Protection rapprochée

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"- Tu sais, tu n'es pas obligé de rester aussi proche de moi comme ça... Murmura le pauvre Thomas à Yvick qui ne s'éloignait pas de plus de deux mètres de sa personne depuis les événements effrayant qu'il avait vécu.

- Si cette chose revient, je serai là pour te protéger mec ! Fais-moi confiance, je suis le monstre qui fait peur aux monstres. Son ton arrogant aurait fait rire le plus jeune s'ils s'étaient trouvés dans une autre situation moins grave que celle dans laquelle ils étaient piégés. Et puis j'ai promis à ton pote le gardien de veiller sur toi."

Thomas se demandait parfois comment un gars aussi gentil et drôle que son codétenu avait pu se retrouver en prison. Un parrain de la mafia certes, mais qu'est-ce qui l'avait amené à ça ? Avec un code d'honneur et un sens de la morale pareil, le fait qu'il ait mal tourné lui semblait incompréhensible.

Ainsi, ils passèrent leur journée ensemble en effectuant des activités banales afin de s'occuper en attendant les directives de Damien. Yvick écrivait des parodies de clips musicaux qu'il montrait à Thomas dans le but de le faire rire, ce qui fonctionnait plutôt bien. Pendant les quelques heures que duraient ce spectacle ridicule, Thomas fixait son attention sur autre chose que sa mort imminente. Son exfiltration devait se faire le plus tôt possible pour déstabiliser l'ombre et l'affaiblir en la forçant à bouger sur une longue distance sans pouvoir se nourrir. Du moins, en théorie, si la créature se révélait être capable de se détacher de sa proie avant la mort de cette dernière pour s'attacher à une autre, leur plan tombait à l'eau. Les connaissances de Damien venaient de films ou de séries, rien de bien sérieux en sommes. Cependant, Thomas préférait agir sur des suppositions que de se laisser mourir sans rien faire. 

Dans la soirée, lorsqu'il fut temps pour tous les criminels de retourner dans leur cellule, Thomas s'étonna de ne pas voir Damien. Un gardien qu'il croisait régulièrement les escorta sans prononcer un mot. Il semblait affreusement nerveux et une fois qu'ils furent enfin dans leur chambre, il jura. "Putain, j'arrive pas à croire que je vais faire ça...". Puis l'homme en uniforme leur confia une lettre dans l'angle mort de la caméra de sécurité.

Sur le billet, on pouvait lire les mots suivants : 21 heures, ne sois pas en retard. Une patte de mouche élégante et lisible, Thomas supposa qu'il s'agissait de l'écriture de Damien. Il fit les mille pas et tournait comme un lion dans une cage. Il se sentait mal à l'idée d'enfreindre la loi en s'évadant, mais refusait de mourir avant la chose ayant tué sa femme. Yvick posa alors une main rassurante sur son épaule pour apaiser son angoisse. 

"- Tu veux venir ? Demanda soudainement Thomas à son colocataire. Je veux dire, tu veux t'évader avec moi ? Tu me l'as proposé au début de ton incarcération. Et tes hommes ne sont pas encore venus te chercher. Alors je me suis dit que tu pouvais peut-être venir avec moi.
- Non, je préfère les attendre, sinon ils vont penser que je ne leur fait pas confiance. Ils vont venir ne t'inquiète pas, nous sommes une famille. Affirma Yvick en souriant. Pourtant, dans son regard, Thomas constata qu'Yvick se mentait à lui-même, ses hommes ne viendraient pas. D'ailleurs, il n'était même pas certain qu'il y ait déjà eu "des hommes"."

Avec un sourire timide teinté de regret, Thomas commença à préparer ses affaires. La tâche fut effectuée en peu de temps, car il ne possédait presque rien. Ensuite, il donna son exemplaire du Rouge et le Noir à Yvick en lui faisant solennellement promettre de le rendre à la bibliothécaire de sa part.

Enfin sonna 21 heures. Damien frappa à la porte avant de l'ouvrir avec son trousseau de clés. Quand Thomas exprima son inquiétude concernant les caméras, son complice le rassura en riant. Hugo s'occupait de truquer la vidéosurveillance pour eux. Ne voulant pas le forcer à risquer son emploi pour une cause qu'il ne comprenait qu'à moitié, il tenait un poste extérieur, toutefois indispensable à l'opération.

Les couloirs paraissaient affreusement menaçants aux deux hommes, la nuit donnait à l'endroit une atmosphère pesante. Ils s'attendaient à faire une mauvaise rencontre à chaque instant. Sortir d'ici devenait un besoin pressant. Soudain, Damien propulsa son jeune protégé dans un recoin sombre du couloir. Un de ses collègues effectuait une ronde dans l'aile où ils se trouvaient. 

"- Damien ? Qu'est-ce que tu fais là ? Demanda-t-il surpris étant donné que son service finissait deux heures plus tôt.
- Bonsoir Théo, j'avais oublié un truc en salle de repos. Se justifia froidement le jeune homme.
- La salle de repos est de l'autre côté Damy. Il va falloir revoir ta géographie...
- J'en ai profité pour saluer Hugo. Compléta le suspect pour écarter le moindre doute pouvant émerger dans l'esprit de ce jeune homme perspicace.
- Tu n'as rien vu d'inhabituelle ?
- Non, je ne pense pas. Dit-il en se déplaçant légèrement sur la gauche pour cacher un peu plus le prisonnier.
- Niquel, je vais pouvoir finir plus tôt. Tu ne le dis pas au patron, mais j'avais prévu une soirée sympa avec ma copine avant que Hugo ne réclame un changement de poste."

Une fois le danger écarté, Thomas put sortir de sa cachette en soupirant de soulagement. Son cœur n'avait pas battu aussi vite depuis longtemps. Depuis son procès à la cours d'assises en fait. Damien lui adressa un grand sourire rassurant, ils ne leur restaient plus que quelques mètres avant de quitter définitivement l'établissement.

Thomas respira avec joie l'air frais de la nuit. Comme la liberté lui avait manqué. Savoir qu'il pouvait désormais se rendre où il le souhaitait apporter à son âme un repos immense. Il jeta un coup d'œil à son bienfaiteur afin de le remercia lorsqu'il aperçut son air tourmenté. Quelque chose clochait, le plan ne se déroulait pas comme Damien l'avait prévu.

"- Tout va bien ?
- Max' et Grim devraient déjà être là, ce n'est pas normal. Après un temps de pause, il reprit. Ne t'inquiète pas, nous allons commencer à avancer de manière à nous éloigner du centre, ils nous ramasseront au passage."

Thomas acquiesça et fit semblant de ne pas entendre Damien murmurait un inquiet "enfin, j'espère".

Entre quatre mursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant