renard de poche" ne vient pas de moi mais d'internet. Cette description était extraordinaire.

Oui, j'étais déterminée lorsque j'ai écris ce début de récit xD

La bise <3

Juѕтe deѕ мoтѕOù les histoires vivent. Découvrez maintenant