La promesse de l'exode

CHAPITRE 11Vaisseau « Le Falco » Espace - 29 S5 Exo14 - 13h UTC

Tandis qu'Adrielle, appuyée contre l'un des murs de la pièce, écoute avec attention les explications des uns et des autres concernant la vie sur le vaisseau. Elle évite de s'y projeter et garde une certaine distance face à tout ce qu'ils lui racontent. A les écouter, cela semble merveilleux et l'orpheline ne veut pas espérer quelque chose d'inatteignable. Son retour sur Terre n'en sera que plus douloureux. Oui, parce qu'elle ne se fait aucune illusion. Les dirigeants de l'Éliro refuseront d'offrir une place à bord une personne comme elle, qui plus est qui s'impose clandestinement. Un nouvel exil l'attend et l'idée même de revivre une seconde fois ce rejet lui serre le cœur et la renvoie à ses démons. Elle aurait tant aimer retrouver ses parents, mais il semble que le destin en ait décidé autrement.

« Toi aussi, tu pourras profiter de toutes ses choses.

Alaric la sort de ses pensées en lui murmurant ces mots à l'oreille. Surprise, elle se rend compte qu'elle baisse la garde et ne surveille plus ses arrières. Toutefois, comme à son habitude, Adrielle retrouve rapidement son air froid et distant.

— Pour le moment, contentons-nous de rejoindre le vaisseau. »

Sur ces mots, elle contourne Alaric et s'engouffre dans le couloir.

Le militaire perçoit le malaise de la femme et décide de la rejoindre. Il la retrouve, les bras croisés et le regard perdu dans l'immensité de l'espace. Il tente une approche plus délicate.

« Excuse-moi. Je ne voulais pas faire remonter de mauvais souvenirs.

— Ça ne fait rien.

Un ange passe avant qu'Alaric se décide à mettre les pieds dans le plat.

— J'ai envoyé un message à mes supérieurs. Je leur ai demandé une audience dès que nous serons amarrés au vaisseau.

Avant de poursuivre, l'homme se tourne vers Adrielle. Son visage bascule en direction d'Alaric pour le fixer droit dans les yeux. Elle l'impressionne d'un simple regard et, pour la première fois, il se demande s'il a pris la bonne décision.

— Je veux que tu sois réintégrée et que tu puisses bénéficier du droit qui t'a été retiré au moment de l'exode. C'est pourquoi je me rendrai auprès de mes pairs pour soutenir ton intégration sur l'Éliro.

Sous le choc, Adrielle ne réagit plus. Elle ne s'attendait pas à une telle nouvelle. Des milliers de questions tambourinent sous son crâne. L'éventualité d'une réhabilitation semble si utopique qu'elle se demande si elle n'est pas en train de rêver. Heureusement, son esprit incrédule l'empêche de se faire des illusions.

— Merci, mais on sait tous les deux que ce n'est pas la peine de te donner tant de mal.

— Que veux-tu dire ?

— Lorsque nous arriverons, on me renverra aussitôt sur Terre.

Agacé, Alaric la force à lui faire face.

— Non ! Pourquoi es-tu si pessimiste ? Tu as une chance de rester sur le vaisseau et c'est réel ! Ne désespère pas avant d'avoir au moins essayé.

Adrielle se libère de sa prise en râlant.

— Sois réaliste un instant s'il te plait. Je ne sais pas pourquoi tu es tant accroché à moi, pourquoi tu tiens tant à prendre soin de moi, à maîtriser ce qui tourne autour de moi ou même à tout préparer pour mon hypothétique arrivée sur Éliro, mais...

Il ne lui laisse pas le temps de finir et recule de deux pas en se prenant la tête entre les mains.

— C'est parce qu... Laisse tomber.

— Oui, laisse tomber. On sait tout ce qu'impliquerait mon intégration sur le vaisseau pour le gouvernement. Ils ne peuvent pas prendre le risque d'accepter une ancienne répudiée car cela remettrait toutes leurs décisions en question.

Alaric la fixe, perdu. Les deux alliés ne se comprennent pas du tout.

— M'offrir la rédemption serait admettre qu'ils ont commis une erreur et ça, aucun gouvernement ne l'accepterait.

— Tu as une image bien négative de ceux qui ont permis à l'humanité de trouver un nouveau souffle.

— C'est peut-être parce que je vis en apnée depuis tout ce temps.

L'homme comprend soudainement que les craintes d'Adrielle ont une origine bien plus profonde qu'il ne le pense. Il attrape ses coudes avec douceur comme pour la rassurer.

— Et il est temps que tu respires à nouveau. Tu ne crois pas ? »

Partagée entre l'envie d'espérer et la peur d'y croire, Adrielle ne sait pas quoi penser. Elle esquisse un sourire furtif en tournant la tête vers la vitre qui donne sur l'extérieur. Alaric la surprend une nouvelle fois en la prenant dans ses bras. Elle se fige, mais se laisse faire.

« Laisse-moi t'aider à reprendre ce nouveau souffle. Je ne te laisserai pas tomber, je te le promets. »