Le monde était tout penaud

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J'ai eu envie de griffer le monde

Le lacérer,

Et le déchirer

Jusqu'à le faire saigner

Alors, peut-être qu'un peu de toi

Aurait pu s'inviter à nouveau dans ma réalité.

Mais je ne l'ai pas fait,

Le monde avait l'air trop fragile pour le blesser,

Il n'a pas fait exprès,

Je le sais.

Je lui en ai pourtant voulu

De t'avoir écarter si violemment,

Mais le pauvre, il n'a pas fait exprès

Je ne veux plus en douter.


Il était là béant de rien,

L'air tout désolé de m'avoir dupé,

Il me regardait avec ses yeux d'immeubles

Ses cils de nuages,

Ses iris de lampadaire solitaire,

Il avait l'air bête le monde,

Faut dire qu'il a pas fait exprès,

Qu'il a voulu sourire

Et que ça nous a fait trembler

Bien plus qu'il n'aurait pu l'imaginer.

Lui, il voulait juste se réjouir avec nous,

Mais il avait l'air tellement naïf

Quand tout s'est écroulé

Je ne peux pas le déchirer,

Je ne peux pas lui faire du mal

Pour qu'il me rende ta présence,

Tu comprends, n'est-ce pas ?

Il avait l'air si misérable,

À regarder nos cœurs se briser

Juste parce qu'il a voulu

Les rassembler.


Il était là, ses bras de forêts tout chétifs,

Tout ballants,

Il était tout désespéré de ne pas pouvoir nous aider

Lui, qui se sentait fautif.

Faut dire qu'on l'a bien épuisé

À lui arracher tout ce qu'il voulait donner

Il n'avait pas davantage le monde,

Alors, j'ai renoncé à lui demander un peu de toi,

Il en a pleuré des orages et des journées grises,

Il en a pleuré des étoiles filantes et des tours de planète,

Il a jamais su quoi faire le monde quand je pleurais,

Je ne doute pourtant pas qu'il ait essayé à chaque fois.

Je sais qu'il a longuement pleuré avec moi.

Pourtant, je ne suis jamais là pour lui,

Je le contemple parfois,

Bien des fois à vrai dire,

Mais on peut pas dire que ça le sauvera.


Je ne sais pas pourquoi je pleure en écrivant ces mots,

Peut-être qu'ils disent beaucoup de moi,

Peut-être que je m'en voulais autant que j'en ai voulu à tout et n'importe quoi,

Ça s'esquive sur mon visage, en gouttes salées,

J'ai les sentiments massacrés,

Mais le monde m'a offert la nuit, encore et encore,

Il m'a consolé dans l'obscurité de m'avoir laissé espérer,

Il m'a murmuré que tout irait bien, qu'il veillait sur moi

Je le savais mais ne l'ai jamais assez remercié

Je crois qu'il ne veut ni excuses, ni remerciements,

Chacun de mes pas le comble de joie

Il les veut moins hésitants,

Il sait que j'ai longtemps eu peur

Que j'ai longtemps voulu m'arrêter,

Il sait qu'avec ou sans toi, je continuerai

J'ignore encore ce qu'il voulait me montrer à travers toi,

Un jour, je trouverai le secret qu'il a voulu divulguer

En attendant, j'ai encore quelques sanglots à verser.


Vis, m'a demandé le monde tout penaud

J'ai essuyé mes yeux,

Il m'a pris la main,

Et m'a aidé à marcher,

Retrouver le chemin.

Tu existes,

Le monde, c'est un peu toi et beaucoup des autres,

À chaque fois que le monde m'aidera,

Tu seras un peu là,

À chaque fois que le monde me fascinera,

Tu seras un peu contemplé

À chaque fois que le monde me réconfortera

Tu seras un peu à mes côtés.

Le monde vient de sourire

Cela ne m'a pas fait tremblé,

Il me protège,

Et avec lui, un peu de toi veille sur moi.


Immer un immer wieder.

Le passé sera le présent,

Chaque fois qu'on s'attardera à y penser.


Poésie brumeuseWhere stories live. Discover now